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Afghans Rapatriés : Proie des Groupes Armés ?

Des millions d’Afghans rapatriés sombrent dans la pauvreté. Vont-ils devenir la proie des groupes armés comme l’EI-K ? Une menace plane sur l’Europe...

Imaginez des millions de personnes, chassées de leur refuge, contraintes de retourner dans un pays où la pauvreté et le désespoir règnent en maîtres. C’est la réalité des Afghans rapatriés d’Iran et du Pakistan, confrontés à un avenir incertain. Parmi eux, beaucoup de jeunes, sans emploi ni perspectives, pourraient devenir une cible facile pour des groupes armés en quête de nouvelles recrues. Cette situation, alarmante pour les experts, soulève une question brûlante : l’Afghanistan, déjà fragile, est-il en train de devenir un vivier pour le terrorisme ?

Une Crise Migratoire aux Conséquences Explosives

Depuis la prise de pouvoir des talibans en août 2021, l’Afghanistan traverse une crise humanitaire sans précédent. À cela s’ajoute un défi majeur : le retour massif de millions d’Afghans expulsés des pays voisins. Selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), environ 2,6 millions de personnes ont regagné le pays depuis janvier 2025, un chiffre qui pourrait atteindre quatre millions d’ici la fin de l’année. Ces rapatriés, souvent jeunes et sans ressources, se retrouvent dans un pays où près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Ce retour en masse est loin d’être un simple mouvement migratoire. Il pourrait avoir des répercussions sécuritaires majeures, non seulement pour l’Afghanistan, mais aussi pour la région et au-delà. Les experts craignent que cette population vulnérable, sans accès à l’emploi ni aux services de base, ne devienne une proie idéale pour des groupes armés, notamment la branche régionale de l’État islamique (EI-K) et les talibans pakistanais.

Pourquoi les Rapatriés Sont-Ils Vulnérables ?

Les conditions de vie des rapatriés sont dramatiques. À leur arrivée, ils font face à des obstacles colossaux : absence de logement, chômage endémique et accès limité aux services essentiels comme la santé ou l’éducation. Selon un coordinateur humanitaire des Nations unies, ces défis rendent les migrants particulièrement vulnérables à l’exploitation par des groupes armés.

“Ils sont confrontés à des défis énormes, sans accès à l’emploi, au logement ou aux services de base. Cela peut les rendre vulnérables, notamment vis-à-vis de groupes armés voulant les exploiter.”

Indrika Ratwatte, coordinateur humanitaire de l’ONU

La situation économique en Afghanistan aggrave cette précarité. Avec un taux de chômage de près de 25 % chez les 15-29 ans et une pauvreté touchant près de la moitié des 48 millions d’habitants, les perspectives d’avenir sont quasi inexistantes. Pour beaucoup, rejoindre un groupe armé peut sembler être une solution, non pas par conviction idéologique, mais par pure nécessité économique.

Quand la pauvreté devient un moteur de recrutement, le désespoir se transforme en arme.

L’EI-K : Une Menace en Pleine Régénération

La branche régionale de l’État islamique, connue sous le nom d’EI-K, représente aujourd’hui l’une des menaces les plus sérieuses en Afghanistan. Avec environ 2 000 combattants, ce groupe a déjà revendiqué des attaques meurtrières, comme celle de 2024 près de Moscou, qui a fait 149 morts, ou encore l’attentat de Kerman en Iran. Depuis 2021, l’EI-K a su tirer parti du mécontentement de certains talibans et de la frustration des Afghans exclus du nouveau régime pour gonfler ses rangs.

Les experts s’inquiètent d’une possible régénération de l’EI-K à court et moyen terme. Les millions de rapatriés, souvent jeunes et sans attaches, constituent un réservoir potentiel pour le recrutement. Un spécialiste de l’ONG Counter Extremism Project souligne que ces migrants, en quête d’un avenir, pourraient être séduits par les promesses de pouvoir ou de stabilité offertes par ces groupes.

“Il y a un grand risque que l’EI-K considère les millions de migrants afghans comme un vivier de recrutement.”

Hans-Jakob Schindler, directeur de Counter Extremism Project

Outre l’EI-K, d’autres groupes, comme les talibans pakistanais, estimés à 6 000 combattants, profitent également de l’instabilité pour renforcer leur influence. Ces organisations exploitent non seulement la misère, mais aussi le sentiment d’aliénation des rapatriés, souvent perçus comme des étrangers dans leur propre pays.

Un Sentiment d’Exclusion qui Alimente la Radicalisation

Pour beaucoup de rapatriés, le retour en Afghanistan est un choc. Nombre d’entre eux, nés ou ayant grandi au Pakistan ou en Iran, n’ont aucun lien avec leur pays d’origine. Considérés comme des outsiders, ils peinent à s’intégrer dans une société déjà fracturée. Ce sentiment d’exclusion, combiné à la pauvreté, crée un terrain fertile pour la radicalisation.

Une experte pakistanaise explique que ces groupes armés savent exploiter ce ressentiment. En offrant un sentiment d’appartenance, une identité ou même une rémunération, ils attirent des jeunes désœuvrés. Ce phénomène est d’autant plus préoccupant que les autorités talibanes, malgré leurs déclarations, semblent incapables – ou peu enclines – à soutenir ces populations.

  • Pauvreté extrême : Près de 50 % des Afghans vivent sous le seuil de pauvreté.
  • Chômage des jeunes : Environ 25 % des 15-29 ans sont sans emploi.
  • Exclusion sociale : Les rapatriés, souvent nés à l’étranger, se sentent étrangers en Afghanistan.
  • Recrutement ciblé : Les groupes armés exploitent le désespoir et le ressentiment.

Une Menace qui Dépasse les Frontières

La situation en Afghanistan ne concerne pas seulement la région. L’Europe, en particulier, craint les répercussions de cette crise. Plusieurs attentats déjoués entre 2023 et 2025 en Europe ont été liés à l’EI-K, ce qui renforce les inquiétudes. Une source diplomatique européenne évoque une véritable bombe à retardement pour le continent.

La Russie, qui entretient des relations avec le gouvernement taliban, partage ces préoccupations. Selon des responsables russes, l’Afghanistan abrite environ 23 000 combattants appartenant à une vingtaine d’organisations différentes. Les camps d’entraînement de l’EI-K, situés principalement dans l’est et le nord du pays, sont particulièrement redoutés.

Groupe Armé Nombre Estimé de Combattants Menace Principale
EI-K 2 000 Attentats internationaux
Talibans Pakistanais 6 000 Instabilité régionale

Quelles Solutions pour Éviter le Pire ?

Face à cette crise, les solutions semblent limitées. Les autorités talibanes, déjà débordées, manquent de ressources et de volonté pour intégrer les rapatriés. De leur côté, les organisations humanitaires, confrontées à une réduction drastique des financements internationaux, peinent à répondre aux besoins. Depuis janvier 2025, l’aide étrangère, notamment américaine, a fortement diminué, plongeant le secteur humanitaire dans une crise sans précédent.

Pour enrayer le risque de radicalisation, les experts s’accordent sur un point : il faut offrir un avenir digne aux rapatriés. Cela passe par des investissements massifs dans l’emploi, le logement et l’éducation. Cependant, sans un soutien international renouvelé, ces efforts risquent de rester lettre morte.

“Seul moyen d’enrayer ces recrutements : construire un futur digne pour les migrants grâce à l’aide étrangère.”

Indrika Ratwatte, coordinateur humanitaire de l’ONU

En attendant, l’Afghanistan reste un terrain miné, où la pauvreté et l’exclusion pourraient alimenter une nouvelle vague de violence. La communauté internationale, bien que consciente des enjeux, semble hésiter à agir. Pourtant, l’inaction pourrait avoir des conséquences dramatiques, non seulement pour l’Afghanistan, mais pour le monde entier.

L’Afghanistan, à la croisée des chemins, pourrait devenir le théâtre d’une nouvelle tragédie si rien n’est fait.

La situation des rapatriés afghans est un défi complexe, mêlant crise humanitaire, insécurité et instabilité régionale. Si les conditions ne s’améliorent pas, le risque de voir ces populations basculer dans les rangs des groupes armés est bien réel. La communauté internationale doit agir vite pour éviter que l’Afghanistan ne devienne, une fois de plus, un foyer de tensions mondiales.

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