À quelques jours d’un second tour des législatives décisif, Jordan Bardella, chef de file du Rassemblement national, se pose en héraut du «vrai front républicain» face à l’union de circonstance entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon. Dans un entretien accordé au Figaro le 2 juillet, le jeune dirigeant met en avant sa «coalition des patriotes et des républicains», seule à même selon lui de «défendre la France» et de «protéger la République». Une posture forte à l’heure où se profile le spectre d’une cohabitation inédite.
L’épouvantail d’un «front du déshonneur»
Jordan Bardella n’hésite pas à dramatiser les enjeux du scrutin. Face à lui, se dresserait «l’alliance du pire», incarnée par «l’extrême gauche» de LFI et un président de la République prêt à se «jeter dans les bras de Jean-Luc Mélenchon» pour sauver son quinquennat, «malgré l’ambiguïté» de ce dernier «à l’égard de l’antisémitisme» et son projet de «désarmer la police». Un «front du déshonneur» menaçant de plonger le pays dans «l’enfer fiscal», «le désordre et l’insurrection».
Aujourd’hui, le vrai front républicain, c’est nous!
– Jordan Bardella, dans Le Figaro du 2 juillet 2024
Le RN, rempart de la République ?
En se présentant comme défenseurs de la France et de la République, les dirigeants du RN cherchent à se débarrasser de l’étiquette infamante d’extrême droite pour rassembler au-delà de leur base. Un positionnement inédit pour un parti habitué à subir le «front républicain». Cette stratégie de respectabilité et de rassemblement semble porter ses fruits, au vu des scores historiques enregistrés au premier tour.
Vers une nouvelle ère politique ?
Bardella l’assure : seule sa «coalition des patriotes» peut offrir une alternative crédible à l’alliance «contre-nature» Macron-Mélenchon. En cas de victoire, le RN se verrait propulsé dans une position inédite de premier opposant, voire de parti de gouvernement en cas de cohabitation. Un scénario qui signerait la fin du «cordon sanitaire» et rebattrait les cartes du jeu politique.
Face à ces déclarations, il convient néanmoins de garder la tête froide. Malgré ces efforts de «dédiabolisation», le programme du RN conserve des mesures controversées tant sur le plan migratoire qu’économique et européen. L’hypothèse d’une cohabitation RN-Macron, brandie comme un chiffon rouge, reste hautement improbable. Derrière les envolées lyriques, cette posture de rassembleur témoigne surtout de l’hyper-présidentialisation qui continue de structurer la vie politique française.
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À trois jours du second tour, Jordan Bardella veut croire que son «front républicain» peut l’emporter sur «l’alliance du déshonneur Macron-Mélenchon». Mais au-delà des effets de manche, c’est bien la capacité de son mouvement à élargir sa base au centre-droit qui sera décisive dimanche prochain. Une chose est sûre : quelle que soit l’issue du scrutin, le jeune chef du RN ne compte pas s’arrêter en si bon chemin dans sa mue présidentiable.