Une mystérieuse association fait parler d’elle en s’attaquant à l’un des plus grands symboles de l’art mondial : La Joconde. Connue sous le nom d’International Restitutions, cette organisation peu médiatisée a déposé une requête auprès du Conseil d’État dans le but de faire “restituer” le célèbre tableau de Léonard de Vinci à l’Italie et à ses éventuels héritiers. Une démarche audacieuse qui soulève de nombreuses questions sur la légitimité de la possession de certaines œuvres d’art par les musées.
Une association énigmatique au service du patrimoine spolié
International Restitutions reste pour le moins discrète sur son fonctionnement et ses membres. Pas de site web, de réseaux sociaux ou même d’adresse connue. Son seul but déclaré est de :
Favoriser et obtenir la restitution ou le retour à leurs légitimes propriétaires ou ayants droit, des biens culturels spoliés, acquis ou appropriés frauduleusement, irrégulièrement ou illégitimement, de manière directe ou indirecte, tant par des personnes privées que par des États ou personnes morales de droit public, notamment durant les différentes périodes de conflits armés ou de colonisation, en quelque lieu qu’ils se trouvent, y compris dans les musées nationaux.
– Objet statutaire d’International Restitutions
Un vaste projet qui témoigne d’une volonté de réparer les spoliations subies par certains pays et communautés à travers l’Histoire. Avant de s’attaquer au cas emblématique de La Joconde, l’association avait déjà intenté deux actions en justice :
- En octobre 2022, pour retirer de l’inventaire du Louvre des objets issus de fouilles menées par l’Armée d’Orient entre 1915 et 1923.
- En novembre 2022, pour contester la présence au Château de Fontainebleau d’œuvres provenant du pillage du Palais d’Été de Pékin en 1860.
Si la première requête s’est soldée par un désistement, la seconde a été rejetée, le Conseil d’État estimant qu’International Restitutions n’était pas légitime pour agir au nom d’hypothétiques héritiers. Un précédent qui ne semble pas de bon augure pour l’affaire de La Joconde.
La Joconde, un cadeau de Léonard de Vinci à François 1er
Pour bien comprendre les enjeux de cette procédure inédite, il faut revenir sur l’histoire mouvementée de La Joconde, ou Mona Lisa de son vrai nom. Ce chef-d’œuvre de la peinture italienne a été réalisé par Léonard de Vinci entre 1503 et 1506, alors qu’il était au service des Médicis à Florence. Mais quelques années plus tard, tombé en disgrâce, le maître de la Renaissance trouve refuge en France auprès du roi François 1er.
C’est ainsi qu’en 1516, Léonard de Vinci arrive au château du Clos Lucé à Amboise, avec dans ses bagages quelques tableaux dont La Joconde. En échange d’une généreuse pension, il offre ces œuvres au souverain français. Un “cadeau” qui scelle le destin français de Mona Lisa, aujourd’hui exposée derrière une vitre blindée au Musée du Louvre à Paris.
Une requête juridique complexe et incertaine
C’est donc cette “appropriation” que conteste International Restitutions, au nom des descendants des héritiers de Léonard de Vinci. L’association juge que François 1er a acquis le tableau de manière illégitime et demande son rapatriement en Italie. Une démarche juridiquement complexe, d’autant que la France et l’Italie s’opposent régulièrement sur le sujet sensible du patrimoine culturel.
Plusieurs points risquent de fragiliser la requête :
- 😕 La difficulté à prouver l’existence et la légitimité d’héritiers de Léonard de Vinci, 500 ans après sa mort.
- ⚖️ Le fait que le don de La Joconde semble avoir été consenti librement par l’artiste en contrepartie d’avantages.
- 🏛️ L’ancienneté de la présence de l’œuvre en France, exposée au Louvre depuis 1797.
Autant d’éléments qui rendent le rapatriement de La Joconde improbable, malgré la détermination affichée d’International Restitutions. Mais au-delà du cas particulier de Mona Lisa, cette affaire a le mérite de poser publiquement la question de la restitution des œuvres et objets d’art acquis dans des conditions troubles au fil de l’Histoire. Un sujet brûlant qui continuera sans doute d’alimenter les conflits juridiques et diplomatiques dans les années à venir.