C’est une nouvelle qui redonne espoir aux familles brisées par la dictature argentine. Après 47 ans de recherche acharnée, l’organisation de défense des droits de l’homme « Grands-mères de la Place de Mai » a annoncé avoir retrouvé le 138e enfant volé pendant cette sombre période de l’histoire du pays. Un miracle rendu possible grâce aux progrès des tests ADN.
Le petit-fils en question, né en décembre 1976, est l’enfant d’un jeune couple de militants politiques, Marta Enriqueta Pourtalé et Juan Carlos Villamayor. D’après les informations recueillies, le couple aurait été enlevé à son domicile de Buenos Aires par des hommes en civil, alors que Marta était enceinte de près de 9 mois. Ils auraient ensuite été vus au tristement célèbre centre de détention clandestin de l’ESMA, où plus de 5000 opposants politiques ont été torturés, dont seule une centaine a survécu selon les associations de défense des droits humains.
C’est probablement là-bas que serait né le 138e petit-fils retrouvé, parmi la trentaine de naissances recensées dans ce centre de l’horreur. Grâce au travail acharné de la Commission nationale pour le droit à l’identité depuis 1999, ce dernier a pu être identifié et ses origines révélées, redonnant ainsi une part de vérité à sa famille.
Le premier cas résolu sous la présidence contestée de Javier Milei
Cette découverte, la première depuis septembre 2023, intervient dans un contexte politique tendu en Argentine. En effet, le nouveau président Javier Milei et sa vice-présidente Victoria Villarruel, proches des milieux militaires, remettent ouvertement en cause le bilan de la dictature et notamment le nombre de disparus avancé par les organisations de défense des droits de l’homme.
Pourtant, l’histoire de ce 138e petit-fils volé apporte une preuve supplémentaire des crimes commis pendant cette période noire. Son identification démontre l’importance de poursuivre ce travail de mémoire et de vérité, pour que les familles puissent enfin faire leur deuil et obtenir justice.
Les Grands-mères de la Place de Mai, gardiennes de la mémoire
Depuis la fin de la dictature en 1983, les Grands-mères de la Place de Mai se battent sans relâche pour retrouver les enfants volés et les rendre à leurs familles légitimes. Grâce à leur détermination et leur courage, 138 d’entre eux ont pu recouvrer leur véritable identité à ce jour.
Nous n’arrêterons jamais de chercher, jusqu’au dernier. Chaque enfant retrouvé est une victoire contre l’oubli et l’impunité.
– Estela de Carlotto, présidente des Grands-mères de la Place de Mai
Leur combat est d’autant plus crucial dans le contexte actuel, où certains tentent de minimiser ou nier les atrocités commises. Chaque petit-fils ou petite-fille identifié apporte un nouvel éclairage sur cette pages sombre de l’histoire argentine et honore la mémoire de ses parents disparus.
Une lueur d’espoir pour des centaines d’autres familles
Si les retrouvailles de ce 138e petit-fils volé sont une immense victoire, le combat est encore long. On estime que près de 500 bébés auraient été arrachés à leurs parents pendant la dictature pour être confiés à des familles proches du régime militaire.
Aujourd’hui adultes, beaucoup ignorent cette terrible vérité sur leurs origines. Les Grands-mères de la Place de Mai les encouragent à faire un test ADN, seul moyen de lever le voile sur leur véritable identité et de renouer, peut-être, avec leur histoire familiale brisée.
Nous lançons un appel à tous les jeunes nés entre 1975 et 1980 et qui doutent de leur identité: osez faire le test. La vérité vous rendra libres.
– Message des Grands-mères de la Place de Mai
Chaque nouvelle identification apporte la preuve que leur combat est juste et nécessaire. Malgré le temps qui passe, l’espoir demeure pour des centaines d’autres familles de retrouver un jour l’enfant qui leur a été volé.
L’histoire du 138e petit-fils retrouvé est bouleversante à plus d’un titre. Elle témoigne des blessures encore vives de l’Argentine mais aussi de la résilience d’un peuple qui se bat pour la vérité et la justice. Puisse son exemple encourager d’autres jeunes à entreprendre cette quête des origines, pour triompher enfin des derniers secrets de cette dictature sanglante.
