Selon une source proche du gouvernement népalais, le Premier ministre Khadga Prasad Sharma Oli effectuera sa première visite à l’étranger en Chine du 2 au 5 décembre prochains, une destination qui rompt avec la tradition diplomatique faisant de l’Inde le premier pays visité par les nouveaux dirigeants du Népal. Cette annonce soulève des questions sur les relations du pays himalayen avec ses deux puissants voisins et ses choix en matière de politique étrangère.
Une visite cruciale pour les relations sino-népalaises
Âgé de 72 ans, KP Oli, leader du Parti communiste népalais marxiste-léniniste unifié (CPN-UML), a déjà dirigé le Népal à trois reprises : en 2015, 2018 et brièvement en 2021. Au cours de ses précédents mandats, il s’était rendu en Chine en 2016 et 2018. Sa nouvelle visite a pour objectif principal de faire avancer des projets bilatéraux, comme l’extension de l’aéroport de Pokhara, ville touristique du centre du pays.
Pradeep Gyawali, secrétaire général adjoint du CPN-UML, a expliqué que cette visite vise à mettre en œuvre des accords déjà signés mais retardés par la pandémie de Covid-19 et l’instabilité politique au Népal ces dernières années. Il s’agit donc d’une étape importante pour renforcer la coopération économique et les liens diplomatiques entre les deux pays.
L’absence d’invitation de l’Inde en question
Cependant, le choix de la Chine comme première destination interpelle, car il contrevient à l’usage qui voulait que les Premiers ministres népalais se rendent d’abord en Inde après leur prise de fonction. Selon la presse locale, cette décision de KP Oli serait motivée par l’absence d’une invitation formelle de New Delhi. Cela soulève des interrogations sur l’état actuel des relations entre le Népal et l’Inde, historiquement proche.
Un pays tiraillé entre deux géants régionaux
Le Népal, pays de 30 millions d’habitants, se trouve pris en étau entre la Chine et l’Inde, deux puissances mondiales qui cherchent à étendre leur influence dans la région. Akhilesh Upadhyay, du centre de réflexion Strategic Affairs, souligne que le Népal « souffre de l’anxiété du petit pays coincé entre deux géants », mais que ses choix doivent avant tout être guidés par l’intérêt national.
Malgré un rééquilibrage ces dernières années, l’Inde reste le premier partenaire commercial du Népal avec près de 64% des échanges, contre 14% pour la Chine selon les douanes népalaises. New Delhi devance aussi Pékin en termes d’investissements, avec 762 millions de dollars contre 259 millions selon la banque centrale du Népal.
Une économie fragilisée à relancer
Au-delà des enjeux géopolitiques, le Népal cherche surtout à relancer son économie durement touchée par la pandémie, qui a dévasté le secteur clé du tourisme et tari les transferts de fonds de son importante diaspora. La coopération avec la Chine apparaît donc cruciale, avec des projets comme l’aéroport de Pokhara qui pourraient stimuler l’activité.
Mais le Népal ne peut pas non plus se permettre de négliger ses liens avec l’Inde. Un délicat équilibre diplomatique s’impose donc pour ce petit pays himalayen, afin de préserver ses intérêts sans s’aliéner l’un ou l’autre de ses encombrants voisins. La visite de KP Oli en Chine sera scrutée de près, car elle donnera le ton de la politique étrangère népalaise pour les prochaines années.