Et si la paix à Gaza ne tenait qu’à un fil ? Ce lundi, une délégation israélienne pose ses valises à Doha pour des discussions indirectes avec le Hamas, dans un climat où chaque mot pèse lourd. Après des mois de guerre et une trêve fragile instaurée en janvier, les espoirs d’un cessez-le-feu durable vacillent face aux désaccords profonds entre les deux camps.
Un Contexte Explosif à Doha
Les pourparlers qui s’ouvrent dans la capitale qatarie ne sont pas une simple formalité. À la veille de cette rencontre, Israël a décidé de frapper fort en annonçant la coupure de la seule ligne électrique alimentant Gaza, plongeant le territoire dans une pénurie d’eau potable. Une source proche des négociations qualifie cette décision de « pression calculée » pour pousser le Hamas à céder. Mais le mouvement palestinien n’a pas tardé à répliquer, dénonçant un acte « indigne ».
Ces tensions surviennent alors que les médiateurs, soutenus par les États-Unis, le Qatar et l’Égypte, tentent de maintenir un dialogue. La délégation israélienne, arrivée sur invitation, doit faire face à des négociateurs palestiniens déjà sur place depuis dimanche, après des réunions préparatoires au Caire. L’enjeu ? Prolonger une trêve qui a permis, depuis janvier, de calmer les armes après 15 mois de conflit dévastateur.
Un Accord Fragile et des Avancées Limitées
Remontons un instant le fil des événements. Le 19 janvier, un accord laborieux avait mis fin aux hostilités, fruit d’une médiation acharnée. Lors de sa première phase, achevée début mars, des échanges d’otages et de prisonniers ont eu lieu : 33 captifs israéliens libérés, dont certains décédés, contre près de 1 800 Palestiniens sortis des geôles israéliennes. Un pas en avant, certes, mais loin de régler les différends.
Nous demandons aux médiateurs de garantir que l’accord soit respecté et que l’aide puisse entrer à Gaza.
– Porte-parole du Hamas
Pour le Hamas, la deuxième phase doit marquer un tournant : un cessez-le-feu permanent, un retrait total des forces israéliennes et la libération des otages restants – une cinquantaine, selon les estimations. Mais Israël voit les choses autrement, exigeant une démilitarisation complète de Gaza et le départ du Hamas avant toute avancée significative.
Les Points de Blocage : Des Visions Irréconciliables ?
Le fossé entre les deux parties semble infranchissable. D’un côté, le Hamas insiste sur des garanties humanitaires immédiates, notamment l’accès à l’aide pour les 2,4 millions d’habitants de Gaza, bloquée par Israël depuis début mars. De l’autre, le gouvernement israélien veut prolonger la trêve actuelle jusqu’à mi-avril, tout en posant des conditions strictes pour la suite.
- Cessez-le-feu permanent : une priorité pour le Hamas, une ligne rouge pour Israël.
- Aide humanitaire : vitale pour Gaza, mais utilisée comme levier par Israël.
- Otages : leur libération reste au cœur des tractations.
À cela s’ajoute une frappe israélienne, menée dimanche dans le nord de Gaza, contre des combattants accusés de poser un explosif. Un acte qui, selon une source militaire, visait à « maintenir la pression ». Mais pour beaucoup, il illustre la fragilité de cette paix temporaire.
Gaza : Une Crise Humanitaire au Bord du Gouffre
Derrière les négociations, la situation à Gaza empire chaque jour. La coupure d’électricité menace la principale usine de dessalement, privant des milliers de familles d’eau potable. Depuis le début du conflit, déclenché par une attaque massive du Hamas en octobre 2023, le bilan est effroyable : plus de 48 000 morts, majoritairement civils, selon des chiffres officiels palestiniens jugés crédibles par des observateurs internationaux.
Indicateur | Gaza | Israël |
Morts | 48 458 | 1 218 |
Otages libérés | 33 | 1 800 détenus |
Côté israélien, l’attaque initiale avait fait plus de 1 200 victimes, majoritairement civiles. Un drame qui a poussé le pays à promettre l’éradication du Hamas, au prix d’une offensive sans précédent.
Les États-Unis dans l’Équation : Une Proposition Controversée
Au milieu de ce chaos, les États-Unis jouent un rôle ambigu. L’envoyé spécial américain pour les otages s’est récemment entretenu directement avec le Hamas – une première – et parle d’un accord possible « dans les semaines à venir ». Mais une idée lancée début février par le président américain a jeté de l’huile sur le feu : transformer Gaza en une « Riviera du Moyen-Orient » sous contrôle américain, avec expulsion de ses habitants.
Un ministre israélien de l’extrême droite a embrayé, affirmant que ce projet « prenait forme » avec le soutien de Washington. Une déclaration qui a suscité un tollé, mais qui révèle les ambitions de certains pour l’avenir du territoire.
Et Après ? Les Scénarios Possibles
Alors que les discussions à Doha débutent, trois issues se dessinent :
- Un compromis fragile, prolongeant la trêve sans résoudre les désaccords de fond.
- Une rupture totale, avec une reprise des combats et une aggravation de la crise humanitaire.
- Une avancée inattendue, portée par la pression internationale et des concessions mutuelles.
Pour l’heure, les Gazaouis retiennent leur souffle, pris en étau entre espoirs déçus et menaces grandissantes. Les prochains jours à Doha pourraient bien redéfinir l’avenir de cette enclave martyrisée.
Une chose est sûre : chaque décision prise à Doha résonnera bien au-delà de Gaza.