Un projet controversé et économiquement dévastateur. C’est ainsi que des experts décrivent le plan de Donald Trump d’expulser massivement 13 millions d’immigrants clandestins dès son retour au pouvoir. Selon leurs estimations, une telle opération coûterait près de 1000 milliards de dollars et amputer le PIB américain de 4 à 7%, un choc comparable à la crise financière de 2008. Le futur président veut pourtant utiliser l’armée pour mener à bien son programme radical dès janvier.
Tous les secteurs économiques seraient touchés
Avec 13 millions de personnes concernées, soit près de 4% de la population, c’est toute la société américaine qui subirait de plein fouet ces expulsions record. Comme l’a souligné Aaron Reichlin-Melnick de l’American Immigration Council devant le Sénat, les conséquences sur l’économie seraient dévastatrices.
En effet, contrairement au discours simpliste de Trump, l’immense majorité des sans-papiers n’ont pas de casier judiciaire. Ils sont étudiants ou occupent des emplois essentiels dans la restauration, le bâtiment ou la garde d’enfants. Des secteurs en première ligne qui peineraient à compenser une telle perte de main d’œuvre.
L’agriculture en danger
Un autre secteur vital serait fragilisé : l’agriculture. D’après les estimations, environ 50% de la main d’œuvre agricole est sans-papiers. Des fermes entières risquent la faillite si leurs ouvriers sont expulsés. Cela entraînerait des perturbations majeures dans l’approvisionnement alimentaire et une flambée des prix pour le consommateur.
Tensions entre police et communautés immigrées
Au-delà de l’économie, c’est aussi la cohésion sociale qui serait mise à mal. Comme l’a expliqué Foday Turay, procureur à Philadelphie, lui-même immigré, le programme d’expulsions risque de briser la confiance entre les immigrés et les forces de l’ordre. Par peur de la déportation, les communautés n’oseront plus coopérer avec la police, ce qui nuira à la sécurité de tous.
En tant que procureur, je sais que les relations entre les forces de l’ordre et les immigrés peuvent être compliquées. Si les immigrés ont peur de coopérer avec la police ou les procureurs comme moi de peur d’être expulsés, on souffrira tous.
– Foday Turay, procureur adjoint à Philadelphie
Des militaires pas adaptés
Autre problème majeur soulevé par les experts : l’implication des militaires dans les expulsions. Selon un général à la retraite qui a témoigné, l’armée n’est ni formée ni équipée pour une telle tâche. Cela nuirait au moral des troupes qui n’ont pas vocation à traquer des civils.
Un débat qui divise
Face aux mises en garde des spécialistes et démocrates, des voix républicaines ont volé au secours du plan Trump. Des familles de victimes d’immigrés criminels ont livré des témoignages poignants, à l’instar de Patty Morin dont la fille a été violée et étranglée par un sans-papiers multirécidiviste.
En ce moment précis, je pense que les expulsions sont nécessaires. Les Américains ne doivent pas avoir peur de rester chez eux. Il faut qu’on applique les lois qui existent déjà, il faut qu’on ferme nos frontières. Il faut qu’on protège les familles américaines.
– Patty Morin, mère de Rachel, victime d’un meurtre par un immigré clandestin
Le sénateur républicain Lindsey Graham, proche de Trump, a lui pointé du doigt « la politique migratoire laxiste » de Joe Biden et mis en garde les clandestins : « Si vous êtes ici illégalement, préparez-vous à partir. Si vous êtes un criminel, on va venir vous chercher ».
Un débat passionné et clivant, à l’image d’une Amérique plus divisée que jamais sur l’épineuse question de l’immigration illégale. Avec en toile de fond, la perspective d’un choc économique et social majeur si Trump met ses menaces à exécution. Les démocrates et la société civile sauront-ils faire barrage à un projet jugé aussi radical que potentiellement destructeur ?
Réponse dans les mois à venir. Une chose est sûre, la question de l’immigration illégale s’annonce encore une fois comme l’un des dossiers les plus brûlants du prochain mandat présidentiel. Avec le risque d’enflammer un peu plus une Amérique déjà au bord de la surchauffe.