Le feuilleton juridique opposant les chaînes C8 et NRJ12 à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) connaît un nouveau rebondissement. Ce lundi, le Conseil d’État a rejeté les recours intentés en référé par les deux chaînes, qui contestaient la décision du régulateur de ne pas renouveler leurs fréquences sur la TNT.
Condition d’urgence « pas remplie »
Dans ses décisions, le juge administratif suprême a estimé que la condition d’urgence nécessaire à un référé n’était « pas remplie ». Une audience sur le fond du dossier devrait cependant avoir lieu « dans les prochaines semaines », a-t-il précisé.
Pour rappel, mi-décembre, l’Arcom avait annoncé qu’elle ne reconduirait pas les autorisations de diffusion de C8 et NRJ12 sur le réseau hertzien à compter de 2025, leur préférant les chaînes concurrentes Culturebox et LCI. Elle avait notamment motivé sa décision en pointant des manquements répétés des deux chaînes à leurs obligations.
Mesures conservatoires demandées
Les groupes Canal+ et NRJ avaient immédiatement dénoncé une décision « incompréhensible et injustifiée » et saisi le Conseil d’État en référé. Ils réclamaient la suspension en urgence de la procédure d’appel à candidatures lancée par l’Arcom pour réattribuer leurs fréquences.
Selon une source proche du dossier, les deux chaînes avaient également demandé des mesures conservatoires pour geler la situation jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur le fond. Une requête visiblement rejetée par le juge des référés.
La bataille continue sur le fond
Si ce rejet en urgence constitue un revers pour C8 et NRJ12, la bataille juridique est loin d’être terminée. Les deux chaînes ont en effet également déposé des recours sur le fond pour contester la légalité même de la procédure et de la décision de l’Arcom.
« La décision de l’Arcom est scandaleuse et infondée. Nous allons continuer à nous battre par tous les moyens juridiques pour défendre une concurrence loyale et la liberté de choix des téléspectateurs. »
– Un porte-parole du groupe Canal+
Selon nos informations, les dirigeants de Canal+ et NRJ seraient déterminés à aller jusqu’au bout et pourraient même envisager de porter l’affaire devant les juridictions européennes s’ils n’obtenaient pas gain de cause en France. L’enjeu est de taille pour les deux groupes, tant en termes d’image que de revenus publicitaires.
L’avenir de C8 et NRJ12 en suspens
En attendant la décision sur le fond, l’avenir de C8 et NRJ12 reste plus que jamais incertain. Si leur éviction de la TNT était confirmée, les deux chaînes pourraient certes continuer à émettre via d’autres canaux (satellite, câble, IPTV…) mais perdraient une grande partie de leur audience et de leurs recettes.
De quoi fragiliser leur modèle économique et les contraindre à d’importantes restructurations, voire à une remise en cause de leur existence-même sous leur forme actuelle. Un scénario catastrophe que les deux groupes espèrent encore pouvoir éviter grâce à leurs recours juridiques.
Des tensions anciennes avec le régulateur
Au-delà de ce dossier spécifique, cette affaire vient raviver les tensions anciennes entre l’Arcom et certaines chaînes privées. Ces dernières reprochent régulièrement au régulateur ses décisions « arbitraires », son interventionnisme et un manque de souplesse et de dialogue.
De son côté, l’Arcom assume pleinement son rôle de gendarme de l’audiovisuel et met en avant le respect des obligations des chaînes et son devoir de faire primer l’intérêt général et le pluralisme sur les intérêts particuliers. Une opposition de vues qui risque de perdurer tant que le mode de régulation du PAF n’aura pas été réformé en profondeur.
En attendant, tous les yeux sont désormais tournés vers le Conseil d’État, qui devra trancher sur le fond ce litige inédit aux lourdes conséquences pour le paysage audiovisuel français. Sa décision, très attendue, fera office de jurisprudence et pourrait influencer pour longtemps les rapports de force entre régulateur et acteurs privés.