Au cœur d’une bande de Gaza meurtrie par plus d’un an de conflit, les habitants s’activent pour retaper leurs maisons avant l’arrivée de l’hiver. Avec les maigres moyens du bord, ils font preuve d’une ingéniosité sans limite pour se prémunir du froid qui s’annonce.
Une reconstruction de bric et de broc
Sur les ruines de leurs anciennes demeures, les Gazaouis s’affairent à bâtir de nouveaux murs. Faute de matériaux de construction, sévèrement restreints par les autorités israéliennes, ils récupèrent les pierres des bâtisses détruites. Mélangées à de l’argile et de l’eau, elles servent à ériger des parois de fortune.
On a pu ramasser ces pierres pour reconstruire un mur qui nous protège, et après on reconstruira toute la maison.
Abdelrahmane Abou-Anza, habitant de Gaza
Autour d’eux, les bâtiments inachevés portent encore les stigmates de la guerre entre Israël et le Hamas. Mais l’urgence est ailleurs. Il faut à tout prix un toit, même précaire, pour affronter les rigueurs de l’hiver.
Le spectre de l’hiver précédent
La mémoire des nuits glaciales et humides de l’an dernier est encore vive. Les pluies diluviennes avaient alors transformé les camps de fortune, où s’entassaient les déplacés, en de véritables bourbiers. Une épreuve supplémentaire pour une population déjà à genoux.
Des conditions de vie précaires
Sans accès aux matériaux de base, les Gazaouis improvisent avec les moyens du bord. De l’aveu même des habitants, ces techniques de construction rudimentaires les ramènent 60 à 70 ans en arrière.
Il n’y a pas de ciment, donc l’alternative, c’est de revenir à ce qu’on faisait il y a 70 ans, à l’époque de nos ancêtres, qui construisaient avec de l’argile.
Mohammed Shanino, habitant de Gaza
Mohammed et sa famille s’entassent désormais dans une pièce unique, aux murs disjoints et au toit fait de bric et de broc. Malgré le froid qui s’infiltre par les interstices, ses enfants se réjouissent. Après des mois sous une tente, ce semblant de foyer est une bénédiction.
L’ingéniosité légendaire des Gazaouis
Sur les réseaux sociaux, des vidéos de ces constructions de fortune circulent, témoignages de la débrouillardise des habitants de Gaza. Face à l’adversité, leur ingéniosité n’est plus à démontrer. Certains y voient l’incarnation de cette célèbre citation de Yasser Arafat :
Ô toi montagne, que le vent ne peut ébranler, ô toi peuple de géants.
Yasser Arafat
Mais derrière l’admiration, pointe aussi l’amertume. Car cette ingéniosité tant vantée est avant tout le fruit de conditions de vie inhumaines. Avec des hivers où le thermomètre descend rarement en dessous de 6°C, le principal défi reste l’humidité. Omniprésente, elle s’immisce partout, jusque dans les vêtements, rendant le quotidien plus pénible encore.
La reconstruction, un défi de taille
Selon les experts, la réparation des maisons existantes, lorsqu’elle est possible, reste la solution la plus efficace. Elle permet de restaurer une isolation thermique préexistante, un luxe dans le contexte actuel. Mais dans une bande de Gaza privée de matériaux de construction, l’entreprise relève souvent de l’impossible.
Pour beaucoup, l’habitat de fortune est devenu la norme, et ce depuis longtemps. Nidaa al-Jarn en est l’illustration. Pieds nus sur le sol de terre battue, elle fait visiter son modeste refuge, assemblage hétéroclite de pierres et de boue.
Parce que nous voulons vivre.
Nidaa al-Jarn, habitante de Gaza
Une volonté de vivre qui force le respect, mais qui ne saurait masquer une réalité implacable. Celle d’un peuple pris en étau, condamné à une survie au jour le jour dans des conditions indignes. À l’approche de l’hiver, l’urgence humanitaire est plus criante que jamais dans cette bande de Gaza oubliée de tous.