Imaginez un instant : après plus de quatre-vingts années d’existence, l’Organisation des Nations Unies pourrait enfin être dirigée par une femme. Cette perspective, longtemps considérée comme un rêve lointain par beaucoup, semble aujourd’hui plus tangible que jamais. Au cœur de cette possible révolution, une personnalité bien connue sur la scène internationale : Michelle Bachelet.
Dans une récente conversation accordée à la presse, l’ancienne présidente chilienne a exprimé avec conviction une idée simple mais puissante : le moment est venu. Selon elle, la planète entière serait prête à accueillir un leadership féminin au sommet de l’organisation multilatérale la plus importante au monde. Une déclaration qui résonne particulièrement dans un contexte où les appels à la diversité et à l’égalité se font de plus en plus pressants.
Une candidature qui porte l’espoir d’un tournant historique
Depuis sa création en 1945, l’ONU n’a jamais été dirigée par une femme. Sur neuf secrétaires généraux, aucun n’a appartenu au genre féminin. Cette absence est d’autant plus frappante que l’organisation se présente comme le défenseur universel des droits humains, de l’égalité et de la justice sociale. Aujourd’hui, plusieurs voix s’élèvent pour dire que le temps du changement est arrivé.
Michelle Bachelet incarne précisément ce renouveau espéré. À 74 ans, elle cumule un parcours politique et diplomatique exceptionnel qui la place parmi les favorites pour succéder à Antonio Guterres, dont le second mandat prendra fin fin 2026.
Un parcours politique hors du commun
Née dans une famille marquée par l’engagement politique, Michelle Bachelet a elle-même tracé une voie singulière. Pédiatre de formation, elle est devenue la première femme élue présidente du Chili en 2006. Un exploit qu’elle a renouvelé en 2014, prouvant sa capacité à s’imposer dans un univers traditionnellement masculin.
Ses deux mandats à la tête du pays sud-américain ont été marqués par des réformes sociales ambitieuses, une attention particulière portée aux questions de genre et une politique étrangère active. Après avoir quitté le palais présidentiel, elle n’a pas pris sa retraite : elle a accepté de diriger la toute nouvelle entité ONU Femmes, créée pour promouvoir l’égalité entre les sexes à l’échelle mondiale.
Entre 2018 et 2022, elle occupe ensuite le poste stratégique de Haute-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, une fonction où elle a dû naviguer dans des eaux particulièrement tumultueuses, entre crises géopolitiques majeures et critiques récurrentes sur le rôle même de l’organisation.
Pourquoi une femme à la tête de l’ONU changerait-elle la donne ?
Pour Michelle Bachelet, la question ne se limite pas à une question de symbole ou de représentation. Elle estime qu’un leadership féminin apporterait une contribution différente, portée par un style de gouvernance qui pourrait se révéler plus inclusif, plus consensuel et plus attentif aux dimensions humaines des crises internationales.
Elle parle d’une « opportunité historique » qui permettrait non seulement de briser un plafond de verre vieux de plusieurs décennies, mais aussi de renouveler profondément le fonctionnement même de l’ONU. Selon elle, l’organisation gagnerait à se moderniser, à devenir plus efficiente, plus transparente et plus réactive face aux immenses défis du XXIe siècle.
« Le monde est prêt » pour une femme à la tête de l’ONU.
Michelle Bachelet
Cette phrase simple résume à elle seule l’ambition et l’optimisme de la candidate. Elle ne se contente pas d’affirmer une possibilité : elle la présente comme une nécessité.
Le poids de la rotation régionale
Il existe à l’ONU une pratique, non inscrite dans les textes mais largement observée, qui veut que le poste de secrétaire général tourne entre les différentes régions du monde. Après l’Europe (avec Guterres), l’Asie (Ban Ki-moon), l’Afrique (Kofi Annan et Boutros Boutros-Ghali), le Moyen-Orient (Kofi Annan étant égyptien) et l’Europe de l’Est (Kurt Waldheim), beaucoup estiment que le tour de l’Amérique latine est arrivé.
Le seul précédent latino-américain remonte à Javier Pérez de Cuéllar, qui a dirigé l’organisation entre 1982 et 1991. Près de quarante ans plus tard, la région pourrait donc faire son grand retour… avec, cette fois, la perspective supplémentaire d’une première femme secrétaire générale.
Les autres candidatures en lice
La compétition s’annonce particulièrement ouverte et relevée. Plusieurs personnalités de très haut niveau ont déjà fait connaître leur intérêt ou sont activement évoquées pour le poste.
Parmi elles figurent notamment :
- Rebeca Grynspan, Costaricienne, actuelle secrétaire générale de la Cnuced (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement)
- Alicia Bárcena, ancienne ministre mexicaine de l’Environnement et ancienne secrétaire exécutive de la CEPALC
- Mia Mottley, Première ministre de la Barbade, figure montante de la diplomatie caribéenne
- Rafael Grossi, Argentin, directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique
Chacun de ces candidats apporte un profil différent, des compétences variées et une vision particulière pour l’avenir de l’ONU. Rafael Grossi, par exemple, plaide pour une organisation « plus active » et appelle de ses vœux une réforme qui pourrait être acceptée par l’ensemble des États membres.
Le soutien politique au Chili : un enjeu clé
Pour qu’une candidature devienne réellement officielle, elle doit généralement bénéficier du soutien actif du pays d’origine. Au Chili, la situation politique est particulièrement complexe.
En septembre, le président sortant de gauche Gabriel Boric avait publiquement apporté son appui à Michelle Bachelet. Mais quelques mois plus tard, le paysage a changé : l’élection de José Antonio Kast, avocat d’extrême droite, à la présidence du pays a créé une nouvelle donne.
La candidate a récemment rencontré le futur chef de l’État chilien. Ce dernier a indiqué qu’il prendrait position une fois officiellement entré en fonctions. Cette rencontre illustre bien les enjeux politiques internes qui peuvent influencer une course en apparence purement internationale.
Une voix pour la médiation régionale
Interrogée sur les tensions persistantes entre le Venezuela et les États-Unis, Michelle Bachelet a plaidé pour une solution régionale. Elle voit dans les présidents du Brésil et du Mexique des médiateurs potentiellement crédibles et suffisamment influents pour faire avancer le dialogue.
« Qu’il puisse y avoir des médiateurs aussi puissants dans la région […] peut être une solution. Cela pourrait être une bonne réponse. »
Michelle Bachelet
Cette proposition témoigne d’une vision pragmatique et ancrée dans la réalité latino-américaine, un atout supplémentaire pour une candidate qui souhaite incarner un multilatéralisme renouvelé et plus proche des réalités du terrain.
Vers une ONU plus moderne et plus efficace ?
Au-delà de la question du genre, Michelle Bachelet place au cœur de sa candidature l’idée d’une réforme profonde de l’organisation. Elle souhaite une ONU plus rapide dans ses prises de décision, plus transparente dans son fonctionnement interne et plus efficace dans la mise en œuvre de ses résolutions.
Ces ambitions rejoignent celles de nombreux observateurs et diplomates qui, depuis des années, pointent les lenteurs bureaucratiques, les blocages au Conseil de sécurité et la difficulté croissante de l’organisation à faire respecter ses décisions dans un monde devenu multipolaire.
La candidate chilienne ne se contente pas de diagnostiquer les faiblesses : elle propose d’y apporter des solutions concrètes, nourries par son expérience à la fois nationale et internationale.
Un symbole fort pour les générations futures
Au-delà des considérations politiques et diplomatiques, l’éventuelle élection de Michelle Bachelet enverrait un message extrêmement puissant à des millions de jeunes filles à travers le monde.
Devenir la première femme secrétaire générale de l’ONU ne serait pas seulement une victoire personnelle : ce serait la démonstration concrète que les plus hautes sphères du pouvoir mondial peuvent – et doivent – s’ouvrir aux femmes. Un symbole fort dans une époque où l’égalité des genres reste un combat quotidien dans de très nombreux pays.
Le parcours de Michelle Bachelet, de la prison politique sous la dictature de Pinochet à la présidence du pays puis aux plus hautes fonctions onusiennes, incarne à lui seul cette idée de résilience et de dépassement des obstacles. Son éventuelle élection viendrait couronner un itinéraire déjà exceptionnel.
Les prochains mois seront décisifs
Si le mandat actuel se termine fin 2026, les tractations et les positionnements ont déjà commencé. Les capitales s’agitent, les soutiens se cherchent, les stratégies se dessinent en coulisses.
Dans ce jeu d’influence complexe, la candidature de Michelle Bachelet occupe une place à part. Elle allie expérience, légitimité régionale, profil féminin et volonté affirmée de réforme. Des atouts qui pourraient faire la différence dans les mois à venir.
Le monde observe. Et pour la première fois, il semble réellement prêt à envisager qu’une femme prenne les rênes de l’Organisation des Nations Unies. Une page d’histoire est peut-être sur le point de s’écrire.
À suivre donc, avec la plus grande attention, dans les prochains mois.
Une réflexion pour conclure : Au-delà des personnes, c’est peut-être tout un système qui est en train de s’interroger sur sa capacité à se renouveler. L’ONU a-t-elle encore les moyens de ses ambitions ? Peut-elle redevenir ce lieu de convergence des espoirs humains ? La réponse, en partie, passera peut-être par ce choix historique qui se profile à l’horizon.
Et vous, pensez-vous que le temps d’une femme à la tête de l’ONU est vraiment venu ?









