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Anna Maria Maiolino : Une Artiste Migrante au Musée Picasso

Anna Maria Maiolino, star brésilienne, expose à Paris. Découvrez son univers d'exil et d'identité au musée Picasso. Une œuvre vibrante à ne pas manquer ! Que révèle son art sur notre monde ?

Imaginez marcher les yeux fermés dans une rue jonchée d’œufs, chaque pas frôlant la fragilité. C’est l’image saisissante qu’Anna Maria Maiolino, figure majeure de l’art contemporain brésilien, a offerte au monde avec sa performance iconique Entrevidas. À 83 ans, cette artiste migrante, née en Italie et façonnée par le Venezuela et le Brésil, dévoile son univers au musée Picasso à Paris. Son exposition, Je suis là/Estou aqui, est une plongée dans une œuvre marquée par l’exil, l’identité et une curiosité insatiable. Pourquoi son art résonne-t-il si profondément aujourd’hui ?

Une vie d’exil, une œuvre universelle

Anna Maria Maiolino n’est pas seulement une artiste : elle est une passeuse de cultures. Née en 1942 dans les Pouilles, en Italie, elle grandit dans une famille nombreuse, bercée par une enfance qu’elle décrit comme « heureuse et animée ». À 12 ans, son destin bascule : sa famille émigre au Venezuela. Ce premier déracinement marque le début d’une vie entre plusieurs mondes, une tension qu’elle transforme en force créative. « Je suis une artiste, une immigrée italienne et une vieille femme de 83 ans », déclare-t-elle avec un éclat malicieux, devant l’une de ses sculptures en argile.

Son parcours, riche et mouvementé, traverse des continents et des époques. Du Venezuela au Brésil, en passant par New York, Maiolino tisse une œuvre qui défie les frontières. Ses créations, qu’il s’agisse de dessins, de sculptures ou de performances, portent la trace de cet entre-deux : une quête d’appartenance mêlée d’un désir de partir. Cette dualité, au cœur de son exposition parisienne, captive par sa sincérité et son universalité.

Une première au musée Picasso

L’exposition Je suis là/Estou aqui, inaugurée dans le cadre de la saison Brésil-France 2025, est un événement. Pour la première fois, une rétrospective monographique est dédiée à Maiolino en France. Présentant une centaine d’œuvres – dessins, gravures, vidéos, peintures et sculptures abstraites –, elle dévoile un univers où se mêlent géométrie, symboles et une nostalgie teintée d’humour. Chaque pièce raconte une histoire, celle d’une femme qui a transformé l’exil en un langage artistique.

« Picasso était aussi un immigré, espagnol, très curieux, qui a utilisé divers supports. Cette curiosité, qui est aussi la mienne, me rapproche de lui. »

Anna Maria Maiolino

Ce lien avec Picasso, qu’elle revendique avec humilité, est au cœur de l’exposition. Comme lui, Maiolino explore sans relâche, passant d’un médium à l’autre avec une liberté déconcertante. Ses nouveaux paysages, sculptures en argile, évoquent des formes organiques, presque vivantes, qui semblent porter les souvenirs de son enfance italienne. Une salle entière, recouverte de concrétions en terre, rappelle les plats de pâtes de ses origines, un clin d’œil à la fois intime et universel.

Entrevidas : marcher sur des œufs

Parmi les œuvres phares de l’exposition, Entrevidas (1981) reste gravée dans les mémoires. Dans cette performance, Maiolino marche les yeux fermés au milieu d’œufs disposés au sol, un geste à la fois poétique et politique. Réalisée sous la dictature militaire brésilienne, l’œuvre symbolise la précarité d’une existence sous surveillance, où chaque pas pouvait être interprété comme un acte de résistance. « C’était comme vivre avec une ombre au-dessus de la tête », confie-t-elle.

En mars 2025, l’artiste a repris cette performance au musée d’art de São Paulo, prouvant que son message reste d’actualité. Cette œuvre, accompagnée d’une série de photographies, incarne la fragilité de la liberté et la force de la création face à l’oppression. Elle illustre aussi son approche multidisciplinaire, où le corps, l’espace et le contexte politique s’entrelacent.

Points forts d’Entrevidas :

  • Performance réalisée sous la dictature brésilienne.
  • Symbolisme des œufs : fragilité et tension.
  • Photographies exposées au musée Picasso.
  • Reprise en 2025 à São Paulo.

Un parcours artistique sans frontières

Le parcours de Maiolino est une odyssée. Après son départ pour le Venezuela en 1954, elle suit une formation artistique et commence à explorer l’identité à travers ses créations. En 1960, elle s’installe au Brésil, où elle s’engage dans le mouvement de la Nouvelle Figuration, aux côtés de l’artiste Rubens Gerchman. Ensemble, ils fondent une famille et partagent une vision d’avant-garde, défiant les normes artistiques de l’époque.

Son séjour à New York, dans les années 60, marque un tournant. Là, elle se consacre au dessin et à l’écriture poétique, posant les bases d’une œuvre introspective. Ses notes, qu’elle décrit comme une « autobiographie fragmentée », nourrissent ses films en super-8, des œuvres expérimentales où se mêlent mémoire et imagination. De retour au Brésil en 1971, elle conjugue son art avec les défis d’être une femme active et une mère, explorant des thèmes comme la faim et la place du corps féminin.

L’argile, mémoire collective

À partir des années 80, Maiolino se tourne vers l’argile, un matériau qu’elle considère comme un « accès intuitif à une mémoire collective ». Ses sculptures, à la fois brutes et délicates, évoquent des paysages intérieurs, des souvenirs d’enfance et des racines culturelles. Dans l’exposition, une salle dédiée à ces créations en terre captive par sa simplicité et sa puissance évocatrice. Chaque pièce semble vibrer d’une histoire, d’un lieu, d’une émotion.

« Je n’ai aucun médium privilégié », affirme Maiolino. Cette liberté transparaît dans la diversité de son œuvre : peintures, livres-objets, xylogravures, dessins sur feuilles déchirées. Elle décrit ces derniers comme un « espace inventé » au service d’idées uniques. Cette approche, à la fois intuitive et réfléchie, fait de son travail un dialogue constant entre le passé et le présent.

Un pont entre cultures

L’exposition Je suis là/Estou aqui est plus qu’une rétrospective : c’est un pont entre les cultures. Organisée dans le cadre de la saison Brésil-France 2025, elle s’inscrit dans un programme réunissant plus de 600 artistes brésiliens à travers 300 événements culturels. Maiolino, honorée d’un Lion d’or à la Biennale de Venise 2024 pour l’ensemble de sa carrière, incarne cette rencontre entre les mondes.

Son œuvre, traversée par plusieurs langues et identités, parle à tous. Elle explore l’exil non comme une rupture, mais comme une richesse. « Une tension constante entre l’envie d’appartenir à un lieu et de le quitter », explique Sébastien Delot, co-commissaire de l’exposition. Cette idée d’entre-deux poétique résonne dans chaque œuvre, des sculptures en argile aux dessins géométriques.

Période Lieu Moment clé
1954 Venezuela Émigration et début de formation artistique
1960 Brésil Engagement dans la Nouvelle Figuration
1971 Brésil Retour et exploration du corps féminin
1981 Brésil Performance Entrevidas
2024 Venise Lion d’or à la Biennale

Une artiste intemporelle

À 83 ans, Anna Maria Maiolino continue d’inspirer. Son œuvre, ancrée dans son vécu, transcende les frontières géographiques et temporelles. Elle parle d’exil, d’identité, de résistance, mais aussi de joie et de mémoire. Ses sculptures en argile, ses dessins déchirés, ses performances audacieuses sont autant de fragments d’une vie dédiée à l’art.

L’exposition au musée Picasso est une invitation à découvrir une artiste qui, comme elle le dit, partage une « communauté d’âme » avec Picasso. Mais au-delà de cette connexion, c’est sa capacité à transformer le personnel en universel qui fait d’elle une figure incontournable. Son art, vibrant et poétique, nous rappelle que l’exil n’est pas seulement une perte, mais aussi une source infinie de création.

Pourquoi voir l’exposition ?

  • Première rétrospective de Maiolino en France.
  • Une œuvre multidisciplinaire et accessible.
  • Un regard unique sur l’exil et l’identité.
  • Un dialogue avec l’héritage de Picasso.

En parcourant Je suis là/Estou aqui, on ne peut s’empêcher de ressentir la force d’une artiste qui, à travers six décennies de création, a su faire de ses racines mouvantes un langage universel. Son œuvre, à la croisée des cultures, continue de questionner et d’émouvoir. Une expérience à ne pas manquer pour quiconque s’intéresse à l’art, à l’histoire et à l’humain.

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