C’est un véritable cri du cœur que pousse Winnie Byanyima, épouse de l’opposant historique ougandais Kizza Besigye. Elle dénonce avec véhémence ce qu’elle qualifie de « parodie de justice » orchestrée à l’encontre de son mari, kidnappé en novembre dernier lors d’un déplacement au Kenya selon ses dires, et désormais jugé pour trahison devant une cour martiale de la capitale ougandaise, Kampala.
Kizza Besigye, ancien compagnon d’armes et médecin personnel du président Yoweri Museveni, subit les foudres du pouvoir depuis qu’il a rejoint l’opposition il y a un quart de siècle. Aux côtés d’un co-accusé, Obeid Lutale, il risque aujourd’hui la peine capitale dans ce procès que beaucoup jugent politique et inéquitable.
Une justice aux ordres du pouvoir
Pour Winnie Byanyima, directrice du Programme commun des Nations unies sur le VIH/sida, les dés sont pipés d’avance. Sur les réseaux sociaux, elle affirme sans ambages :
Je n’attends pas de justice. Les accusations contre Kizza Besigye et Obeid Lutale sont politiques. Le président Museveni et son fils dirigent l’armée. La cour militaire relève d’eux. Le père et le fils sont les accusateurs et les juges dans le dossier contre mon mari.
Une proximité troublante entre le pouvoir exécutif et judiciaire qui jette le doute sur l’équité de la procédure. D’autant que le fils du président, Muhoozi Kainerugaba, chef des forces armées et dauphin présumé, a publiquement déclaré sur les réseaux sociaux que Besigye serait « pendu », fixant même la date de son exécution au 9 juin, jour de commémoration de la guerre du bush ougandaise.
Répression croissante de l’opposition
Ce procès s’inscrit dans un contexte de répression accrue de l’opposition en Ouganda, pays dirigé d’une main de fer par Yoweri Museveni depuis près de 40 ans. À l’approche de l’élection présidentielle de 2026, les arrestations et intimidations se multiplient, suscitant l’inquiétude des Nations unies et des organisations de défense des droits de l’Homme.
Dès la reprise du procès début janvier, l’un des avocats de Kizza Besigye, Eron Kiiza, a été envoyé en prison pour 9 mois, un coup de théâtre révélateur des pressions qui pèsent sur la défense. Face à ce qu’elle considère comme un « simulacre de justice », Winnie Byanyima ne compte pas baisser les bras :
J’assisterai à la pendaison que vous planifiez. Quand vous l’aurez faite, j’honorerai et j’enterrerai un véritable héros de l’Ouganda et de l’Afrique. Le combat pour nos droits, pour l’égalité et pour la justice continuera.
Un long combat pour la démocratie
Kizza Besigye incarne depuis de nombreuses années la principale figure de l’opposition au régime du président Museveni. Candidat malheureux à plusieurs reprises à l’élection présidentielle, il n’a eu de cesse de dénoncer les fraudes et les pressions subies par ses partisans.
Son emprisonnement et son procès devant la justice militaire marquent un nouveau degré dans la tentative du pouvoir de faire taire toute voix dissidente. Mais pour son épouse comme pour de nombreux Ougandais, cette épreuve ne fait que renforcer la détermination à se battre pour l’avènement d’une véritable démocratie dans le pays.
Malgré les menaces et les intimidations, le combat de Kizza Besigye et de ses soutiens pour la liberté et la justice se poursuit. Un combat périlleux dans un pays où l’opposition est muselée et où l’État de droit est régulièrement bafoué, mais un combat plus que jamais nécessaire pour l’avenir de l’Ouganda et de toute l’Afrique de l’Est.