C’est une décision qui aurait pris de court le Premier ministre français Michel Barnier. Selon une source proche du gouvernement, la cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, s’apprêterait à voter la motion de censure déposée par la gauche ce mercredi soir, malgré les nombreuses concessions faites à son parti d’extrême droite ces derniers mois.
Cette annonce intervient alors que le Premier ministre de 73 ans a engagé lundi la responsabilité de l’exécutif en faisant adopter sans vote le budget de la Sécurité sociale via l’article 49.3, s’exposant ainsi à une possible motion de censure. Toutefois, M. Barnier avait assuré avoir été « au bout du dialogue » avec les différents groupes politiques.
Les confidences de Michel Barnier
Lors d’une réunion des chefs de groupe de la majorité lundi, pendant laquelle il les a informés de son intention d’utiliser le 49.3, Michel Barnier se serait absenté pour répondre à Marine Le Pen au téléphone. À son retour, il aurait confié, visiblement déçu : « Je ne croyais pas qu’elle oserait ». Le Premier ministre aurait alors réalisé qu’à « chaque fois qu’on lâche quelque chose, elle demande quelque chose d’autre » et qu’il « faut probablement s’arrêter à un moment ».
Les échanges avec Marine Le Pen
Selon son entourage, Michel Barnier avait déjà échangé le matin même avec la présidente du RN pour lui annoncer qu’il allait lui céder sur les baisses de remboursement des médicaments. L’après-midi, Marine Le Pen lui aurait réclamé en plus une indexation sur l’inflation d’une partie des pensions de retraite. Des demandes jugées excessives par le locataire de Matignon qui pensait avoir fait suffisamment de concessions.
Un vote lourd de conséquences
Si la motion de censure venait effectivement à être votée par le Rassemblement national aux côtés de la gauche, cela constituerait un véritable séisme politique. Le gouvernement serait alors renversé, ouvrant une période d’instabilité en pleine crise économique et sociale. Un scénario que redoute l’exécutif qui a multiplié ces dernières semaines les signaux d’ouverture envers le parti de Marine Le Pen.
Les projets de loi se sont enchaînés avec le soutien du RN ou son abstention bienveillante : réforme des retraites, projet de loi immigration, loi pouvoir d’achat, budget de l’État. En échange, le gouvernement a notamment cédé sur la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé, mesure phare du programme de Marine Le Pen.
– Un député de la majorité
Une stratégie payante pour le RN
En jouant ainsi au chat et à la souris avec le gouvernement, le Rassemblement national démontre son influence grandissante dans le jeu parlementaire depuis son arrivée massive à l’Assemblée nationale en juin dernier. Un positionnement central qui lui permet de peser sur les décisions majeures et d’imposer ses thématiques dans le débat public, comme l’immigration et la sécurité.
Reste à savoir si la formation d’extrême droite compte réellement mettre sa menace de censure à exécution, au risque d’apparaître comme un adversaire irréductible avec lequel il est vain de négocier. Réponse ce mercredi soir dans l’hémicycle, sous haute tension.