La tension monte en Tanzanie suite aux élections locales qui se sont tenues cette semaine. L’Alliance pour le Changement et la Transparence (ACT Wazalendo), un des principaux partis d’opposition, a publiquement rejeté les résultats officiels. Selon eux, le scrutin a été entaché de nombreuses irrégularités et manipulations, le rendant totalement non crédible.
Une victoire écrasante du parti au pouvoir qui passe mal
D’après les chiffres annoncés par les autorités, le parti au pouvoir, le Chama Cha Mapinduzi (CCM), aurait raflé près de 99% des sièges dans les différentes circonscriptions du pays. Un raz-de-marée électoral qui suscite le scepticisme de l’opposition. La cheffe de l’ACT, Dorothy Semu, a déclaré lors d’une conférence de presse :
Nous rejetons les résultats annoncés car tout le processus a été manipulé. Nous avons besoin de nouvelles élections sous une nouvelle loi et un organe électoral indépendant. De l’inscription sur les listes électorales à la nomination et au vote, le processus a été complètement manipulé. Les élections n’étaient pas du tout crédibles.
– Dorothy Semu, cheffe de l’ACT Wazalendo
L’ACT n’a obtenu que 0,13% des sièges lors de ce scrutin, un résultat que le parti conteste fermement, réclamant l’annulation pure et simple des élections et la tenue d’un nouveau vote.
Un climat de peur et d’intimidation
Selon l’opposition, la campagne et le scrutin se sont déroulés dans un climat délétère. Dorothy Semu accuse le pouvoir d’avoir eu recours à des menaces contre les citoyens et à l’arrestation d’agents électoraux de l’opposition. Elle affirme qu’au moins 30 de ses membres ont été interpellés alors qu’ils s’opposaient à l’utilisation de faux bulletins de vote en faveur du CCM.
Violences meurtrières
L’autre grande formation de l’opposition, le Chadema, a également dénoncé des irrégularités le jour du scrutin, évoquant des « bulletins pré-marqués ». Un de leurs candidats aurait même été tué par la police à Dar es Salaam alors qu’il tentait d’empêcher la fraude. Deux autres membres du parti auraient aussi perdu la vie dans des violences liées aux élections la veille du vote.
Le pouvoir balaye les accusations
Du côté du CCM, on rejette en bloc les allégations de l’opposition. Amos Makalla, un haut responsable du parti, a affirmé que les résultats reflètent simplement la confiance des Tanzaniens dans la politique menée. Il attribue la déroute de l’opposition à sa mauvaise préparation et à des divisions internes :
L’opposition mérite ce qu’elle a eu en raison de sa mauvaise préparation et de certaines luttes intestines. Tout ce qu’elle dit n’est qu’une excuse pour dissimuler ses faiblesses.
– Amos Makalla, secrétaire du CCM chargé de la communication
Un test démocratique crucial
Pour de nombreux observateurs, ce scrutin local faisait figure de test grandeur nature avant les élections présidentielle et législatives prévues l’an prochain. Depuis l’arrivée au pouvoir de la présidente Samia Suluhu Hassan en 2021, l’opposition dénonce un durcissement de la répression politique malgré des signes d’ouverture initiaux.
La crédibilité et la transparence du processus électoral seront scrutées de près, alors que la Tanzanie cherche à consolider sa jeune démocratie. Les événements de ces derniers jours jettent une ombre inquiétante et appellent à une enquête approfondie. Les regards seront tournés vers les instances judiciaires et les organismes de surveillance, dont l’indépendance sera cruciale pour faire la lumière sur ces graves accusations.
La Tanzanie est à la croisée des chemins. Entre risque de dérive autoritaire et espoir d’ancrage démocratique, les prochains mois seront décisifs. La communauté internationale, les ONG et les citoyens seront attentifs aux signaux envoyés par le pouvoir en place. Car au-delà des résultats, c’est la sincérité même du scrutin qui est en jeu.
Les irrégularités présumées soulèvent de sérieuses questions sur l’état de la démocratie tanzanienne. Si elles sont avérées, elles terniraient la légitimité du gouvernement et fragiliseraient la confiance des électeurs dans le système. Il est essentiel que toute la lumière soit faite, de façon impartiale et transparente, afin de restaurer la crédibilité du processus électoral.
Dans un contexte régional marqué par des crises politiques et des tentations autoritaires, la Tanzanie a l’opportunité de montrer l’exemple en traitant ces graves allégations avec sérieux et en renforçant ses institutions démocratiques. L’avenir du pays et la confiance de ses citoyens en dépendent.