La chute soudaine du régime de Bachar al-Assad en Syrie après 13 ans de guerre civile sanglante a pris le monde par surprise. Mais ce qui inquiète le plus les autorités françaises, c’est le sort d’une centaine de jihadistes français qui se trouvaient dans le fief rebelle d’Idleb juste avant la victoire éclair des insurgés.
Selon le procureur national antiterroriste Olivier Christen, ces combattants radicalisés, dont une cinquantaine serait issue de la brigade d’Omar Diaby et une trentaine affiliée au groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS) d’Abou Mohammad al-Jolani, représentent « la principale préoccupation » sécuritaire pour la France aujourd’hui. Leur localisation et leurs intentions après ce retournement de situation inattendu restent floues.
Un réseau tentaculaire de jihadistes français
Le magistrat a détaillé l’ampleur du phénomène des français partis faire le jihad au Moyen-Orient dans les années 2000. Sur environ 1500 individus concernés :
- 390 sont revenus en France
- 500 sont morts au combat
- Une grosse centaine se trouvait dans la poche d’Idleb
- Environ 150 sont détenus dans le nord-est syrien et en Irak
- 300 sont dans la nature
La disparition dans les limbes de centaines de ces profils à haut risque, possiblement aguerris au combat, soulève de sérieuses questions. Ont-ils pris part à l’offensive finale sur Damas ? Certains pourraient-ils chercher à rentrer en France ou en Europe pour y commettre des attentats ?
Les femmes, l’autre inconnue de l’équation
Au-delà des combattants, une trentaine de femmes françaises était aussi présente à Idleb selon le procureur. Même si leur degré de radicalisation et d’implication est variable, leur potentiel de nuisance ne doit pas être négligé comme l’ont montré certaines revenantes de Daesh par le passé.
Nous ne savons pas exactement combien de ces combattants ont participé à l’assaut de Damas et dans quelle proportion.
Olivier Christen, procureur national antiterroriste
Scènes de liesse et libération de prisonniers
Dès l’annonce de la chute de Bachar al-Assad dimanche après 24 ans de règne sans partage, des scènes de liesse ont éclaté dans les zones anciennement aux mains des rebelles. Des civils et des combattants ont déferlé vers les prisons pour libérer les nombreux détenus du régime honni.
Ce vent de liberté soudain pourrait cependant avoir permis à de dangereux criminels et terroristes de retrouver la clé des champs. Les services de renseignement français scrutent la situation de près, redoutant que des vétérans du jihad profitent du chaos ambiant pour se fondre dans la nature et échapper à leur radar.
Le casse-tête des revenants potentiels
Si certains de ces profils radicalisés venaient à vouloir regagner le territoire national, cela poserait un défi majeur aux autorités en termes de détection, d’interpellation et de prise en charge judiciaire. Des circuits de retour clandestins depuis la zone irako-syrienne existent et ont déjà été empruntés par le passé.
Selon une source sécuritaire contactée par notre rédaction, tous les scénarios sont sur la table et font l’objet d’une analyse de risque minutieuse. Les services antiterroristes sont en alerte maximale pour traquer la moindre velléité de retour et protéger la population d’une éventuelle menace.
Le démantèlement express du régime syrien rebat donc les cartes et ouvre une période d’incertitude sur le devenir de ces jihadistes français aguerris. Une seule certitude : ils seront suivis comme le lait sur le feu.