Le système judiciaire iranien est sous le choc après l’assassinat de deux éminents juges de la Cour suprême, abattus samedi dans leur bureau à Téhéran. Selon des sources proches de l’enquête, un homme armé s’est introduit dans les locaux de la plus haute instance judiciaire du pays et a ouvert le feu sur Ali Razini et Mohammad Moghisseh, respectivement chefs des branches 39 et 53, avant de retourner l’arme contre lui.
Cet incident d’une rare violence, qualifié d’acte « terroriste » par les autorités, soulève de nombreuses questions sur la sécurité au sein même de l’institution judiciaire iranienne. D’autant que selon les premiers éléments, l’assaillant n’avait pas de dossier en cours devant la Cour suprême. Ses motivations restent pour l’heure inconnues et font l’objet d’une enquête approfondie.
Deux figures controversées de la justice iranienne
Les juges Ali Razini, 71 ans, et Mohammad Moghisseh, 68 ans, comptaient parmi les figures les plus en vue mais aussi les plus controversées du système judiciaire iranien. Tous deux portaient le titre religieux de Hodjatoleslam, signifiant un rang intermédiaire dans le clergé chiite. Leurs carrières respectives, débutées peu après l’avènement de la République islamique en 1979, ont été marquées par la présidence de procès retentissants ces dernières années.
Mohammad Moghisseh a notamment été sanctionné en 2019 par les États-Unis qui lui reprochaient d’avoir « supervisé un nombre incalculable de procès inéquitables ». De son côté, Ali Razini avait déjà été visé par une tentative d’assassinat en 1998, à l’époque où il dirigeait l’appareil judiciaire de la capitale Téhéran.
Une institution fragilisée
Au-delà des personnes visées, c’est toute l’institution judiciaire iranienne qui apparaît ébranlée et fragilisée par cette attaque d’une violence inouïe. Le spectre d’éventuelles complicités internes pour permettre l’accès de l’assaillant armé aux bureaux des magistrats n’est pas écarté à ce stade.
Un responsable judiciaire a affirmé qu’une enquête approfondie était en cours pour déterminer les circonstances exactes et les éventuels commanditaires de cet « acte terroriste ». Les juges assassinés seront enterrés dimanche dans l’intimité familiale, ont précisé des sources proches des défunts à l’agence Mizan Online.
Tensions et instabilité
Ce double assassinat intervient dans un contexte de vives tensions en Iran, sur fond de contestation du régime, de sanctions internationales et d’une économie asphyxiée. En avril dernier déjà, un ayatollah membre de l’Assemblée des experts, organe chargé de désigner le guide suprême, avait été assassiné par balles.
Pour de nombreux observateurs, cet acte « terroriste » qui vise l’un des piliers du régime islamique fait craindre une escalade de la violence et une déstabilisation du pays. Les regards sont désormais tournés vers les conclusions de l’enquête qui devra faire toute la lumière sur les ramifications et les motivations de cette attaque inédite.