Alors que les violences s’intensifient dans l’est de la République Démocratique du Congo, l’Ouganda a annoncé mercredi le déploiement de ses troupes dans la ville de Bunia, en collaboration avec les forces congolaises. Objectif affiché : sécuriser la zone et repousser les milices locales afin d’éviter de nouveaux bains de sang.
Située non loin de la frontière ougandaise, dans la province de l’Ituri, Bunia est régulièrement le théâtre d’affrontements entre groupes armés. Les Forces démocratiques alliées (ADF), à l’origine des rebelles ougandais majoritairement musulmans, ainsi que le M23, sont particulièrement actifs dans la région. Malgré la présence des forces armées congolaises (FARDC) et de l’armée ougandaise (UPDF), déployées dans le cadre d’un accord de coopération, les ADF continuent de semer la terreur, multipliant pillages et massacres de civils.
Une intervention cruciale mais qui soulève des questions
Face à la détérioration de la situation sécuritaire, l’intervention conjointe des troupes ougandaises et congolaises apparaît comme une nécessité pour tenter de stabiliser la zone. Henry Oryem, ministre ougandais des Affaires étrangères, a déclaré que les forces des deux pays avaient « pris le contrôle de la situation » afin « d’éviter de nouvelles tueries ». Kampala n’a toutefois pas précisé l’ampleur de son déploiement à Bunia, se contentant d’indiquer qu’il visait à « s’occuper des éléments armés » encore actifs.
Mais cette intervention soulève également des interrogations quant au rôle ambigu joué par l’Ouganda dans le conflit qui ravage l’est de la RDC. Le pays est en effet soupçonné par des experts de soutenir en sous-main le M23, lui permettant notamment d’utiliser son territoire comme voie d’approvisionnement. Des accusations fermement rejetées par Kampala.
Le spectre d’une nouvelle « guerre du Congo » ?
L’escalade des violences dans la région et l’implication croissante des pays voisins font craindre à certains analystes un scénario similaire à celui de 1998. À l’époque, le soutien apporté par l’Ouganda et le Rwanda à différents groupes rebelles avait déclenché ce que l’on a appelé la deuxième guerre du Congo. Un conflit dévastateur qui a duré jusqu’en 2003, impliquant de nombreux pays africains et causant des millions de morts.
Je ne pense pas qu’en ce moment cela ait quoi que ce soit à voir avec le conflit du M23. L’Ouganda est pour l’instant assez éloigné de l’endroit où se trouve le M23. Mais l’Ouganda s’inquiète d’un débordement dans son territoire et est prêt à aider.
Daniel van Dalen, analyste chez Signal Risk
Pour l’heure, le déploiement ougandais à Bunia semble davantage motivé par la volonté de sécuriser sa frontière et d’éviter une propagation du conflit sur son sol. Mais la situation reste volatile et la communauté internationale redoute qu’une escalade incontrôlée ne débouche sur une crise régionale majeure, aux conséquences potentiellement dévastatrices pour les populations civiles, premières victimes des violences.
La communauté internationale appelée à agir
Face à ces inquiétudes, les appels à une mobilisation de la communauté internationale se multiplient. L’ONU, l’Union Africaine et les pays de la région sont pressés de s’impliquer davantage pour tenter de désamorcer la crise et d’encourager le dialogue entre toutes les parties.
La situation à Bunia et dans l’ensemble de l’est de la RDC souligne une fois de plus l’urgence d’une action concertée pour briser le cycle infernal des violences et offrir une perspective de paix durable aux populations. Un défi immense qui nécessitera une volonté politique forte et un engagement sur le long terme de tous les acteurs concernés.