La Bretagne fait face à une crise sanitaire sans précédent. La pénurie de médecins, notamment de spécialistes, plonge les patients dans le désarroi. Les listes d’attente s’allongent, les délais pour obtenir un rendez-vous s’éternisent. La colère monte et les manifestations se multiplient pour alerter sur cette situation alarmante.
Des témoignages bouleversants
Valérie et Philippe Marsac, habitants de Tonquédec dans les Côtes-d’Armor, cherchent désespérément un dermatologue depuis des mois. Pour consulter, ils doivent parcourir 600 km jusqu’à Nantes. Une situation qu’ils n’avaient pas anticipé en s’installant en Bretagne.
On est 240ᵉ sur une liste d’attente pour un médecin. C’est épuisant, fatigant, anxiogène. On se demande si on peut être soigné.
Valérie Marsac, patiente
Leur cas est loin d’être isolé. Un collectif local a recueilli près de 2000 témoignages similaires rien que dans l’ouest des Côtes-d’Armor. Des patients contraints d’attendre un an pour un rendez-vous chez le dentiste ou un an et demi pour une mammographie. Une maman voit les dents de sa fille « pourrir » faute de trouver un dentiste depuis deux ans.
Des médecins généralistes débordés
Face à la pénurie de spécialistes, les généralistes tentent de combler les manques. À Châteauneuf-du-Fou, neuf praticiens doivent assurer des soins dentaires, gynécologiques ou encore pédiatriques. Mais eux aussi se sentent abandonnés.
On ressent de la colère, qui n’est pas dirigée contre nous, mais contre le système. Nous aussi, on est en colère de ce manque de moyens.
Dr Sophie Cann, médecin généraliste
Selon les généralistes, on observe même une augmentation de la mortalité, notamment cardiovasculaire, dans ces zones sous-dotées par rapport au reste du Finistère. Un constat alarmant.
12% des Français vivent dans un désert médical
La Bretagne n’est malheureusement pas un cas isolé. Selon un rapport du Sénat, 12% de la population française, soit 8 millions de personnes, vit dans un désert médical. Les campagnes sont les premières touchées par ce fléau, avec une faible densité de médecins.
Les causes sont multiples : numerus clausus, vieillissement des médecins, manque d’attractivité des zones rurales… Mais les conséquences sont désastreuses pour les patients qui renoncent aux soins faute de praticiens disponibles.
Des pistes de solutions
Face à cette crise, des solutions émergent. Certaines communes misent sur des aides financières, comme des primes à l’installation, pour attirer de jeunes médecins. D’autres développent la télémédecine pour pallier le manque de praticiens sur place. Le recours accru aux infirmières en pratique avancée est aussi envisagé.
Mais pour beaucoup, ces mesures ne sont qu’un pansement sur une plaie béante. Il faudrait revoir en profondeur la régulation de l’installation des médecins, augmenter le numerus clausus, et rendre plus attractif l’exercice dans les zones sous-dotées. Un vaste chantier qui nécessite une réelle volonté politique.
En attendant, les Bretons continuent de se mobiliser. Manifestations, pétitions, cris d’alarme… Ils espèrent être enfin entendus pour que l’accès aux soins redevienne un droit, et non plus un parcours du combattant. Le temps presse, car c’est la santé de toute une région qui est en jeu.