Dimanche matin, à Damas, une foule de Syriens a investi la somptueuse résidence de Bachar al-Assad, président déchu et en fuite. Hommes, femmes et enfants déambulent dans ce lieu autrefois interdit et symbole d’un pouvoir qui s’est effondré face à l’offensive des rebelles après un demi-siècle de règne sans partage du clan Assad. Pour beaucoup, c’est l’heure des comptes et de la libération.
Un lieu de pouvoir devenu accessible
La résidence, formée de trois immeubles de six étages dans le quartier huppé de Malki, a été pillée peu avant l’arrivée de la foule. Un homme de 44 ans, Abou Omar, parcourt les vastes pièces désormais vides, immortalisant la scène :
Je suis venu pour la vengeance, car il nous a opprimés d’une façon incroyable. Je prends des photos car je suis tellement heureux de me retrouver en plein cœur de sa maison.
Documents éparpillés, tableau représentant Assad jeté au sol : les signes de la fuite précipitée du chef de l’État sont partout. Sur les réseaux sociaux, des vidéos montrent une foule s’emparant de vêtements et d’effets personnels de luxe. Un palais présidentiel tout proche a lui été incendié.
La fin d’un règne de peur
Pour ceux qui visitent les lieux, c’est la fin d’une époque marquée par la crainte et les privations. Oum Nader, une femme de 35 ans, exprime sa colère face au faste de la résidence alors que le peuple vivait dans la misère.
Même lorsqu’ils sont partis, l’eau et le chauffage sont toujours assurés, alors que nos enfants tombent malades à cause du froid.
Un jeune homme de 25 ans, Omar, voit dans cette journée un moment divin et la fin d’un long calvaire :
Dieu a été généreux, et nous a permis ce moment que nous attendions depuis les années 70. Il vivait dans le luxe pendant qu’on souffrait.
Scènes de liesse dans tout le pays
La chute du régime Assad a déclenché des scènes de joie dans de nombreuses villes syriennes et parmi la diaspora. Après des décennies de répression sanglante, beaucoup n’osent encore y croire.
Alors que les combats continuent dans certaines poches de résistance, l’heure est déjà à la reconstruction et aux retrouvailles pour de nombreuses familles séparées par des années de conflit. Le chemin sera long mais l’espoir est revenu.
Les défis de l’après-Assad
Si la peur semble s’être évanouie avec la chute de la dictature, de nombreuses incertitudes demeurent. La coalition rebelle, dominée par le groupe islamiste radical HTS, devra rassurer une population épuisée par la guerre et avide de liberté.
La communauté internationale aura également un rôle clé à jouer pour accompagner une transition qui s’annonce délicate. Reconstruire un pays et une société meurtris par un demi-siècle d’oppression nécessitera des efforts considérables.
Mais en ce jour historique, c’est avant tout le sentiment de tourner enfin la page d’une sombre époque qui domine. Comme le résume Abou Omar avec émotion :
Aujourd’hui, je n’ai plus peur (…) mon seul souci est qu’on soit unis, et qu’on construise ce pays de toutes nos forces.