Les espoirs de paix en Colombie ont subi un sérieux revers ce vendredi. Le président Gustavo Petro a annoncé la suspension des pourparlers avec la guérilla de l’Armée de Libération Nationale (ELN), au lendemain d’une journée meurtrière dans la région frontalière avec le Venezuela. Cette décision radicale intervient après des mois d’efforts pour négocier un accord avec le dernier grand groupe rebelle encore actif dans le pays.
Une région sous haute tension
Les violences ont éclaté jeudi dans la zone du Catatumbo, à la frontière entre la Colombie et le Venezuela. D’après le gouverneur du département de Norte de Santander, William Villamizar, des combattants de l’ELN se sont affrontés à des dissidents des anciennes Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) pour le contrôle du trafic de drogue dans cette région stratégique.
Le bilan est extrêmement lourd, avec au moins 30 morts et une vingtaine de blessés selon les autorités locales. Des dizaines de familles auraient aussi été déplacées par les combats. La région du Catatumbo, où sont plantés plus de 52 000 hectares de coca, est un point névralgique du narcotrafic.
Le rêve de paix s’éloigne
Face à cette flambée de violence, le président Petro a dénoncé des « crimes de guerre » et décidé de geler les négociations initiées fin 2022 avec l’ELN. « Ce qu’a fait l’ELN dans la région du Catatumbo, c’est pourquoi nous suspendons le dialogue avec ce groupe, car l’ELN ne démontre aucune volonté de faire la paix », a-t-il déclaré.
Cette rupture du processus de paix est un coup dur pour le premier président de gauche de l’histoire de la Colombie, élu sur la promesse de mettre fin à près de 60 ans de conflit. L’accord signé en 2016 avec les FARC avait permis de réduire les violences, mais la situation s’est à nouveau dégradée ces dernières années avec la multiplication des groupes armés.
Une crise sécuritaire qui s’aggrave
Au-delà de l’ELN et des dissidences des FARC, d’autres acteurs comme les paramilitaires et les cartels de la drogue alimentent la spirale de la violence, notamment dans les zones rurales. Jeudi, l’ONU avait justement condamné l’assassinat de 5 ex-combattants des FARC dans le Catatumbo, un sombre présage avant le déchaînement de violences.
Le gouvernement colombien se retrouve confronté à une crise sécuritaire majeure, qui menace de faire dérailler son ambitieux agenda de paix. La suspension du dialogue avec l’ELN risque d’entraîner une escalade militaire et de nouvelles souffrances pour les populations civiles, prises en étau entre les groupes armés.
Quel avenir pour le processus de paix ?
La décision du président Petro soulève de nombreuses interrogations sur la suite du processus de paix en Colombie. Si la reprise des négociations avec l’ELN semble compromise à court terme, le gouvernement pourrait tenter de dialoguer avec d’autres groupes armés pour réduire la violence. Il devra aussi s’attaquer aux causes profondes du conflit, comme la pauvreté et les inégalités, pour espérer une paix durable.
Mais la tâche s’annonce immense et semée d’embûches, comme l’illustrent tragiquement les événements sanglants survenus à la frontière vénézuélienne. Après des décennies de guerre, la Colombie est encore loin d’avoir tourné la page des violences. Le chemin vers la réconciliation nationale s’annonce long et douloureux, jonché de désillusions et de défis.
Le rêve d’une Colombie en paix, porté par l’accord historique avec les FARC et l’élection de Gustavo Petro, semble aujourd’hui plus lointain que jamais. Face à la résurgence des affrontements armés, le pays va devoir mobiliser toutes ses forces vives pour surmonter les blessures du passé et construire un avenir meilleur pour tous ses citoyens. Une lutte de chaque instant, qui nécessitera courage, détermination et espoir malgré l’adversité.