En ce dimanche matin, un vent d’espoir souffle sur la bande de Gaza. Après 15 mois d’une guerre dévastatrice qui a fait des dizaines de milliers de morts et laissé le territoire palestinien en ruines, un accord de trêve durement négocié doit enfin entrer en vigueur. Une lueur d’espérance pour une population meurtrie, mais aussi de nombreuses questions sur l’avenir de ce conflit qui perdure depuis des décennies.
Un cessez-le-feu et des libérations attendues
C’est à 08H30 heure locale que le cessez-le-feu doit officiellement débuter, après de longs mois de médiations internationales menées par le Qatar, l’Egypte et les Etats-Unis. L’accord prévoit dans un premier temps une cessation des hostilités et un échange de prisonniers : 33 otages retenus à Gaza contre 737 détenus palestiniens côté israélien.
Parmi les otages dont la libération est espérée dès ce dimanche, on compte trois femmes israéliennes ainsi que deux Franco-Israéliens, Ofer Kalderon et Ohad Yahalomi, enlevés en octobre 2023 lors de l’attaque sans précédent du Hamas contre Israël qui avait déclenché cette guerre. « C’est le moment que nous attendions. J’espère vraiment que nous verrons mon grand-père rentrer à la maison, debout, vivant », confie avec émotion Daniel Lifshitz, petit-fils d’Oded Lifshitz, 84 ans, lui aussi retenu en otage.
Gaza meurtrie espère se reconstruire
Pour les 2,4 millions de Palestiniens de la bande de Gaza, dont la grande majorité a été déplacée par les combats, l’heure est à un retour incertain chez eux. « Je vais retirer les gravats de la maison et placer ma tente là », témoigne Oum Khalil Bakr, réfugiée à Nousseirat. Beaucoup « trouveront leur quartier entier détruit » sans aucun service essentiel, prévient Mohamed Khatib de l’ONG Medical Aid for Palestine.
Selon l’ONU, cette guerre a provoqué un niveau de destructions « sans précédent » à Gaza, déjà minée par la pauvreté, le chômage et un blocus israélien depuis 2007. Les pertes humaines sont immenses : plus de 46 000 Palestiniens tués, en majorité des civils, et 1200 côté israélien. « La souffrance va continuer mais au moins il y a un espoir », résume Mohamed Khatib.
Un processus de paix en trois phases
Au-delà du cessez-le-feu immédiat, l’accord de trêve s’articule en trois étapes. La première, étalée sur six semaines, comprend outre l’échange de prisonniers un retrait israélien des zones densément peuplées de Gaza et une augmentation de l’aide humanitaire. La deuxième phase doit permettre la libération des derniers otages, avant une ultime étape consacrée à la reconstruction de Gaza et à la restitution des corps des captifs décédés.
Mais de nombreux défis demeurent. L’accord laisse notamment en suspens la question cruciale de l’avenir politique de Gaza, où le Hamas islamiste a pris le pouvoir en 2007. L’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas se dit prête à y « assumer pleinement ses responsabilités », mais le rapport de force reste incertain.
Quel avenir pour le processus de paix ?
Autre inconnue : l’implication de la nouvelle administration américaine de Donald Trump, qui prend ses fonctions lundi. Son prédécesseur Joe Biden, artisan de cet accord, y voit « un cessez-le-feu total » et une étape importante vers une « fin définitive du conflit ». Mais le chemin sera long pour transformer cette trêve précaire en une paix durable.
Car si l’objectif affiché par le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou d’anéantir le Hamas n’est pas atteint, le mouvement islamiste sort considérablement affaibli de ce conflit, sans pour autant avoir dit son dernier mot. La reconstruction de Gaza, les tensions persistantes et la question palestinienne dans son ensemble restent autant de défis à relever pour l’avenir.
Des vies brisées, un espoir fragile
En attendant, pour les familles des otages comme pour les habitants de Gaza, l’heure est à un soulagement mêlé d’appréhension. Après tant de morts et de destructions, chacun espère retrouver un semblant de vie normale. Mais dans ce conflit qui n’en finit pas, combien de temps durera cette accalmie ? L’accord de trêve à lui seul ne pourra effacer les cicatrices d’une guerre qui a ravagé tant de vies.
« Je sais que mon fils Ahmed ne reviendra pas, confie Samira en essuyant ses larmes. Il est mort sous les bombes avec sa femme et leurs trois enfants. Mais si cette trêve peut éviter à d’autres de connaître un tel drame, alors peut-être que leur sacrifice n’aura pas été vain. » Un espoir partagé par des milliers de familles brisées, pour qui la paix, même fragile, n’a pas de prix.
Les prochains jours seront décisifs pour juger de la solidité de cet accord. Mais au-delà de la trêve, c’est un véritable processus de paix qu’il faudra construire pour sortir enfin de ce cycle infernal de violence. Un défi immense, à la hauteur des souffrances endurées par les populations. L’espoir, lui, reste intact : celui qu’un jour, Israéliens et Palestiniens puissent vivre côte à côte en paix, dans le respect mutuel de leurs droits et de leur dignité. Un rêve encore lointain, mais que cet accord fragile permet d’entrevoir.