Une nouvelle affaire mettant en cause la liberté de la presse au Pakistan vient d’éclater. Selon des sources proches du dossier, un journaliste local a été arrêté cette semaine alors qu’il enquêtait sur de possibles morts de manifestants lors de la répression des partisans de l’ancien Premier ministre Imran Khan. Heureusement, il a pu être remis en liberté samedi sous caution.
Mardi dernier, plus de 10 000 sympathisants du Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI), le parti de l’ex-star du cricket aujourd’hui emprisonnée, avaient bravé l’interdiction de manifester en défilant dans les rues d’Islamabad. C’est dans ce contexte tendu que le présentateur de Neo News et un confrère se sont rendus mercredi dans un hôpital de la capitale ayant accueilli des manifestants blessés pour mener leur enquête journalistique. Mais leur quête de vérité a tourné court.
Une arrestation aux motifs douteux
Interpellé en fin de journée, le journaliste a dû comparaître dès le lendemain devant un tribunal anti-terroriste d’Islamabad. Les charges retenues contre lui ont de quoi surprendre : possession de drogue et tentative de meurtre sur un policier sous l’emprise de l’alcool. Des accusations graves dans un pays où la loi interdit la consommation de stupéfiants comme d’alcool.
Mais pour beaucoup, cette arrestation est avant tout une manœuvre du gouvernement visant à entraver le travail des journalistes et à étouffer toute velléité d’investigation sur la répression brutale des manifestations. Plusieurs organisations de défense des médias ont d’ailleurs vivement dénoncé cet évènement, y voyant une atteinte à la liberté de la presse.
La vie des journalistes menacée
Cette affaire intervient dans un climat déjà explosif au Pakistan. Selon le gouvernement, au moins cinq membres des forces de sécurité ont perdu la vie lors des heurts cette semaine. De son côté, le PTI affirme qu’au moins dix manifestants ont été tués par les tirs des policiers, ce que les autorités démentent catégoriquement. « Il n’y a pas eu une goutte de sang et ils appellent ça un massacre » a même déclaré samedi le ministre de l’Information à la presse.
Face à ces déclarations contradictoires, le travail des journalistes apparaît plus que jamais essentiel pour faire la lumière sur les évènements. Mais cela se fait au péril de leur liberté, voire de leur vie. Car ce n’est malheureusement pas la première fois qu’un reporter est inquiété pour avoir voulu révéler la vérité. En 2020 déjà, pendant le mandat d’Imran Khan, le même journaliste avait été brièvement arrêté par des hommes en uniforme.
La liberté de la presse en danger
Au Pakistan, les défenseurs des droits humains dénoncent régulièrement l’utilisation abusive des lois anti-terroristes pour faire taire toute voix dissidente, y compris celles des journalistes. Comme l’a souligné l’avocate du reporter après sa libération, la colère du pouvoir en place contre ses reportages est manifeste.
Nous savons qu’il y a beaucoup de colère de la part du pouvoir en place pour ses reportages.
Me Imaan Mazari, avocate du journaliste arrêté
Ce nouvel épisode montre à quel point il est risqué et difficile pour les journalistes pakistanais d’exercer leur mission d’information dans un contexte aussi tendu et répressif. Le gouvernement semble déterminé à contrôler le récit autour des manifestations et à empêcher toute révélation gênante, quitte à s’en prendre directement aux reporters.
Pourtant, le droit des citoyens à une information libre et indépendante est un pilier essentiel de toute démocratie. En tentant de museler la presse, c’est ce droit fondamental que le pouvoir pakistanais piétine. Cette dérive autoritaire est extrêmement préoccupante et doit être dénoncée avec force par la communauté internationale.
Il est urgent que les autorités pakistanaises cessent de s’attaquer aux journalistes et respectent pleinement la liberté de la presse. Sinon, c’est la vérité sur les violences commises contre les manifestants qui risque d’être enterrée avec les reporters courageux qui tentent de la mettre au jour, dans l’indifférence générale.