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Equateur : Le pays en proie à une crise multidimensionnelle

L'Equateur traverse une crise majeure à multiples facettes : sécheresse historique, violence des narcotrafiquants, économie chancelante, tensions politiques... Le président Noboa parviendra-t-il à redresser le pays lors de la présidentielle à venir ? Un défi de taille...

À quelques mois de l’élection présidentielle, l’Equateur se trouve plongé dans une crise profonde et multidimensionnelle. Le pays, coincé entre la Colombie et le Pérou, deux géants de la production de cocaïne, doit faire face à une conjonction de problèmes alarmants : sécheresse historique mettant en péril l’approvisionnement en électricité et en eau, économie vacillante, violence persistante des groupes criminels liés au narcotrafic et vives tensions politiques. Un cocktail explosif qui place le président sortant Daniel Noboa dans une position délicate, malgré des sondages le donnant favori.

Une sécheresse d’une ampleur inédite

L’Equateur traverse actuellement la pire sécheresse depuis 60 ans, avec des conséquences dramatiques pour le pays. Les centrales hydroélectriques, qui fournissent 70% de l’électricité, sont durement touchées, entraînant des coupures de courant pouvant aller jusqu’à 14 heures par jour. Cette situation ubuesque exaspère la population et pénalise lourdement l’économie, avec déjà 1,44 milliard de dollars de pertes, soit 1% du PIB selon les organisations patronales.

Au-delà de l’électricité, c’est l’approvisionnement en eau potable et la production agricole qui sont menacés. Le sud du pays est particulièrement sinistré, avec plus de 40 000 hectares partis en fumée depuis janvier, dont 10 000 rien qu’en novembre. Face à l’urgence, le gouvernement a décrété lundi « l’urgence nationale » pour 60 jours.

Une économie à l’arrêt

Dépendante du pétrole et dollarisée, l’économie équatorienne connaissait déjà une croissance atone avant d’être laminée par les coupures d’électricité à répétition. Les prévisions de croissance sont passées de 2,4% en 2023 à seulement 0,9% pour 2024. Pire, le FMI ne table plus que sur une hausse du PIB de 0,3%. «L’Equateur connaît une crise économique majeure», résume l’analyste Alberto Acosta Burneo, du cabinet Spurrier Group.

Le spectre de la violence des narcotrafiquants

Depuis des mois, l’Equateur est gangrené par une criminalité galopante, nourrie par les narcotrafiquants colombiens et péruviens qui ont fait du pays une plaque tournante. Malgré des mesures sévères prises en janvier par le président Noboa contre les gangs, désignés comme «terroristes», les massacres dans les prisons, les enlèvements et l’extorsion continuent de saigner le pays. «La population conserve un très fort sentiment d’insécurité», souligne Fernando Carrion, chercheur à la Flacso.

Tensions au sommet de l’État

Pour ne rien arranger, le président Noboa doit composer avec une crise politique et sa vice-présidente Veronica Abad, avec laquelle il entretient des relations exécrables. Nommée ambassadrice en Israël et suspendue de ses fonctions, elle l’accuse de «persécution» et a fait un retour fracassant mercredi en Equateur. Une péripétie de plus qui vient miner la crédibilité d’un président pourtant ultra-populaire il y a moins d’un an.

Noboa, un président sous pression

Élu à l’automne 2023 sur la promesse d’en finir avec la violence, le plus jeune chef de l’État de l’Histoire du pays voit sa cote de popularité fondre comme neige au soleil, passant de 85% en janvier à 42% en octobre selon l’institut Opinion Profiles. «Toutes ces crises, et en particulier celle de l’électricité, plombent sa légitimité et ses chances de réélection», analyse Fernando Carrion. Malgré tout, Daniel Noboa demeure le favori des sondages, avec 4 points d’avance sur son opposante de gauche Luisa Gonzalez.

Un scrutin sous haute tension

La campagne qui s’ouvre en janvier s’annonce électrique, sur fond de menaces de mort contre les candidats. Depuis un an, plus de 30 responsables politiques ont été assassinés. Le président Noboa, dont le mandat s’achève en mai 2025, avait été élu lors d’un scrutin anticipé provoqué par son prédécesseur, parti prématurément pour éviter une destitution pour corruption. Dans ce contexte inflammable, parvenir à organiser une élection apaisée et incontestée relève de la gageure.

L’Equateur se trouve à la croisée des chemins. Miné par des crises en cascade d’une ampleur rarement vue, le pays aborde la présidentielle de 2024 avec une incertitude maximale. L’enjeu est de taille pour le président Noboa, qui joue sa survie politique. Mais au-delà, c’est la stabilité même de la nation andine qui est en jeu. Les prochains mois seront décisifs pour savoir si l’Equateur parvient à enrayer sa dangereuse spirale de tensions.

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