Imaginez vivre dans une obscurité quasi totale, où le simple fait d’allumer une lampe devient un luxe. À Gaza, cette réalité dure depuis dix-sept mois, une éternité pour une population déjà éprouvée par des années de conflits. Entre destructions massives et décisions politiques, l’électricité est devenue un mirage, plongeant 2,4 millions d’habitants dans une lutte quotidienne pour la survie.
Une Crise Électrique Sans Précédent
Depuis le 7 octobre 2023, date d’une attaque majeure ayant marqué le début d’un nouveau chapitre de violence, le courant a pratiquement disparu de Gaza. Quelques jours plus tard, les lignes à haute tension reliant le territoire à Israël ont été coupées, ne laissant qu’un mince filet d’espoir avec une seule ligne réalimentée en novembre 2024 pour une station de dessalement d’eau. Mais pour le reste, c’est le néant.
Un Réseau Dévasté par la Guerre
Quinze mois de combats ont laissé des cicatrices profondes sur l’infrastructure électrique. Pylônes abattus, câbles réduits à l’état de débris, transformateurs pulvérisés : le réseau est en ruines. Selon un responsable anonyme de la compagnie locale, près de 70 % des installations ont été annihilées par les frappes. Une situation qui rend toute tentative de restauration quasi impossible dans l’immédiat.
« Couper l’électricité ne fait qu’aggraver nos souffrances. »
– Une habitante réfugiée dans une école
Pour les habitants, cette annonce récente de couper un approvisionnement déjà inexistant sonne comme une plaisanterie amère. Un enseignant de 40 ans ironise : « Quelle électricité veulent-ils couper ? Il n’y en a plus depuis longtemps. » Pourtant, derrière cette dérision se cache une détresse bien réelle.
L’Eau, Nouvelle Victime de la Pénurie
Si l’électricité manque, ses conséquences se répercutent partout, notamment sur l’accès à l’eau potable. Une station de dessalement, alimentée sporadiquement par des panneaux solaires, tente de fournir de l’eau à environ 600 000 personnes. Mais sans courant stable, la population doit se rabattre sur des puits contaminés par une salinité élevée ou sur des livraisons humanitaires, elles-mêmes bloquées depuis début mars.
- Puits contaminés : une eau salée, souvent impropre à la consommation.
- Livraisons d’ONG : rares et insuffisantes face à l’ampleur des besoins.
- Panneaux solaires : une solution limitée, incapable de tout compenser.
D’après une source onusienne, cette dépendance accrue à des alternatives fragiles expose la population à des risques sanitaires majeurs. Chaque goutte d’eau devient un trésor disputé dans un territoire où tout manque.
Une Décision Politique Controversée
À la veille de négociations pour une trêve, la décision israélienne de suspendre officiellement l’approvisionnement électrique a ravivé les tensions. Le ministre de l’Énergie a présenté cela comme un levier pour faire plier le Hamas, mais sur place, beaucoup y voient un chantage inutile. Les humanitaires, eux, dénoncent une mesure qui frappe avant tout les civils.
Le Hamas, de son côté, a qualifié cette stratégie de mesquine, pointant du doigt le blocage des aides humanitaires comme une pression supplémentaire. Entre ces déclarations croisées, les habitants assistent, impuissants, à un jeu politique qui les dépasse.
Survivre dans l’Obscurité
La nuit, Gaza s’enfonce dans un noir presque absolu. Seules quelques lueurs vacillantes percent l’obscurité, issues de LED bon marché alimentées par des générateurs ou des batteries. Une femme de 35 ans, déplacée dans une école, raconte laver les vêtements de ses enfants une fois par semaine, faute d’énergie pour faire plus.
Un quotidien bouleversé : pas de lumière, pas de chauffage, pas de machines. La vie à Gaza ressemble à un retour forcé au passé.
Pour beaucoup, les générateurs publics sont devenus une bouée de secours. Bruyants et coûteux, ils permettent à un charpentier de faire tourner ses outils quelques minutes par jour. Mais à quel prix ? Le carburant, rare et cher, creuse encore davantage les maigres économies des familles.
Des Solutions de Fortune
Face à cette pénurie, les habitants rivalisent d’ingéniosité. Certains cuisinent au feu de bois, renouant avec des pratiques d’un autre temps. « On est revenus cinquante ans en arrière », confie un quadragénaire. D’autres investissent dans des panneaux solaires, vendus à prix d’or – près de 2 000 euros – une somme astronomique dans un territoire exsangue.
Solution | Coût | Efficacité |
Générateurs | Élevé (carburant) | Moyenne |
Panneaux solaires | Très élevé | Limitée |
Feu de bois | Faible | Basique |
Dans les rues, des vendeurs ambulants proposent de recharger les téléphones pour quelques pièces, une aubaine pour rester connecté dans un monde coupé de tout. Ces initiatives, aussi modestes soient-elles, témoignent d’une résilience hors du commun.
Un Avenir Incertain
Alors que les négociations à Doha s’annoncent tendues, la population de Gaza reste suspendue à des décisions qui échappent à son contrôle. L’électricité, bien plus qu’un confort, est une question de survie dans un territoire où 60 % des bâtiments sont en ruines, selon les Nations unies. Chaque jour sans courant repousse un peu plus les limites de l’endurance humaine.
Pourtant, au milieu de ce chaos, des étincelles d’espoir subsistent. Les panneaux solaires, les générateurs, les petites astuces du quotidien : autant de preuves que les habitants refusent de capituler. Mais jusqu’à quand tiendront-ils ? La réponse, comme l’électricité, reste hors de portée.