Un verdict historique vient d’être rendu par la Cour pénale internationale (CPI) dans l’affaire d’un jihadiste malien, ancien chef de la police islamique de Tombouctou. Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, plus connu sous le nom d’Al Hassan, a été reconnu coupable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité pour les exactions commises sous le joug des groupes extrémistes qui ont occupé le nord du Mali en 2012-2013. Mercredi, la CPI prononcera la peine à l’encontre de cet homme de 47 ans qui risque la perpétuité.
Crimes contre l’humanité à Tombouctou
Selon les juges de la CPI, Al Hassan a joué un « rôle clé » dans la supervision d’actes de torture, mutilations, procès illégaux et persécutions religieuses en tant que chef de la police islamique à Tombouctou. Membre du groupe jihadiste Ansar Dine qui contrôlait la ville légendaire, il est directement impliqué dans les pires exactions.
Durant près d’un an à partir d’avril 2012, les habitants de Tombouctou ont vécu un véritable cauchemar. Des femmes ont été arrêtées et violées en détention. Des flagellations publiques étaient organisées sur la place centrale, parfois devant des enfants. En septembre 2012, un homme accusé de vol a eu la main amputée à la machette, toujours en public. Une terreur quotidienne instaurée par les extrémistes.
Bien que des crimes de violence sexuelle aient eu lieu, Al Hassan n’a pas été reconnu responsable de viols, d’esclavage sexuel ou de mariages forcés par la CPI.
Destructions de mausolées et manuscrits anciens
Tombouctou, joyau du désert fondé entre le 5ème et le 12ème siècle, abritait de nombreux trésors du patrimoine mondial. Mais sous la coupe des jihadistes d’Ansar Dine et d’AQMI, les célèbres mausolées des 333 saints musulmans de la ville ont été méthodiquement détruits à coups de pioches et de pelles. Des milliers de manuscrits médiévaux inestimables ont aussi été brûlés ou pillés.
La « Perle du désert » ne sera libérée qu’en janvier 2013 par les forces françaises et maliennes. Mais les cicatrices de l’occupation jihadiste restent profondes.
Deuxième jihadiste malien jugé par la CPI
Al Hassan est le deuxième extrémiste malien à être jugé par la CPI pour les crimes commis à Tombouctou. En 2016, Ahmad Al Faqi Al Mahdi avait été condamné à 9 ans de prison pour la destruction des mausolées, une peine réduite en appel.
Un autre chef jihadiste du Sahel, Iyad Ag Ghaly, est visé par un mandat d’arrêt de la CPI rendu public en juin. À la tête du puissant Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al-Qaïda, il est lui aussi accusé de multiples crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans la région.
Avancée majeure pour la justice internationale
Ces procès de jihadistes maliens devant la CPI marquent une étape importante. Ils démontrent la volonté de la communauté internationale de ne pas laisser impunis les crimes les plus graves, où qu’ils soient commis. Un message fort alors que le Mali et le Sahel restent enlisés dans un conflit interminable contre les groupes extrémistes.
La condamnation d’Al Hassan pour ses responsabilités dans le cauchemar vécu à Tombouctou est attendue comme un symbole de justice. Pour les victimes qui ont subi l’horreur sous son autorité, il ne reste plus qu’à connaître la peine que les juges de La Haye prononceront contre l’ancien chef islamiste. Un moment crucial avant d’espérer enfin pouvoir tourner une des pages les plus sombres de l’histoire de la légendaire cité des 333 saints.