Dans un communiqué choquant, l’armée israélienne a annoncé mercredi l’inculpation de cinq de ses soldats réservistes pour avoir gravement maltraité un détenu palestinien en juillet 2024. Les faits se sont déroulés dans le centre de détention de Sdé Teiman, situé dans le sud d’Israël près de la bande de Gaza, où sont incarcérés de nombreux Palestiniens arrêtés depuis le début de la guerre avec le Hamas le 7 octobre 2023.
Des actes d’une grande violence
Selon l’acte d’accusation, les cinq soldats ont agi avec une brutalité inouïe envers le détenu palestinien. Menotté, les chevilles entravées et les yeux bandés, l’homme a été conduit dans une zone adjacente à la prison pour y subir une fouille. C’est là que les militaires lui ont infligé ce que le communiqué qualifie de « graves blessures », citant notamment des côtes fêlées, un poumon perforé et une fissure anale. Des images extraites des caméras de surveillance ainsi que des documents médicaux attestent de la gravité des sévices.
Un contexte de guerre et d’abus
Ces violences s’inscrivent dans le contexte de la guerre qui fait rage depuis octobre 2023 entre Israël et le Hamas, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien en territoire israélien. Le centre de détention de Sdé Teiman a été spécialement aménagé dans une base militaire pour y emprisonner les Palestiniens arrêtés dans la bande de Gaza depuis le début du conflit.
Malheureusement, il ne s’agit pas d’un cas isolé. Début février, un autre soldat israélien a été condamné à sept mois de prison ferme par un tribunal militaire pour mauvais traitements sur des détenus palestiniens dans ce même centre. Et en juillet 2024, un rapport du Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme Volker Türk faisait état de nombreux Palestiniens emprisonnés dans le secret et soumis dans certains cas à un traitement s’apparentant à de la torture depuis l’attaque du 7 octobre.
Une justice militaire à l’épreuve
Si l’inculpation des cinq soldats est une étape importante, elle soulève aussi des questions sur l’ampleur et la systémacité des abus commis envers les détenus palestiniens. La justice militaire israélienne saura-t-elle faire preuve de la fermeté nécessaire pour sanctionner ces actes et prévenir leur répétition ?
Au-delà des responsabilités individuelles, c’est tout un système de détention qui est pointé du doigt, avec des Palestiniens incarcérés en masse, souvent dans le secret, et exposés à des traitements inhumains en violation du droit international. Dans un contexte de guerre qui s’éternise, la tentation des abus et des violences envers les détenus devient plus forte et plus difficile à juguler.
Un signal fort mais insuffisant
L’inculpation de ces cinq soldats est un signal important de la part de l’armée israélienne, montrant une volonté de ne pas laisser ces actes impunis. Mais elle ne suffira pas à elle seule à endiguer le phénomène. Il faudra une vigilance de tous les instants, un rappel constant des règles et des sanctions, ainsi qu’un changement de culture au sein des unités gérant les centres de détention.
Plus largement, c’est la question du traitement des détenus palestiniens qui doit être posée, et avec elle celle du respect du droit international humanitaire même dans un contexte de guerre. Israël ne peut se prévaloir de son statut de démocratie et d’état de droit tout en laissant perdurer des pratiques abusives et dégradantes envers les prisonniers.
L’inculpation de ces cinq soldats doit être le point de départ d’une remise en question plus profonde, pour garantir à tous les détenus, même en temps de guerre, un traitement digne et humain. C’est une question de principes et de valeurs, mais aussi de sécurité à long terme. Car la brutalité engendre la rancœur et sape les chances d’une paix future. En sanctionnant les abus commis par ses soldats, Israël envoie un message important. Mais le chemin sera encore long pour bâtir une détention respectueuse des droits, seul gage d’une réconciliation possible.