En ce dimanche matin, les premiers dépouillements partiels des élections législatives anticipées en Islande placent le parti social-démocrate Alliance en tête, selon les informations rapportées par le diffuseur national RUV. Ce scrutin, convoqué suite à l’implosion en octobre de la coalition gauche-droite au pouvoir, se déroule dans un contexte de préoccupations majeures des électeurs islandais autour du pouvoir d’achat, du logement et du système de santé, sur fond d’inflation persistante et de taux d’intérêt élevés.
Un paysage politique en plein bouleversement
Si la tendance se confirme, l’Alliance sociale-démocrate menée par Kristrun Frostadottir réaliserait une percée spectaculaire avec 21,2% des suffrages sur la base du dépouillement d’un tiers des bulletins. Le parti plus que doublerait ainsi son score par rapport aux élections de 2021 où il avait à peine franchi la barre des 10%. Un résultat qui semble annoncer de profonds changements dans la gouvernance du pays, comme l’a souligné la cheffe de file, tout en appelant à la prudence à ce stade du comptage.
Juste derrière, le parti de l’Indépendance (conservateur) du Premier ministre sortant Bjarni Benediktsson talonne les sociaux-démocrates avec 19,9% des voix, talonné lui-même par le parti de la Réforme libérale à 16%. Le mouvement Gauche-Verts, membre de la coalition sortante, semble quant à lui se diriger vers une déroute en ne recueillant que 2,4% des suffrages.
Quel avenir pour la coalition au pouvoir ?
La question de la future coalition gouvernementale s’annonce épineuse. En Islande, la culture politique penche rarement vers des gouvernements minoritaires, rappelle Eirikur Bergmann, professeur de sciences politiques. Les partis vont donc chercher à constituer une majorité à travers une alliance.
Olafur Hardarson, autre politologue islandais, voit un rapprochement possible entre sociaux-démocrates et libéraux en raison de convergences programmatiques, avec un ou deux autres partis. Mais le jeu des coalitions reste très ouvert, prévient-il, rendant l’exercice de prédiction périlleux.
Les enjeux cruciaux du scrutin
Au cœur des préoccupations de l’électorat : les questions sociales et économiques. Un sondage Gallup publié début novembre révèle que 69% des Islandais placent la santé parmi leurs priorités, devant l’économie (62%) et le logement (61%).
Les électeurs islandais attendent de vraies réponses à la crise du pouvoir d’achat et de l’accès aux soins.
– Un analyste politique
L’immigration, bien qu’à l’origine de la chute du gouvernement, ne figure en revanche qu’à la 5ème place des enjeux cités, dans un pays pourtant cosmopolite où un habitant sur cinq est né à l’étranger. Un signe que les difficultés du quotidien priment pour les Islandais.
L’instabilité politique, une constante islandaise
Depuis la crise financière de 2008 qui a durement frappé les banques islandaises surendettées, rares sont les partis à sortir indemnes de leur passage au pouvoir. Au cours des 15 dernières années, les électeurs ont sanctionné quasi-systématiquement les gouvernements en place lors des élections, note Olafur Hardarson. Une volatilité de l’électorat qui rend l’exercice du pouvoir de plus en plus périlleux.
Les Islandais ont aussi eu les yeux rivés vers le ciel cette année, avec les multiples éruptions volcaniques dans la péninsule de Reykjanes, au sud-ouest de l’île. La région, restée calme pendant 8 siècles jusqu’en mars 2021, a connu 7 éruptions en 12 mois, forçant l’évacuation à de nombreuses reprises du village de pêcheurs de Grindavik.
Dans l’attente des résultats complets, c’est la météo qui risque de voler la vedette au comptage des bulletins. D’importantes chutes de neige et des vents violents sont annoncés, faisant redouter des retards dans l’acheminement des bulletins restants. De quoi prolonger encore un peu plus le suspense sur l’issue de ce scrutin crucial pour l’avenir de l’Islande.