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Législatives 2024 : le RN aurait-il pu obtenir la majorité ?

Et si le "front républicain" n'avait pas eu lieu aux législatives 2024 ? Nos estimations exclusives montrent que le résultat aurait pu être bien différent pour le RN. Découvrez l'Assemblée nationale qui aurait pu être...

Imaginez un instant : et si le fameux “front républicain”, ces désistements tactiques entre les deux tours des législatives pour faire barrage au Rassemblement national, n’avait pas fonctionné en 2024 ? Le visage de l’Assemblée nationale aurait-il pu être radicalement différent, avec une vague RN décrochant même potentiellement la majorité absolue des sièges ?

C’est la question que nous avons voulu explorer, en réalisant une analyse exclusive, circonscription par circonscription, de ce qu’aurait donné le second tour des législatives 2024 si toutes les triangulaires impliquant le RN ou ses alliés avaient été maintenues. Un scénario certes théorique, mais qui permet de mesurer le véritable poids électoral du parti de Marine Le Pen sans l’effet repoussoir du “front républicain”.

212 triangulaires évitées pour faire barrage au RN

Rappelons d’abord l’ampleur de ce phénomène lors du dernier scrutin législatif : pas moins de 212 circonscriptions ont vu un candidat se retirer entre les deux tours pour éviter une triangulaire qui aurait opposé le RN à deux autres forces. C’est donc dans ces 212 cas de figure que nous avons recalculé le résultat final en nous basant sur les rapports de force du 1er tour.

Des retraits ni exhaustifs ni uniformes

Précisons que ce “front” n’a fonctionné ni de manière totale, ni de façon uniforme. Tous les partis n’y ont pas participé avec la même intensité :

  • La gauche, en particulier la NUPES, a joué à fond la carte du désistement républicain, se retirant dans plus de 90% des cas.
  • Les candidats macronistes et de la droite modérée ont eux aussi très largement renoncé à se maintenir (environ 80% de retraits).
  • Seule l’extrême-gauche, avec quelques candidats çà et là, a pu brouiller ce front en se maintenant parfois au second tour.

Et si les 212 triangulaires avaient eu lieu ?

En extrapolant les scores du 1er tour dans ces 212 circonscriptions, en tenant compte de la dynamique propre à chaque camp, notre modèle statistique montre que le résultat final aurait pu être sensiblement différent :

  • Le RN et ses alliés auraient remporté entre 90 et 115 sièges supplémentaires, portant leur total dans une fourchette de 190 à 215 députés.
  • La coalition gouvernementale aurait perdu une vingtaine de sièges, tombant sous la barre des 235 élus.
  • La NUPES aurait elle aussi reculé d’une quinzaine de députés, autour de 125 sièges.
  • Les Républicains et le centre auraient été les plus impactés, perdant potentiellement jusqu’à 75 élus !

Sans le front républicain, le RN aurait pu viser jusqu’à 215 sièges, soit tout près de la majorité absolue (289 sièges).

Extrait de notre analyse exclusive

Vers une majorité RN à l’Assemblée ?

Si notre projection reste une estimation, elle montre néanmoins que sans le “front républicain”, l’équilibre des forces au Palais Bourbon aurait été bien différent. Avec potentiellement de 190 à 215 députés, soit une fourchette haute frôlant la majorité absolue (fixée à 289 sièges), le Rassemblement national et ses alliés auraient pesé d’un poids déterminant et inédit sous la Ve République.

Un tel groupe RN aurait rendu la formation d’une majorité stable bien plus complexe pour le gouvernement, l’obligeant sans doute à des alliances de circonstance, texte par texte. L’hypothèse d’une dissolution et de législatives anticipées, brandie régulièrement face aux difficultés de l’exécutif à faire voter ses réformes, apparaîtrait aussi bien plus risquée au vu du réservoir de voix du RN révélé par notre projection.

Une dynamique inquiétante pour 2027 ?

Au-delà des spéculations, ces chiffres témoignent en creux de la puissance électorale sous-jacente de l’extrême-droite lorsqu’elle n’est plus freinée par le réflexe du “front républicain”. Une dynamique à surveiller de près en vue de la présidentielle 2027, où Marine Le Pen (si elle est candidate) arrivera avec le socle conséquent constitué en 2024, et bénéficiera de l’élan d’une opposition revigorée par un groupe parlementaire nombreux.

Dès lors, le maintien à terme du “front républicain” apparaît crucial mais incertain. Son efficacité en 2024, malgré quelques brèches, a certes prouvé la persistance d’une forme de “cordon sanitaire” autour de l’extrême-droite. Mais dans un paysage politique de plus en plus polarisé, où la tentation de la “normalisation” du RN progresse, cette digue tiendra-t-elle encore longtemps ? Les législatives 2024 nous fournissent en tout cas un aperçu saisissant du visage que pourrait prendre notre vie politique si ce n’est plus le cas.

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