Imaginez-vous plongé dans l’obscurité totale pendant près de deux jours, sans eau ni moyen de communication, dans une chaleur étouffante. C’est ce qu’ont vécu des millions de Cubains ce week-end, alors qu’une panne électrique massive a paralysé l’île entière. Ce n’est pas un scénario isolé : en moins de six mois, c’est la troisième fois que le pays sombre dans un blackout généralisé.
Une Île à Bout de Souffle
Dimanche matin, un soupir de soulagement a traversé Cuba. D’après une source proche du ministère de l’Énergie, le réseau électrique a repris vie, reliant progressivement l’ouest, depuis le port de Mariel, jusqu’à l’extrême est à Guantanamo. Mais ce retour à la normale reste fragile, et les habitants le savent bien.
Un Réseau en Miettes
La panne a débuté vendredi soir, déclenchée par une défaillance dans une sous-station près de la capitale. En quelques instants, tout le pays a été déconnecté. Avec une production de seulement **935 MW** dimanche – contre une demande moyenne de **3 000 MW** – le système peine à répondre aux besoins. À La Havane, seuls 19 % des foyers ont retrouvé le courant dans un premier temps.
« À 5 heures du matin, c’était la folie : on rechargeait tout, on remplissait les réservoirs d’eau, un bruit infernal ! »
– Témoignage d’un habitant de Guanabacoa
Ce chaos n’est pas une surprise. Les infrastructures électriques, héritées des décennies passées, tombent en ruine. Les huit centrales principales, construites pour la plupart dans les années 80 et 90, accumulent les pannes et les arrêts forcés pour maintenance.
Une Vie Quotidienne Bouleversée
Samedi, l’île a semblé figée dans le temps. Sans électricité, pas d’eau courante ni de gaz pour beaucoup. Les lignes téléphoniques, déjà capricieuses, sont devenues quasi inutilisables. Les bus et autres transports publics ? Cloués au sol. Pour les 9,7 millions d’habitants, c’est une plongée brutale dans l’incertitude.
- Pas d’eau pour boire ou se laver dans de nombreuses zones.
- Communications coupées, isolant familles et proches.
- Transports paralysés, compliquant les déplacements essentiels.
Et ce n’est pas une exception. Depuis des mois, les Cubains subissent des coupures quotidiennes : **4 à 5 heures** dans la capitale, jusqu’à **20 heures** en province. Une routine qui use les nerfs et teste la résilience.
Une Crise Énergétique Enracinée
Depuis cinq ans, Cuba traverse une crise économique sans précédent. Le réseau électrique, déjà fragile, en est l’une des victimes les plus visibles. Les pannes à répétition ne sont pas seulement dues à des équipements obsolètes : le pays manque cruellement de combustible pour faire tourner ses centrales.
Sous embargo américain depuis 1962, importer du carburant est un casse-tête logistique et financier. Les centrales flottantes et générateurs, censés pallier les défaillances, dépendent de ces approvisionnements incertains. Résultat : un système au bord de l’effondrement.
Les Solutions en Marche
Face à l’urgence, les autorités misent sur une alternative : l’énergie solaire. En 2025, pas moins de **55 parcs solaires** de technologie chinoise devraient voir le jour. Objectif ? Produire **1 200 MW**, soit environ 12 % des besoins nationaux. Une lueur d’espoir, mais qui ne résoudra pas tout.
Élément | Données actuelles | Objectif 2025 |
Production électrique | 935 MW | +1 200 MW (solaire) |
Besoins quotidiens | 3 000 MW | Stable |
Ces projets, bien que prometteurs, demandent du temps. En attendant, les habitants continuent de jongler avec des coupures imprévisibles et une infrastructure qui menace de lâcher à tout moment.
Un Peuple Résilient
Pourtant, au milieu de cette crise, les Cubains font preuve d’une ténacité impressionnante. À l’aube, quand le courant est revenu dans certains quartiers, l’effervescence était palpable. Les lampes se rallumaient, les téléphones reprenaient vie, et l’eau montait dans les réservoirs. Un moment de joie dans une lutte quotidienne.
Mais jusqu’à quand cette résilience tiendra-t-elle ? Avec trois blackouts majeurs en un trimestre, dont deux ayant duré plusieurs jours, la patience s’effrite. La population, déjà éprouvée par les pénuries et l’inflation, se demande si le bout du tunnel est en vue.
Vers un Avenir Incertain
Le retour progressif de l’électricité ce dimanche n’est qu’un pansement sur une plaie béante. Les parcs solaires pourraient changer la donne, mais leur mise en place est un pari risqué dans un contexte économique tendu. Et si les coupures persistent, que restera-t-il de l’espoir des Cubains ?
Une chose est sûre : cette crise énergétique n’est pas qu’une question de watts et de volts. Elle révèle les fragilités d’un pays qui, malgré les défis, refuse de plier. Reste à savoir si la lumière reviendra pour de bon, ou si l’obscurité deviendra la norme.
Une île dans le noir, mais pas sans espoir.