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Attaque à Charlie Hebdo : La Défense Plaide le Conditionnement Religieux

Au procès de l'attaque à Charlie Hebdo en 2020, la défense plaide le conditionnement religieux de l'assaillant. Son avocat revient sur le contexte de l'attaque et tente d'expliquer le geste par l'enfermement communautaire de son client. Le verdict est attendu...

Le procès de l’attaque au hachoir visant Charlie Hebdo en septembre 2020 touche à sa fin. Mercredi, c’était au tour de la défense de plaider pour tenter d’expliquer le geste de l’assaillant, un jeune pakistanais arrivé clandestinement en France deux ans plus tôt. Son avocat, Maître Albéric de Gayardon, a cherché à mettre en lumière le conditionnement culturel et religieux de son client.

D’emblée, l’avocat a tenu à rappeler la gravité des faits : « Chacun des coups portés visait à tuer ». L’assaillant lui-même a reconnu à plusieurs reprises pendant le procès son intention homicide. La question n’était donc pas de nier sa culpabilité, mais d’essayer d’en comprendre les ressorts pour éventuellement infléchir la lourde peine de 30 ans de prison assortie d’une période de sûreté des deux tiers, requise la veille par l’accusation.

Un homme encore ancré dans son Pakistan natal

Pour ce faire, la défense est revenue sur le contexte ayant précédé l’attaque : la republication par Charlie Hebdo début septembre 2020 des caricatures de Mahomet, à l’occasion de l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015. Un événement qui a suscité « une vague de colère, des manifestations monstres » au Pakistan, pays d’origine de l’accusé, où le blasphème est passible de la peine de mort.

Bien qu’installé en France depuis deux ans au moment des faits, l’assaillant serait resté profondément ancré dans sa culture d’origine. « Il est en France physiquement, mais dans sa tête, il est au Pakistan. Il ne parle pas français, il vit en colocation avec des Pakistanais, il travaille pour des Pakistanais », a souligné son avocat, évoquant « une bulle d’enfermement communautaire ».

Dans sa tête il n’a jamais quitté le Pakistan.

Maître Albéric de Gayardon, avocat de la défense

Un homme ignare de la culture française

Dans ce contexte, d’après la défense, l’accusé n’aurait eu aucune notion des valeurs et de la culture françaises. « Que sait-il de la liberté d’expression ? Que sait-il du rire salvateur de Charb et de Cabu ? », s’est interrogé l’avocat, en référence aux dessinateurs de Charlie Hebdo assassinés en 2015. « Rien, il ne comprend rien », a-t-il aussitôt répondu.

Loin d’excuser son geste, la défense a cherché à le replacer dans le cadre de référence de l’accusé : celui d’un jeune homme issu d’un milieu rural pakistanais très religieux, où le blasphème est puni de mort. Arrivé clandestinement en France, il aurait agi comme il l’aurait fait dans son pays : en châtiant ceux qu’il considérait comme des blasphémateurs.

Une radicalisation express sur les réseaux sociaux

Au cours du procès, l’accusé est revenu sur le choc culturel ressenti à son arrivée en France. C’est sur le réseau social TikTok qu’il se serait pris de passion pour les prêches d’un imam radical pakistanais prônant la décapitation en cas de blasphème. Des contenus qui auraient achevé de le conditionner et de le pousser à l’acte.

« Aujourd’hui je reconnais que ce que j’ai fait est un acte de terrorisme », a déclaré l’accusé pendant les débats, admettant qu’à l’époque il pensait « faire le bien pour l’islam ». Une prise de conscience tardive qui, selon son avocat, témoigne de son « enclavement » initial plus que d’une appartenance à « une nébuleuse terroriste ».

Épilogue imminent pour un procès hors norme

Après ces ultimes plaidoiries, l’accusé aura une dernière occasion de s’exprimer devant la cour d’assises spéciale des mineurs ce jeudi. Les juges se retireront ensuite pour délibérer et rendre leur verdict, mettant un terme à ce procès hors norme qui a replongé la France dans le souvenir douloureux des attentats de Charlie Hebdo.

Le 25 septembre 2020, armé d’un hachoir, le jeune pakistanais s’était rendu devant les anciens locaux de Charlie Hebdo avec l’intention de s’en prendre aux journalistes de l’hebdomadaire satirique. Il avait finalement attaqué deux employés de l’agence de presse Premières Lignes, les blessant grièvement, les prenant pour des salariés du journal.

Un acte qui, selon son avocat, s’inscrit dans le conditionnement culturel et religieux d’un jeune homme encore profondément ancré dans son Pakistan natal, plus que dans une quelconque organisation terroriste. Il appartient désormais à la cour d’en juger, en son âme et conscience.

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