Que se passe-t-il lorsqu’un pays se divise sur la manière d’honorer un ancien dirigeant ? En Zambie, la mort de l’ex-président Edgar Lungu a révélé des tensions profondes, non seulement entre sa famille et le gouvernement, mais aussi dans le tissu politique du pays. Cette situation, marquée par une dispute autour des funérailles et la fin abrupte du deuil national, illustre les défis d’un pays aux prises avec son passé et son présent. Plongeons dans cette affaire qui a secoué la nation.
Une Fin de Deuil Controversée
La Zambie, ce vaste pays d’Afrique australe peuplé d’environ 19 millions d’habitants, a été le théâtre d’un événement inhabituel. Après le décès d’Edgar Lungu, président de 2015 à 2021, le gouvernement avait décrété une période de deuil national pour honorer sa mémoire. Initialement fixée à sept jours, cette période a été prolongée jusqu’au 23 juin. Cependant, une décision inattendue a mis fin à ce deuil plus tôt que prévu, suscitant des débats dans tout le pays.
Le président actuel, Hakainde Hichilema, a annoncé cette décision lors d’une allocution télévisée. Selon lui, la famille de Lungu a empêché le rapatriement du corps de l’ancien dirigeant, provoquant une impasse qui a conduit à l’arrêt du deuil. Cette annonce a surpris la population, qui s’attendait à des funérailles d’État empreintes de solennité.
Le Conflit autour des Funérailles
Edgar Lungu est décédé le 5 juin en Afrique du Sud, à l’âge de 68 ans. Son corps devait être rapatrié en Zambie avec des honneurs militaires pour être exposé publiquement avant son inhumation. Cependant, la famille de l’ancien président a refusé de remettre le corps à l’armée sud-africaine, protestant contre les arrangements proposés par le gouvernement zambien.
Le point de discorde ? La présence du président Hichilema à l’accueil du corps. Selon Makebi Zulu, porte-parole de la famille Lungu, l’ex-président avait expressément demandé avant sa mort que Hichilema ne participe pas à cet événement. Cette requête, relayée par la presse, a jeté une lumière crue sur les tensions persistantes entre les deux camps politiques.
« Nous ne sommes pas d’accord avec le programme gouvernemental des funérailles, en particulier avec la participation du président Hichilema. »
Makebi Zulu, porte-parole de la famille Lungu
Ce désaccord a conduit à une situation sans précédent : le corps de Lungu est resté en Afrique du Sud, et les préparatifs des funérailles ont été suspendus. Face à cette impasse, Hichilema a exprimé ses excuses au président sud-africain Cyril Ramaphosa, qualifiant la situation d’impasse malencontreuse.
Un Contexte Politique Chargé
Pour comprendre l’ampleur de cette controverse, il faut remonter à la perte du pouvoir d’Edgar Lungu en 2021. Battu à l’élection présidentielle par Hichilema, Lungu a laissé derrière lui un héritage politique clivant. Depuis, sa famille a été visée par plusieurs accusations de corruption, que les partisans de Lungu qualifient de vendetta politique orchestrée par le gouvernement actuel.
La fille de Lungu, Tasila, a été arrêtée en 2024 pour blanchiment d’argent et emprisonnée pour fraude aux côtés de sa mère et de sa sœur. Son frère, Dalitso, fait également face à des accusations similaires. Ces affaires judiciaires ont alimenté les tensions entre la famille Lungu et le gouvernement, rendant la gestion des funérailles encore plus complexe.
Les accusations de corruption contre la famille Lungu ont-elles influencé leur méfiance envers le gouvernement ? Cette question reste au cœur des débats en Zambie.
Les Répercussions du Deuil Écourté
La décision de mettre fin au deuil national a des implications à la fois symboliques et pratiques. Pendant cette période, les drapeaux étaient en berne, les stations de radio diffusaient une musique solennelle, et les événements de loisirs étaient suspendus. En mettant fin à ces mesures, Hichilema a signalé un retour à la normale, mais cette décision a été perçue par certains comme un manque de respect envers la mémoire de Lungu.
Pour d’autres, cette annonce reflète la volonté du gouvernement de ne pas prolonger une situation devenue politiquement embarrassante. En effet, la dispute autour des funérailles a mis en lumière les fractures au sein de la société zambienne, entre ceux qui soutiennent l’héritage de Lungu et ceux qui appuient la nouvelle administration.
Un Pays en Quête d’Unité
La Zambie, bien que riche en ressources comme le cuivre, reste un pays confronté à des défis économiques et sociaux. Avec une population relativement jeune et un paysage politique dynamique, les événements comme ceux entourant la mort de Lungu mettent en évidence la difficulté de maintenir l’unité nationale dans un climat de polarisation.
Les funérailles d’un ancien chef d’État sont généralement une occasion de rassembler une nation. Pourtant, dans ce cas, elles ont exacerbé les divisions. La décision de la famille Lungu de s’opposer aux arrangements officiels reflète une méfiance profonde, tandis que la réponse du gouvernement montre une volonté de reprendre le contrôle de la narrative.
Événement | Détails |
---|---|
Décès d’Edgar Lungu | 5 juin, en Afrique du Sud, à 68 ans. |
Deuil national | Initialement 7 jours, prolongé jusqu’au 23 juin, puis écourté. |
Conflit familial | Refus de remettre le corps pour protester contre la présence de Hichilema. |
Que Retenir de Cette Crise ?
La controverse entourant les funérailles d’Edgar Lungu dépasse le simple cadre d’un désaccord logistique. Elle met en lumière les défis auxquels la Zambie est confrontée pour réconcilier son passé politique avec ses aspirations futures. Voici les points clés à retenir :
- Une dispute familiale a empêché le rapatriement du corps de l’ex-président.
- Le gouvernement a mis fin au deuil national, suscitant des débats.
- Les accusations de corruption contre la famille Lungu alimentent les tensions.
- La Zambie reste divisée sur la manière d’honorer ses anciens dirigeants.
En fin de compte, cette affaire pose une question essentielle : comment une nation peut-elle honorer ses figures historiques tout en surmontant les divisions politiques ? La réponse, pour la Zambie, reste à écrire.
Alors que le pays reprend ses activités normales, les regards se tournent vers l’avenir. La mémoire d’Edgar Lungu, qu’elle soit célébrée ou controversée, continuera d’influencer le paysage politique zambien. Une chose est certaine : cette crise a rappelé à tous que même dans la mort, les divisions politiques peuvent persister.