Le géant suisse Nestlé traverse une zone de turbulences en France. Sa filiale Nestlé Waters, propriétaire de l’iconique marque d’eau minérale Perrier, fait face à une pression croissante des autorités sanitaires concernant son site de production de Vergèze dans le Gard. Au cœur du problème : l’usage passé de traitements de désinfection interdits et la découverte de contaminations bactériennes dans ses forages.
Une invitation à reconsidérer l’usage du site
Dans un rapport daté d’août, l’Agence Régionale de Santé (ARS) d’Occitanie n’a pas mâché ses mots. Jugeant les contaminations « inacceptables pour une eau minérale naturelle », elle a invité Nestlé Waters à envisager « un autre usage alimentaire » de ses captages actuels. Une suggestion lourde de sens pour le site historique de Perrier, fleuron du patrimoine français racheté par Nestlé en 1992.
Les contaminations bactériennes, bien que ponctuelles, sont inacceptables pour une eau minérale naturelle.
– Extrait du rapport de l’ARS d’Occitanie
La fin des traitements controversés
L’ARS a néanmoins constaté l’arrêt de certains traitements non autorisés comme les lampes UV et les filtres à charbon sur le site de Vergèze. Mais elle émet des réserves sur la microfiltration, dont l’effet désinfectant serait avéré malgré l’assouplissement réglementaire accordé par le gouvernement en 2023. Le spectre d’un « risque virologique » plane, les microfiltres n’ayant pas d’effet sur les virus selon le rapport.
Nestlé Waters se défend
Face à ces accusations, Nestlé Waters assure opérer « conformément au cadre fixé par les autorités et sous leur contrôle », sans commenter davantage le rapport avant sa version finale. L’entreprise avait avoué en 2021 avoir eu recours à des traitements interdits, ce qui avait conduit à un assouplissement discret de la réglementation par le gouvernement, sans informer les consommateurs.
Un rapport « accablant » pour Nestlé et les autorités
Pour le sénateur Alexandre Ouizille, rapporteur de la commission d’enquête sur les pratiques des industriels de l’eau en bouteille, ce rapport est « accablant » tant pour Nestlé Waters que pour les autorités. Il met en lumière les zones d’ombre entourant la production d’une eau minérale parmi les plus consommées en France.
L’avenir incertain de Perrier
Au-delà des questions sanitaires, c’est l’avenir même de Perrier qui semble en jeu. Si Nestlé Waters venait à suivre la recommandation de l’ARS de réorienter l’usage de son site, cela signerait la fin d’une époque pour cette eau pétillante mondialement connue. Une petite révolution pour le marché français de l’eau en bouteille, dont Nestlé Waters est un acteur majeur avec près de 30% de parts de marché.
Nestlé jouera-t-il la carte de la diversification en explorant d’autres usages alimentaires pour son site historique ? Ou tentera-t-il de redorer le blason de Perrier en renforçant ses contrôles qualité ? Une chose est sûre, le géant suisse n’a pas fini de faire couler de l’encre dans l’Hexagone. L’eau minérale, produit sanitaire sensible, cristallise les attentes des consommateurs en matière de transparence et de sécurité alimentaire. Un défi de taille pour Nestlé, qui devra regagner la confiance ébranlée du public français, friand de son eau pétillante mais vigilant sur sa qualité irréprochable.
L’issue de ce bras de fer entre le géant agroalimentaire et les autorités de santé sera scrutée de près. Au-delà du sort de Perrier, c’est toute la filière de l’eau en bouteille qui pourrait être impactée, incitée à renforcer ses pratiques pour préserver ce produit du terroir au statut d’exception. Les prochains mois s’annoncent décisifs pour Nestlé Waters, qui devra naviguer en eaux troubles pour écrire une nouvelle page de la saga Perrier. Le public, lui, espère une issue préservant ce patrimoine national, sans compromis sur la sécurité sanitaire. L’heure des choix stratégiques a sonné pour Nestlé.