ActualitésSociété

Corrida : Le Sénat va-t-il interdire l’accès aux mineurs de moins de 16 ans ?

Les arènes risquent-elles de fermer leurs portes aux moins de 16 ans ? Le Sénat s'emparera dans un mois d'une proposition de loi visant à interdire l'accès des mineurs aux corridas. Un débat sociétal brûlant entre traditions, protection de l'enfance et bien-être animal. Les passions promettent de s'enflammer dans l'hémicycle...

Les arènes de corrida vont-elles devenir un lieu interdit aux mineurs de moins de 16 ans en France ? C’est le débat brûlant qui s’annonce au Sénat dans un mois. En effet, une proposition de loi transpartisane visant à interdire l’accès des enfants à ces spectacles traditionnels mais controversés sera examinée le 14 novembre prochain.

Une tradition ancienne face aux évolutions sociétales

Autorisée en France depuis 1951 par dérogation à l’interdiction des actes de cruauté envers les animaux, la corrida suscite une opposition grandissante. Sur fond d’évolution des mentalités et de plus grande sensibilité au bien-être animal, de nombreuses voix s’élèvent pour réclamer son abolition pure et simple. Un combat qui se heurte aux traditions solidement ancrées dans le sud de la France.

Mais aujourd’hui, c’est sur le terrain de la protection de l’enfance que le débat se déplace. Le texte déposé par la sénatrice Renaissance Samantha Cazebonne propose ainsi d’interdire l’accès aux arènes pour les mineurs de moins de 16 ans, un âge charnière dans de nombreuses législations.

Beaucoup de pays voisins, où ces traditions sont beaucoup plus ancrées, ont eux-mêmes légiféré sur le sujet. Pourquoi serions-nous les derniers à vouloir protéger nos enfants ?

s’interroge la sénatrice, qui fut proviseure

Débat passionné en perspective

Déposé en mars, le texte bénéficie du soutien d’une quarantaine de sénateurs, de gauche comme de droite. Des élus écologistes aux Républicains en passant par le groupe centriste, la proposition transcende les clivages partisans. Pour autant, son adoption est loin d’être acquise dans un Sénat dominé par une alliance majoritaire LR-centristes traditionnellement plus réticente à toucher aux traditions locales.

Même au sein de la majorité sénatoriale macroniste, les avis sont partagés. Le président du groupe François Patriat est lui-même opposé au texte mais a accepté de l’inscrire à l’ordre du jour au nom du respect des sensibilités de chacun. In fine, le débat promet d’être passionné, pour ne pas dire électrique.

L’intérêt supérieur de l’enfant en question

Pour les partisans de l’interdiction, c’est le principe de cohérence qui doit primer. À l’heure où la société multiplie les dispositifs pour protéger les mineurs contre les images violentes ou traumatisantes, il paraît inconcevable de continuer à les exposer directement à la brutalité des spectacles de mise à mort.

Dans beaucoup d’autres dispositifs législatifs, on s’est attaché à prendre soin d’éviter l’exposition des mineurs à des images violentes ou traumatisantes. Nous parlons ici d’une exposition directe à des spectacles extrêmement violents.

martèle le sénateur Arnaud Bazin, vétérinaire de profession

Une position partagée par de nombreux spécialistes de l’enfance et de la santé mentale. Déjà en 2016, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU avait demandé à la France d’interdire aux mineurs l’accès aux arènes, à l’instar d’autres pays de tradition taurine comme le Portugal ou la Colombie qui vient d’interdire purement et simplement la pratique à compter de 2027.

Corrida : débat sociétal et émotionnel

Mais pour les défenseurs de la corrida, l’interdiction aux mineurs reviendrait à terme à condamner la pratique. Comment faire perdurer une tradition si on empêche sa transmission aux jeunes générations ? L’argument de la protection est vu comme un cheval de Troie pour les abolitionnistes.

Au-delà, c’est la question du rapport à la mort et à la violence qui est posée. Pour certains, l’initiation à la tauromachie, sous le contrôle des adultes, permet de se confronter au réel de la vie et de la mort. Une éducation de la sensibilité et du courage qui fait écho à d’autres rites de passage à travers le monde.

C’est donc un débat éminemment sociétal et émotionnel qui s’annonce au Sénat. Entre l’universalité des droits de l’enfant et le respect des particularismes culturels, entre sensibilité contemporaine et traditions ancestrales, les lignes de fracture promettent d’être profondes et les échanges intenses. Une chose est sûre : la proposition d’interdiction de la corrida aux mineurs ne laissera personne indifférent et promet de faire couler beaucoup d’encre… et de passion.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.