Le milieu du cinéma français se voit une nouvelle fois secoué par des accusations de violences sexuelles visant l’un de ses réalisateurs emblématiques. Jacques Doillon, cinéaste de renom âgé de 80 ans, est convoqué ce vendredi matin par un juge d’instruction parisien suite aux plaintes déposées par plusieurs femmes, dont la comédienne Judith Godrèche, pour des faits présumés de viol.
Arrivé au tribunal de Paris coiffé d’une casquette noire et portant des lunettes de soleil, le metteur en scène est accompagné de son avocate, Me Marie Dosé. Si cette dernière n’a pas souhaité faire de commentaires pour le moment, Jacques Doillon avait nié en avril dernier avoir profité de sa position pour obtenir des faveurs sexuelles.
Une garde à vue levée pour raisons médicales début juillet
L’affaire avait pris un nouveau tournant début juillet lorsque le réalisateur avait été placé en garde à vue par la Brigade de protection des mineurs, au même titre que son confrère Benoît Jacquot, également mis en cause par Judith Godrèche. Si ce dernier a depuis été inculpé pour viols sur deux actrices, Julia Roy et Isild Le Besco, la garde à vue de M. Doillon avait quant à elle été levée « pour raisons médicales », a déclaré une source proche du dossier.
Le parquet de Paris réfléchissait alors aux suites à donner à ce volet de l’enquête. Lors de son interrogatoire, Jacques Doillon avait notamment été confronté aux accusations de Joe Rohanne, personne trans non binaire ayant déposé plainte pour des faits de viols, coups et blessures et violences psychologiques survenus entre 2009 et 2012 en France et en Belgique, selon les révélations du journal Le Monde.
Plaintes pour des faits prescrits et non prescrits
En plus de ce témoignage accablant, deux autres femmes avaient porté plainte contre le cinéaste pour des agressions sexuelles qui semblaient cependant prescrites. Hélène M. accuse Jacques Doillon de viol en 1995 à Paris alors qu’elle était âgée de 16 ans. Aurélie Le Roc’h relate quant à elle une tentative de viol pendant l’été 1998, au domicile du réalisateur situé en région parisienne.
C’est la plainte de l’actrice Judith Godrèche qui est à l’origine de cette enquête préliminaire visant les deux metteurs en scène, même si les faits qu’elle dénonce sont désormais prescrits. La comédienne affirme que M. Doillon lui aurait « mis les doigts dans la culotte » lors d’essais pour un film sorti en 1989, année de ses 15 ans où elle était en couple avec Benoît Jacquot.
Bataille judiciaire engagée autour des accusations
En réaction à ces révélations chocs, Jacques Doillon a décidé d’attaquer Judith Godrèche en diffamation pour un post Instagram publié en février dernier où elle l’accusait de « coucher » avec des « enfants ». La comédienne a récemment été avisée d’une possible inculpation pour diffamation, une procédure jugée automatique par ses avocats.
Cette convocation devant la justice du cinéaste français pour des faits de violences sexuelles intervient dans un contexte post #MeToo où la parole des victimes se libère petit à petit. Si certains peuvent déplorer la prescription de nombreux actes, elle permet néanmoins d’ouvrir un débat nécessaire sur le fonctionnement d’un milieu du 7ème Art gangrené par l’omerta et les rapports de domination.
Le cas Jacques Doillon illustre parfaitement les dérives d’un système où des hommes puissants pouvaient profiter de leur position pour abuser de jeunes actrices en quête de reconnaissance. Il est désormais temps que la honte et la culpabilité changent enfin de camp. La vague #MeToo aura au moins permis aux langues de se délier et à la justice de se saisir, même tardivement, de ces affaires sordides qui ternissent l’image du cinéma.