À quelques semaines des élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, les tractations vont bon train dans la sphère politique. Ce mardi matin, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a annoncé une décision forte : son parti soutiendra des candidats issus des Républicains dans la course à l’Assemblée nationale. Un appel du pied stratégique dans l’objectif de bâtir « la majorité la plus large possible ».
Le RN tend la main à LR
Sur les ondes de RTL, Jordan Bardella a clarifié ses intentions. Malgré les sondages très favorables, le jeune leader lepéniste ne veut rien laisser au hasard. «Je m’adresse à d’autres formations politiques en leur proposant de travailler avec moi dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale», a-t-il martelé. Une main tendue explicitement en direction de la droite traditionnelle :
J’ai eu un certain nombre de discussions avec des gens qui ne sont pas de ma famille politique, avec des cadres des Républicains.
– Jordan Bardella
Pour concrétiser ce rapprochement, le RN s’apprête donc à soutenir des candidats estampillés LR aux législatives, en plus de ses propres candidats. Un geste fort dans une période de recomposition politique.
Les Républicains sous pression
Du côté des Républicains, la proposition de Bardella place la direction dans une position délicate. Éric Ciotti, le patron de LR, doit trancher au plus vite sur la stratégie à adopter pour ces élections à haut risque. Accepter l’offre du RN signifierait un véritable tournant idéologique, avec le danger d’une hémorragie des cadres modérés. Mais un refus catégorique priverait la droite d’un potentiel réservoir de voix.
Dans son intervention, Jordan Bardella n’a d’ailleurs pas hésité à mettre la pression sur ses rivaux de droite : «J’appelle vraiment Les Républicains à cesser d’être la béquille politique d’Emmanuel Macron», a-t-il lancé, avant d’ajouter «venez travailler à nos côtés, moi je vous tends la main comme je l’ai toujours fait».
Vers un bouleversement du paysage politique ?
Si elle se concrétise, l’alliance entre le RN et une partie de LR marquerait un séisme politique. Impensable il y a encore quelques années, ce scénario semble aujourd’hui de moins en moins fictif. Le contexte de crise démocratique et l’affaiblissement des partis traditionnels rebattent les cartes.
Pourtant, des obstacles demeurent. Au sein même du RN et de LR, certaines voix s’élèvent contre un tel rapprochement, par peur de perdre leur identité. L’électorat de droite, divisé, pourrait aussi ne pas suivre. Enfin, les divergences programmatiques restent importantes entre les deux formations, notamment sur les questions européennes et économiques.
L’union nationale, un concept valise
Au-delà de l’effet d’annonce, le concept de «gouvernement d’union nationale» agité par Jordan Bardella soulève des questions. S’agit-il d’une véritable main tendue ou d’une manœuvre politique ? Quels seraient les contours et le programme d’une telle alliance ? Les électeurs y adhèreraient-ils ?
Dans un contexte de défiance envers les élites et de rejet du «système», l’appel à l’unité peut faire mouche. Mais il faudra plus que des slogans pour convaincre des Français en quête de renouveau démocratique. Les prochaines semaines, avec la campagne qui s’annonce, seront décisives pour mesurer la portée et la solidité du discours rassembleur de Jordan Bardella.
À surveiller également, les réactions des autres forces politiques, de la majorité présidentielle à la gauche. Car si le rapprochement RN/LR se confirmait, c’est tout l’échiquier politique qui pourrait s’en trouver chamboulé, avec des repositionnements en cascade. De quoi animer un début d’été déjà brûlant sur le front politique.