La Namibie, d’ordinaire un modèle de stabilité et de démocratie en Afrique, traverse une période de tensions sans précédent après des élections législatives et présidentielles chaotiques. Les scrutins de mercredi, marqués par d’interminables files d’attente, des pannes techniques à répétition et une prolongation partielle jusqu’à samedi soir, sont unanimement dénoncés comme un « simulacre » par les partis d’opposition. Ces derniers se concertent sur la voie à suivre et menacent de ne pas reconnaître les résultats.
Un vote chaotique qui sème le doute
Mercredi, premier jour du scrutin, de nombreux Namibiens ont dû patienter jusqu’à 12 heures devant les bureaux de vote, quand ils n’ont pas fini par renoncer. En cause, des tablettes électroniques servant à vérifier les identités qui surchauffaient, ainsi que des pénuries de bulletins, ralentissant considérablement le processus. La commission électorale a alors décidé de prolonger le vote, générant une grande confusion.
La prolongation n’a pas été communiquée en temps utile aux électeurs et aux agents des bureaux. Certains bureaux ont fermé et commencé le dépouillement avant.
Union africaine
L’opposition crie au scandale
Devant ces dysfonctionnements majeurs, l’opposition namibienne a saisi sa chance pour dénoncer en bloc le processus électoral. Rassemblés devant l’hôtel où se tenait le point presse des missions d’observation électorale, des manifestants arboraient des pancartes « les élections en Namibie ne sont ni libres ni équitables » ou encore « Virez la commission électorale ». Le porte-parole du Mouvement populaire des sans-terre (LPM) a déclaré : « Nous condamnons le processus électoral, nous le rejetons ».
Le parti au pouvoir vacille après 34 ans de règne
Au pouvoir depuis l’indépendance en 1990, la SWAPO voit son hégémonie menacée par la montée des mécontentements. Chômage massif des jeunes, inégalités criantes, soif de renouvellement des générations… Sa candidate Netumbo Nandi-Ndaitwa, qui pourrait devenir la première femme présidente de ce pays riche en uranium, risque d’être contrainte à un second tour inédit. L’opposition, sentant le vent tourner, semble déterminée à jouer son va-tout.
Ne rouvrir qu’un seul bureau à Khomas (la province de la capitale, NDLR), est absurde. Il n’y a que 1,5 millions d’électeurs inscrits et on se retrouve avec ce chaos ? C’était pour décourager les gens.
Ensley Engermund, électeur namibien
Une démocratie modèle mise à mal
Avec ces élections contestées, c’est l’image d’une démocratie namibienne exemplaire qui se fissure. Les missions d’observation électorale de l’Union africaine et de la Communauté de développement d’Afrique australe, présentes sur place, ont souligné les nombreux problèmes rencontrés sans pour autant remettre en cause la sincérité du scrutin à ce stade. Mais les partis d’opposition, réunis ce matin, pourraient franchir ce pas et plonger le pays dans une crise post-électorale inédite. Le feuilleton namibien ne fait sans doute que commencer.