Le rugby français retient son souffle. Mercredi prochain, trois de ses joueurs devront rendre des comptes à Dublin devant la commission de discipline de l’EPCR, l’instance qui gère les compétitions européennes. En cause : des plaquages extrêmement dangereux et totalement prohibés, ayant entraîné pour l’un d’entre eux la commotion cérébrale d’un joueur adverse. De lourdes sanctions sont à prévoir.
Des gestes inacceptables sur les terrains
Les faits se sont déroulés lors de la première journée de la prestigieuse Champions Cup. Samedi, le deuxième ligne toulonnais Yannick Youyoutte a été expulsé à la 72e minute pour un violent plaquage sur l’ouvreur international sud-africain des Stormers Manie Libbok. Ce dernier, sévèrement commotionné, a dû être transporté à l’hôpital. Il en est ressorti quelques heures plus tard mais devra observer 12 jours de repos.
Le même jour, lors de la sévère défaite du Stade Français sur la pelouse du Munster (33-7), deux autres deuxième lignes parisiens se sont distingués par des gestes tout aussi condamnables. Pierre-Henri Azagoh, expulsé à la 49e minute après un plaquage à retardement sur l’international irlandais Peter O’Mahony. Puis Baptiste Pesenti, coupable quelques minutes plus tard d’un nouveau plaquage illégal sur le demi de mêlée Craig Casey, laissant ses coéquipiers terminer la rencontre à 13.
Un fléau pris très au sérieux
Ces trois cas ne sont malheureusement pas isolés. Depuis plusieurs années, World Rugby, la fédération internationale, a fait de la sécurité des joueurs une priorité absolue, notamment en durcissant les règles sur les contacts avec la tête. Plaquages hauts, charges à l’épaule, « têtes contre têtes »… Les commotions cérébrales sont devenues l’ennemi numéro un à éradiquer, au risque de mettre en péril l’avenir du rugby.
La santé des joueurs est notre priorité. Nous serons intraitables avec ceux qui mettent délibérément en danger l’intégrité physique de leurs adversaires
Un responsable de World Rugby
En France, la Ligue Nationale de Rugby a aussi renforcé son arsenal disciplinaire et multiplie les campagnes de prévention auprès des clubs. Depuis 2018, tout joueur victime d’une commotion sur un plaquage illégal entraîne automatiquement le carton rouge pour son agresseur. Et les sanctions peuvent aller jusqu’à plusieurs mois de suspension.
Des décisions très attendues
Pour les trois français, l’heure du jugement approche donc. Selon une source proche du dossier, « des suspensions de 6 à 10 semaines sont envisagées », en fonction de la gravité des cas et d’éventuels antécédents. Un coup dur pour le RCT et le Stade Français, qui devront composer sans ces joueurs cadres pour la suite de la saison.
Mais au-delà des cas individuels, c’est tout le rugby français et européen qui sera scruté mercredi. Dans un contexte de judiciarisation croissante du sport, la tolérance zéro est devenue la règle. Et la commission de l’EPCR voudra sûrement frapper un grand coup pour réaffirmer son autorité et adresser un message clair à tous les amateurs de jeu brutal : sur un terrain, on ne joue pas avec la santé des autres. Sous peine de le payer très cher.
Les leçons à retenir
- Le rugby doit continuer sa mue vers un jeu plus sûr et respectueux de l’intégrité physique
- Les instances disciplinaires auront un rôle crucial de sanction et de dissuasion
- Les joueurs doivent impérativement changer leurs habitudes sur les plaquages
- La pression médiatique et sociétale sur ces sujets ne faiblira pas
- C’est un enjeu de responsabilité collective, des école de rugby jusqu’au plus haut niveau
Une affaire à suivre de près donc. Avec l’espoir qu’elle serve de déclic pour que le rugby entre définitivement dans une nouvelle ère. Une ère où la sécurité primera sur la violence, l’intelligence de jeu sur la brutalité. Une ère où plaquages rimera enfin avec respect et fair-play. Il en va de la survie même de ce magnifique sport. Les décisions de mercredi constitueront un premier test.