Face aux tensions géopolitiques actuelles, les pays baltes – l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie – ont décidé de renforcer leur sécurité en établissant une « ligne de défense » à leur frontière orientale avec la Russie et le Bélarus. Ce projet, qui vise à prépositionner du matériel pour permettre la construction rapide de positions défensives solides en cas de conflit, soulève des questions quant à sa nature et son efficacité.
Une stratégie de préparation, pas une ligne fortifiée continue
Selon le général Indrek Sirel, commandant la Division estonienne, il est essentiel de comprendre que cette ligne de défense balte n’est pas une réplique de la ligne Maginot, ce système de fortifications construit par la France dans les années 1930 pour se prémunir d’une invasion allemande. Il ne s’agit pas d’ériger une tranchée continue ou des bunkers déjà occupés par des soldats.
L’objectif est plutôt d’accroître la capacité de survie des combattants en prépostionnant les matériaux nécessaires à l’édification rapide d’installations défensives en cas de besoin. Cela permettrait aux forces baltes de mener à bien leurs missions face à un éventuel envahisseur.
Tirer les leçons du conflit en Ukraine
Cette initiative s’inspire directement des enseignements tirés de la guerre en Ukraine. Les pays baltes cherchent à optimiser leur préparation face à une potentielle agression, en disposant à l’avance des moyens de fortifier rapidement des positions clés.
Je ne pense pas qu’à ce stade nous soyons encore en mesure de prendre la décision de construire une ligne complète, car une grande partie de ces terres est utilisée par la population estonienne, par nos agriculteurs.
– Général Indrek Sirel
Toutefois, comme le souligne le général Sirel, il n’est pas encore question d’édifier une ligne de défense continue, qui empiéterait sur les terres utilisées par les populations locales, notamment les agriculteurs. Il s’agit avant tout de disposer de moyens préconstionnés pour réagir rapidement en cas de nécessité.
Un projet coordonné entre défense et sécurité intérieure
La mise en place de cette ligne de défense balte se fait en coordination avec les ministères de l’Intérieur des États concernés. Au-delà de l’aspect purement militaire, il s’agit aussi de se prémunir contre les afflux de migrants à la frontière, parfois utilisés comme instrument de « guerre hybride » par Moscou selon le général estonien.
Cette dimension sécuritaire ajoute une complexité supplémentaire au projet, qui doit concilier des impératifs de défense nationale et de contrôle des frontières. Une approche globale et coordonnée apparaît indispensable pour relever ce défi.
Une réponse proportionnée à la menace
Si la ligne de défense balte ne constitue pas un « mur de l’Atlantique » comme a pu l’être la ligne Maginot en son temps, elle témoigne néanmoins d’une prise de conscience des pays concernés face aux risques sécuritaires auxquels ils sont confrontés. Prépositionner des moyens de fortification apparaît comme une réponse mesurée et adaptée au contexte.
Reste à savoir comment ce dispositif s’intégrera dans la stratégie globale de défense de l’OTAN, dont les pays baltes sont membres. Une coordination étroite sera indispensable pour assurer la cohérence et l’efficacité de ce projet ambitieux, qui vise à renforcer la sécurité sur le flanc oriental de l’Alliance atlantique.