Dans les Deux-Sèvres, la tension est à son comble autour des controversées “méga-bassines”. Ces immenses réserves d’eau, destinées à l’irrigation agricole, cristallisent la colère des opposants qui y voient un accaparement de la ressource hydrique. Depuis mardi, ils sont plus de 4500 à avoir installé le “Village de l’eau”, un campement militant à Melle pour manifester leur opposition.
Des autorités sur le qui-vive
Face à cette mobilisation d’ampleur, les autorités craignent des débordements. Selon le général de gendarmerie Samuel Dubuis, environ 10% des manifestants seraient des “black blocs”, ces militants radicaux souvent à l’origine de violences lors des rassemblements. Plus de 3000 gendarmes sont déployés pour encadrer les deux manifestations prévues mais interdites, vendredi à Saint-Sauvant et samedi à La Rochelle.
De leur côté, les organisateurs assurent que leur mouvement est pacifique et dénoncent “l’attitude des autorités qui attisent les peurs et les tensions”. Ils appellent à des actions de “désobéissance de masse” ciblant les bassines en construction ou en projet.
Un conflit qui s’enracine
Cette nouvelle mobilisation fait écho aux violents affrontements survenus en mars dernier à Sainte-Soline, lors d’une précédente manifestation anti-bassines. Des heurts avaient alors opposé militants et forces de l’ordre, faisant plusieurs blessés graves. Depuis, le conflit n’a cessé de s’envenimer entre partisans et opposants à ces retenues d’eau.
Les bassines sont une condition de survie des exploitations face au changement climatique.
– Un agriculteur favorable au projet
Pour les agriculteurs pro-bassines, regroupés au sein de la Coordination rurale, ces réserves représentent une assurance face aux sécheresses à répétition. Ils y voient un moyen de sécuriser l’irrigation estivale de leurs cultures. À l’inverse, les écologistes dénoncent un système favorisant l’agriculture intensive au détriment des nappes phréatiques et des milieux naturels.
Une lutte qui divise le monde agricole
Au-delà de l’opposition entre pro et anti-bassines, c’est un véritable conflit d’usage et de vision de l’agriculture qui se joue. Une partie de la profession remet en cause ce modèle basé sur l’irrigation à outrance. Ils plaident pour une transition vers des pratiques plus sobres et résilientes comme l’agroécologie.
Les bassines ne sont pas une solution durable. Elles ne font qu’entretenir un système à bout de souffle.
– Un agriculteur opposé aux bassines
Cette lutte anti-bassines est aussi le reflet d’un malaise plus profond du monde rural. Nombreux sont ceux qui se sentent dépossédés des choix structurants pour le territoire. Beaucoup critiquent un modèle agricole déconnecté des réalités locales et des attentes sociétales en termes de préservation des ressources.
Vers une guerre de l’eau ?
Avec le réchauffement climatique qui s’accélère, la question de l’eau devient brûlante. Partout en France, les conflits se multiplient autour de cette ressource qui se raréfie. L’affaire des méga-bassines illustre la difficulté à concilier les différents usages dans un contexte de stress hydrique croissant.
Face à ces tensions, il y a urgence à repenser collectivement notre rapport à l’eau. Cela passe par une remise à plat des pratiques agricoles mais aussi par une gestion plus écologique et démocratique de cette ressource vitale. Faute de quoi, les “guerres de l’eau” risquent de se multiplier.