Imaginez un joueur capable de transformer un simple match de football en une œuvre d’art vivante, où chaque touche de balle semble défier les lois de la physique et de la logique. Un athlète dont le sourire contagieux illumine les stades autant que ses gestes techniques. En 2005, ce joueur existait bel et bien, et il s’appelait Ronaldinho. Cette année-là reste gravée dans les mémoires comme le point culminant d’une carrière déjà exceptionnelle, couronnée par un Ballon d’Or amplement mérité.
2005 : L’année où Ronaldinho a régné sur le football mondial
Cette saison 2004-2005 puis 2005-2006 avec le FC Barcelone, entrecoupée d’une Coupe des Confédérations triomphale avec le Brésil, représente sans doute le pic absolu de sa forme. Ronaldinho n’était plus seulement un grand joueur : il incarnait le football joyeux, créatif, imprévisible. Celui qu’on appelle le joga bonito, cette philosophie brésilienne du beau jeu.
À cette époque, le Barça de Frank Rijkaard domine l’Europe avec une équipe talentueuse : Eto’o, Deco, Xavi, Puyol, et au milieu de tout cela, un Brésilien qui semble jouer pour le plaisir avant tout. Ronaldinho arrive au club en 2003, après un passage au Paris SG, et explose véritablement deux ans plus tard.
Le récital au Santiago Bernabeu : une ovation historique
Parmi tous les moments iconiques de 2005, celui du 19 novembre reste probablement le plus marquant. Lors du Clasico au Bernabeu, Ronaldinho signe une performance étourdissante face au grand rival, le Real Madrid. Deux buts somptueux, des dribbles hallucinants, et à la fin du match, le public madrilène, pourtant farouchement anti-barcelonais, se lève pour l’applaudir debout.
Cet événement est rarissime dans l’histoire du football espagnol. Seuls quelques légendes comme Maradona ou Pelé avaient connu pareille reconnaissance de la part du public adverse. Cette ovation symbolise parfaitement la magie de Ronaldinho : il transcendait les rivalités pour toucher à l’universel du beau jeu.
Ce soir-là, il porte le Barça vers une victoire 3-0, avec un premier but après un slalom génial et un second sur une frappe pure. Les images tournent encore en boucle sur les réseaux, rappelant à quel point ce joueur pouvait rendre le football poétique.
Le pointu légendaire contre Chelsea en Ligue des Champions
Un autre instant culte date de mars 2005, en huitièmes de finale de la Ligue des Champions contre Chelsea. Mené 1-0 à Stamford Bridge, le Barça égalise grâce à un geste improbable de Ronaldinho. Sur une passe en profondeur, il devance le défenseur d’un toucher délicat du bout du pied, un pointu lobé qui surprend totalement Petr Čech.
Ce but n’est pas seulement décisif pour la qualification (le Barça l’emportera 4-2 au retour), il devient immédiatement viral à une époque où les vidéos circulaient déjà sur internet. Il illustre parfaitement la créativité sans limite de Ronaldinho : là où d’autres auraient tenté une frappe classique, lui choisit l’option la plus audacieuse et la plus belle.
Cette élimination de Chelsea, alors équipe la plus riche du monde avec Roman Abramovitch aux commandes, marque aussi le début de la domination européenne du Barça version Rijkaard.
La Coupe des Confédérations : domination avec la Seleção
L’été 2005, Ronaldinho rejoint la sélection brésilienne pour la Coupe des Confédérations en Allemagne, considérée comme une répétition générale avant la Coupe du Monde 2006. Le Brésil remporte le trophée en battant l’Argentine 4-1 en finale, et Ronaldinho brille de mille feux.
Meilleur joueur et meilleur buteur du tournoi avec cinq réalisations, il guide une équipe composée de stars comme Ronaldo, Adriano, Kaká ou Robinho. Des gestes techniques en pagaille, des passes décisives, et une joie de jouer communicative qui transcende les compétitions internationales souvent plus fermées.
En finale, il marque un but splendide d’une frappe enroulée, rappelant qu’avec le maillot auriverde, il reste ce même gamin des rues de Porto Alegre qui n’a jamais perdu son amour du jeu.
Le Ballon d’Or 2005 : une récompense incontestable
À l’automne 2005, la consécration arrive avec le Ballon d’Or. Ronaldinho devance largement Frank Lampard et Steven Gerrard au classement. À 25 ans, il devient le troisième Brésilien consécutif à remporter la distinction après Ronaldo (2002) et Rivaldo (1999), confirmant la suprématie sud-américaine à cette époque.
Ce trophée récompense non seulement ses statistiques impressionnantes – plus de 20 buts et 15 passes décisives avec le Barça – mais surtout son influence sur le jeu collectif et son rayonnement mondial. Les publicités Nike avec le joga bonito tournent en boucle, faisant de lui une icône culturelle bien au-delà du sport.
« Jouer au football, c’est comme danser. Il faut du rythme, de la joie, de la créativité. »
Ronaldinho, 2005
Le style Ronaldinho : qu’est-ce que le vrai joga bonito ?
Le joga bonito n’est pas seulement un slogan marketing. C’est une philosophie héritée des grandes équipes brésiliennes des années 1970-1980, avec Pelé, Zico ou Socrates. Un football offensif, technique, basé sur le dribble, la passe courte et l’improvisation.
Ronaldinho en est l’incarnation parfaite dans les années 2000. Ses élastiques, ses sombrero, ses no-look passes, ses talonnades : tout semble facile, naturel. Il joue avec le sourire, contagieux, et donne l’impression que le football reste avant tout un jeu.
Dans une époque où le football européen se professionnalise de plus en plus, avec une intensité physique croissante, Ronaldinho rappelle que la technique pure et la joie peuvent encore primer.
Voici quelques gestes emblématiques qui définissent son style :
- Le sombrero sur un défenseur suivi d’un contrôle orienté
- La passe sans regarder qui élimine trois joueurs
- Le coup du foulard (talonnade en retrait)
- La roulette à 360° en pleine course
- Le tir en feuille morte depuis 30 mètres
Le Barça champion d’Europe : l’aboutissement collectif
La saison 2005-2006 voit le FC Barcelone remporter la Ligue des Champions face à Arsenal (2-1) en finale à Paris. Bien que Ronaldinho soit moins décisif ce soir-là, son rôle tout au long de la campagne est déterminant.
Le Barça pratique alors un football total, avec un pressing haut et une possession léchée qui préfigure le futur tiki-taka de Guardiola. Ronaldinho, en faux 9 ou en meneur reculé, est le catalyseur créatif de cette équipe.
Ce titre européen vient couronner deux années de domination, avec également deux titres de champion d’Espagne consécutifs.
Vingt ans après : le dernier vrai artiste du football ?
En 2025, vingt ans exactement après ce Ballon d’Or, la question mérite d’être posée : a-t-on revu un joueur aussi libre, aussi créatif, aussi joyeux sur un terrain ? Les noms de Neymar, Messi ou Hazard reviennent souvent, mais aucun n’a atteint le même niveau de fantaisie pure.
Le football moderne, avec son intensité physique extrême, son pressing collectif et ses données analytiques, laisse moins de place à l’improvisation individuelle. Les artistes purs se font rares. Vinícius Jr s’en rapproche parfois, avec ses dribbles chaloupés, mais le contexte est différent.
Ronaldinho semble appartenir à une époque révolue, celle où un joueur pouvait encore gagner un Ballon d’Or principalement grâce à sa magie plutôt qu’à des statistiques brutes.
Aujourd’hui, les critères ont évolué : on récompense davantage la régularité, l’efficacité, l’impact collectif sur une saison entière. Ronaldinho, lui, gagnait par éclats de génie, par moments de pure beauté.
L’héritage de Ronaldinho dans le football contemporain
Malgré une fin de carrière plus chaotique, marquée par des choix de vie extra-sportifs, l’influence de Ronaldinho reste immense. Il a inspiré toute une génération de joueurs sud-américains et européens à oser davantage, à tenter le geste improbable.
Les vidéos de ses gestes techniques font encore des millions de vues sur les plateformes. Les jeunes joueurs du monde entier essaient de reproduire ses élastiques ou ses sombreros dans les cours d’école ou les futsal.
Son sourire et sa joie de jouer ont aussi rappelé que le football reste un spectacle, un divertissement. Dans un monde parfois trop sérieux, trop business, Ronaldinho a incarné l’insouciance et le plaisir.
En 2005, il a atteint l’apogée du joga bonito. Vingt ans plus tard, il reste une référence absolue pour tous les amoureux du beau football. Peut-être que personne ne parviendra jamais à reproduire exactement sa magie, mais son héritage continue d’illuminer le jeu.
Et vous, quel est votre souvenir préféré de Ronaldinho en 2005 ? Ce pointu contre Chelsea ? L’ovation du Bernabeu ? Ou simplement son sourire éternel sur le terrain ? Une chose est sûre : cette année-là, le football était plus beau grâce à lui.









