Le débat sur l’anonymat en ligne refait surface. Lors de son intervention au Forum économique mondial de Davos mercredi, le Premier ministre socialiste espagnol Pedro Sánchez a plaidé pour la fin de l’anonymat sur les réseaux sociaux. Il y voit une menace pour l’ordre démocratique et compte bien soumettre cette proposition à ses pairs européens.
Les réseaux sociaux, un danger pour la démocratie selon Sánchez
Pour Pedro Sánchez, la situation actuelle sur les médias sociaux est intenable et néfaste pour nos sociétés. Lors de son discours en anglais sur la scène de Davos, il n’a pas mâché ses mots:
Les réseaux sociaux nuisent à l’ordre libéral et au système démocratique en simplifiant excessivement et en polarisant le débat public, en encourageant la désinformation et en devenant des outils qui remplacent les votes par des +J’aime+.
Pedro Sánchez, Premier ministre espagnol
Le dirigeant ibérique a annoncé qu’il porterait ce sujet auprès de ses homologues lors d’une prochaine réunion à Bruxelles. L’objectif: faire des réseaux sociaux « des espaces de discussions sûrs et équitables » en mettant fin à l’anonymat qui y règne.
Une « technocaste » dans le viseur
Ce n’est pas la première fois que Pedro Sánchez s’en prend à ceux qu’il qualifie de « technocaste ». Ces dernières semaines, il a multiplié les attaques contre les contrôleurs des réseaux sociaux. Le jour de l’investiture de Joe Biden à la présidence américaine, le socialiste avait même appelé à « se rebeller » contre eux.
Pour Sánchez, ces « techno-milliardaires » ne se contentent plus d’un pouvoir économique quasi-total. Ils cherchent désormais aussi à s’emparer du pouvoir politique « d’une manière qui sape nos institutions démocratiques », a-t-il répété mercredi à Davos.
L’analogie avec les plaques d’immatriculation et les armes
Pour appuyer son propos, le Premier ministre a utilisé une comparaison parlante:
Dans nos pays, personne ne peut (…) conduire une voiture sans plaque d’immatriculation ou acheter une arme de chasse sans fournir son nom. Mais nous permettons à des personnes de circuler librement sur les réseaux sociaux sans relier leur profil à une identité réelle.
Pedro Sánchez
Et de conclure: « Dans une démocratie, les citoyens ont droit à la vie privée, pas à l’anonymat ni à l’impunité ».
Algorithmes et modération aussi dans le collimateur
Au-delà de l’anonymat, Pedro Sánchez veut aussi s’attaquer à la « boîte noire » des algorithmes des réseaux sociaux. Pour lui, « la modération des contenus et la vérification des faits sont des exigences légales et morales que tous doivent respecter ».
Les propriétaires des plateformes devraient même selon lui être « tenus personnellement responsables du non-respect des lois et règles sur leurs plateformes, comme c’est le cas dans d’autres secteurs ». Un avertissement on ne peut plus clair adressé aux patrons de la Silicon Valley.
« Rendons leur grandeur aux réseaux sociaux! »
Le leader socialiste a conclu son vibrant plaidoyer par une formule choc, détournant le célèbre slogan de Donald Trump:
Rendons leur grandeur aux réseaux sociaux!
Pedro Sánchez
Reste à voir comment ses propositions seront accueillies par ses partenaires européens et si elles se concrétiseront. Une chose est sûre, le sujet promet de faire couler beaucoup d’encre dans les prochains mois. La bataille entre les États et les géants du numérique ne fait que commencer.