Dans un contexte géopolitique tendu, le Royaume-Uni vient de franchir un cap décisif pour maintenir sa force de dissuasion nucléaire en mer. Londres a en effet annoncé la signature d’un contrat colossal de 9 milliards de livres avec le motoriste Rolls-Royce, portant sur la conception et la fabrication des réacteurs nucléaires qui équiperont les futurs sous-marins de la Royal Navy pour les décennies à venir.
Un accord crucial pour la souveraineté britannique
Ce méga-contrat baptisé « Unity » engage Rolls-Royce et le ministère de la Défense britannique pour les 8 prochaines années au moins. Au-delà de sa portée financière, il revêt une importance stratégique majeure pour le pays :
- Il permet de sécuriser l’approvisionnement en réacteurs nucléaires, composants ultrasensibles et essentiels des sous-marins lanceurs d’engins (SNLE), clé de voûte de la dissuasion britannique.
- Il renforce l’autonomie stratégique du Royaume-Uni en garantissant que ces équipements critiques seront conçus et fabriqués sur le sol national par un fleuron industriel britannique.
- Il contribue au maintien de haute technologies et de milliers d’emplois hautement qualifiés dans le secteur de la défense, avec à la clé la création de 1000 postes supplémentaires.
Pour Steve Carlier, président de Rolls-Royce Submarines, ce contrat « confirme l’engagement du Royaume-Uni dans l’entreprise nucléaire de défense ». Un engagement jugé crucial alors que le pays doit composer avec le Brexit et un environnement international volatil.
Tenir son rang sur l’échiquier mondial
En investissant massivement dans ses capacités sous-marines, le Royaume-Uni entend réaffirmer avec force son statut de puissance nucléaire et son attachement indéfectible à l’OTAN, alliance au sein de laquelle seuls les Britanniques et les Américains disposent d’une composante océanique.
Cet accord démontre clairement l’engagement du Royaume-Uni envers la dissuasion nucléaire, ultime police d’assurance dans un monde toujours plus dangereux.
John Healey, ministre britannique de la Défense
Un message on ne peut plus clair adressé tant aux alliés qu’aux rivaux potentiels, alors que les tensions s’exacerbent de la Mer de Chine à l’Atlantique Nord en passant par la Méditerranée et la Mer Noire. Face à l’expansionnisme militaire russe et chinois notamment, l’arme sous-marine apparaît comme un atout précieux.
Course à l’armement naval et enjeux technologiques
Au-delà du seul Royaume-Uni, ce contrat illustre une tendance lourde à l’échelle mondiale : de nombreuses puissances investissent actuellement des sommes considérables dans leurs flottes de sous-marins d’attaque ou lanceurs d’engins. Les États-Unis, la Russie, la Chine mais aussi l’Inde ou la France accélèrent leurs programmes.
Cette course à l’armement sous-marin s’accompagne d’une compétition technologique féroce. Furtivité acoustique, automatisation, intelligence artificielle, technologies de l’information… Les innovations s’enchaînent pour concevoir des submersibles toujours plus performants et redoutables.
Dans ce contexte, maîtriser en propre les technologies les plus sensibles comme la propulsion nucléaire devient un impératif stratégique. C’est tout l’enjeu du partenariat noué entre Rolls-Royce et la Royal Navy, qui vise à préserver le savoir-faire britannique tout en poussant plus loin l’innovation.
Des défis industriels et budgétaires à relever
Malgré son importance, ce contrat ne sera pas sans poser de sérieux défis au Royaume-Uni. Sur le plan industriel, Rolls-Royce devra répondre à un cahier des charges extrêmement exigeant en termes de performances, de fiabilité et de sûreté, avec une pression calendaire forte.
L’enjeu sera de tenir les délais et les coûts, dans un contexte de gestion de projets complexes, comme en témoignent les déboires rencontrés par le programme de sous-marins nucléaires d’attaque de classe Astute. Retards et dérapages budgétaires avaient émaillé ce projet phare de la marine britannique.
Sur le plan financier aussi, l’équation s’annonce compliquée pour Londres. Avec un budget de défense déjà sous tension, le gouvernement devra consentir un effort conséquent sur la durée pour honorer ce contrat et financer l’indispensable modernisation de sa flotte sous-marine.
Il devra pour cela convaincre les parlementaires et l’opinion publique britanniques du bien-fondé de cet investissement, à l’heure où des urgences économiques et sociales pressantes se profilent suite au Brexit et à la crise du Covid-19.
Un choix assumé, des questions en suspens
En dépit de ces écueils, le gouvernement britannique assume pleinement ce contrat. Il s’agit pour lui d’un choix structurant, qui engage le pays sur le temps long et dessine les contours de sa politique de défense pour le XXIe siècle.
Reste à savoir si cet effort sera suffisant pour permettre au Royaume-Uni de tenir son rang et de peser face aux autres grands acteurs du domaine sous-marin. L’avenir nous dira aussi si Londres parviendra, au-delà des réacteurs, à conserver une maîtrise souveraine des autres briques technologiques critiques comme les missiles mer-sol.
Autant de questions qui animeront sans nul doute les débats futurs sur la doctrine de dissuasion britannique, et plus largement sur le rôle du pays comme puissance militaire et diplomatique dans le monde de l’après-Brexit. Le contrat Rolls-Royce apparaît en tout cas comme une première pièce décisive et lourde de sens sur un complexe échiquier stratégique.
L’enjeu sera de tenir les délais et les coûts, dans un contexte de gestion de projets complexes, comme en témoignent les déboires rencontrés par le programme de sous-marins nucléaires d’attaque de classe Astute. Retards et dérapages budgétaires avaient émaillé ce projet phare de la marine britannique.
Sur le plan financier aussi, l’équation s’annonce compliquée pour Londres. Avec un budget de défense déjà sous tension, le gouvernement devra consentir un effort conséquent sur la durée pour honorer ce contrat et financer l’indispensable modernisation de sa flotte sous-marine.
Il devra pour cela convaincre les parlementaires et l’opinion publique britanniques du bien-fondé de cet investissement, à l’heure où des urgences économiques et sociales pressantes se profilent suite au Brexit et à la crise du Covid-19.
Un choix assumé, des questions en suspens
En dépit de ces écueils, le gouvernement britannique assume pleinement ce contrat. Il s’agit pour lui d’un choix structurant, qui engage le pays sur le temps long et dessine les contours de sa politique de défense pour le XXIe siècle.
Reste à savoir si cet effort sera suffisant pour permettre au Royaume-Uni de tenir son rang et de peser face aux autres grands acteurs du domaine sous-marin. L’avenir nous dira aussi si Londres parviendra, au-delà des réacteurs, à conserver une maîtrise souveraine des autres briques technologiques critiques comme les missiles mer-sol.
Autant de questions qui animeront sans nul doute les débats futurs sur la doctrine de dissuasion britannique, et plus largement sur le rôle du pays comme puissance militaire et diplomatique dans le monde de l’après-Brexit. Le contrat Rolls-Royce apparaît en tout cas comme une première pièce décisive et lourde de sens sur un complexe échiquier stratégique.