Cinq semaines après le passage dévastateur du cyclone Chido sur Mayotte, l’archipel français de l’océan Indien se relève doucement. Un premier pas crucial vient d’être franchi avec l’adoption à la quasi-unanimité par les députés d’un projet de loi d’urgence pour la reconstruction. Mais ce texte, jugé insuffisant par de nombreux élus, n’est qu’un début face à l’ampleur de la tâche.
Un « texte technique » pour amorcer la reconstruction
Le projet de loi d’urgence se veut avant tout un outil pour faciliter la reconstruction de Mayotte. Il contient principalement des assouplissements aux règles d’urbanisme ainsi que quelques mesures sociales comme des facilités fiscales ou des allègements de cotisations. Un texte technique donc, mais nécessaire pour enclencher le processus de réhabilitation de l’archipel.
Il n’est qu’un début, un texte technique qui n’est qu’une amorce pour la reconstruction.
– Estelle Youssouffa, députée centriste de Mayotte et rapporteure du projet de loi
Malgré son adoption massive (446 voix pour, 2 contre), le projet de loi fait l’objet de nombreuses critiques. Les députés de gauche le jugent insuffisant face aux immenses défis auxquels Mayotte est confrontée, bien au-delà des dégâts causés par le cyclone.
Pauvreté, habitat illégal, immigration : les maux chroniques de Mayotte
Car si le cyclone Chido a ravagé Mayotte, il a surtout mis en lumière et exacerbé des problèmes préexistants. Ce département, le plus pauvre de France, souffre depuis des années de difficultés majeures :
- 77% de la population vit sous le seuil de pauvreté
- L’habitat illégal est très répandu
- L’immigration clandestine « ronge » le territoire
Autant de fléaux qui fragilisent Mayotte et compliquent considérablement sa reconstruction. Pour le ministre des Outre-mer Manuel Valls, la question migratoire sera d’ailleurs « un volet primordial » du prochain texte de loi prévu d’ici mars, qui devra être beaucoup plus ambitieux pour « refonder Mayotte ».
Un premier texte qui passe à côté des vrais enjeux ?
C’est justement le principal reproche fait au projet de loi d’urgence par les deux députées mahoraises Estelle Youssouffa et Anchya Bamana. Selon elles, ce texte élaboré « sans consultation » des Mahorais passe complètement à côté du sujet principal : la « submersion migratoire » dont souffre l’archipel.
Elles pointent du doigt une loi déconnectée des réalités et des besoins du territoire. Un constat partagé par les députés écologistes qui dénoncent l’ajout de « scories inspirées par les obsessions xénophobes de l’extrême droite » et ont préféré s’abstenir lors du vote.
Vers une refondation en profondeur de Mayotte
Le gouvernement en a bien conscience : le projet de loi d’urgence n’est qu’une « première réponse » face à l’immensité de la tâche. D’ici mars, un nouveau texte beaucoup plus ambitieux et global sera présenté pour « refonder » en profondeur Mayotte.
L’objectif : s’attaquer enfin aux maux chroniques qui minent le développement de l’archipel, de la pauvreté à l’immigration clandestine en passant par les problèmes de sécurité et d’éducation. Un vaste chantier qui nécessitera des moyens considérables et une vraie volonté politique sur le long terme.
Le chemin sera long et semé d’embûches pour Mayotte. Mais ce projet de loi d’urgence, malgré ses limites, marque un premier pas important. Il pose les bases de la reconstruction et ouvre la voie à une refondation en profondeur de ce département français meurtri, pour lui offrir enfin des perspectives d’avenir.