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Terres industrielles françaises : le RN gagne toujours plus de terrain

Dans les anciens bastions industriels français, le vote RN progresse inexorablement. Entre promesses non tenues et désillusions, les ouvriers se tournent vers le parti à la flamme qui promet de redresser l'économie. Mais les solutions proposées sont-elles à la hauteur des enjeux ?

Dimanche 1er juillet 2024. Les résultats tombent, implacables. Dans les anciens bastions industriels du nord et de l’est de la France, le Rassemblement national rafle la mise. Avec des scores dépassant fréquemment les 40%, le parti de Marine Le Pen confirme son ancrage dans ces territoires sinistrés par des décennies de désindustrialisation. De Roubaix à Forbach en passant par Hénin-Beaumont, les électeurs ouvriers ont massivement choisi le bulletin à la flamme. Comment en est-on arrivé là ?

L’inexorable déclin de l’industrie française

Pour comprendre ce phénomène, il faut revenir 40 ans en arrière. En 1980, le secteur industriel employait plus de 5 millions de personnes en France, représentant 24% des emplois. Mais au fil des années, les plans sociaux et délocalisations se sont succédé. Les territoires les plus touchés sont souvent ceux qui avaient bâti leur prospérité sur des activités traditionnelles comme la sidérurgie, le textile ou les mines. En 2023, les effectifs industriels ont fondu de moitié, ne pesant plus que 10% de l’emploi national.

La désindustrialisation, c’est un coup de massue. Les gens perdent leur travail, les jeunes n’ont plus d’avenir. La colère et le désespoir montent.

— Yves, ancien métallurgiste, 62 ans

Des promesses de réindustrialisation non tenues

Face à ce déclin, tous les gouvernements successifs ont promis le grand soir de la réindustrialisation. Des pôles de compétitivité aux filières d’avenir, les annonces se sont multipliées. Mais dans les faits, les résultats se font attendre. Les “usines du futur” ont du mal à sortir de terre et les créations d’emplois industriels sont encore loin de compenser les pertes.

Entre espoirs déçus et défiance grandissante

Pour les salariés touchés de plein fouet, le sentiment d’abandon domine. Beaucoup ont le sentiment d’avoir été sacrifiés sur l’autel de la mondialisation sans qu’on ne leur propose d’alternatives. La méfiance vis-à-vis des “élites parisiennes”, accusées de ne rien comprendre aux réalités du terrain, s’installe durablement.

Les politiques, ils viennent faire leur cinéma en période électorale et puis s’en vont. Le reste du temps, on n’existe pas pour eux.

— Marie, 45 ans, ex-ouvrière du textile

Le RN, un vote protestataire qui s’enracine

Dans ce contexte, le Rassemblement national apparaît comme le réceptacle idéal des colères et des frustrations. Son discours anti-système, valorisant “le peuple” face aux “élites mondialisées”, résonne particulièrement. Scrutin après scrutin, le parti de Marine Le Pen engrange dans ces fiefs ouvriers délaissés. Une dynamique que même l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017 n’aura pas enrayée, bien au contraire.

  • En 2022, Marine Le Pen obtient 68% chez les ouvriers au second tour de la présidentielle
  • Aux législatives 2024, le RN rafle la quasi-totalité des circonscriptions ouvrières

Mais au-delà d’un simple vote contestataire, les idées du Rassemblement national progressent en profondeur. Immigration et insécurité arrivent en tête des préoccupations. Son programme économique mélangeant souverainisme et protectionnisme séduit une partie grandissante de l’électorat populaire.

Un défi majeur pour le gouvernement

Face à cette vague bleue marine, le pouvoir en place semble démuni. Son bilan en matière de réindustrialisation et de lutte contre les fractures territoriales est pour le moins mitigé. Les milliards d’euros débloqués dans le cadre du plan de relance post-Covid ou de France 2030 tardent à produire des effets concrets sur le terrain. Pire, la flambée des prix de l’énergie ou les pénuries de composants fragilisent les industries survivantes.

Pour endiguer la montée du RN, l’exécutif mise sur une accélération des réformes, notamment en matière de formation et de réindustrialisation verte. Mais il devra aussi répondre au sentiment d’insécurité culturelle exprimé par les classes populaires. Un vrai défi alors que l’extrême droite ne cesse de dicter les termes du débat. Les 4 ans du second quinquennat Macron s’annoncent décisifs pour l’avenir de ces territoires et, au-delà, celui de notre démocratie.

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