En cette fin d’année, l’ambiance est morose du côté de Strasbourg. Bien que les illuminations scintillent et que les effluves de vin chaud embaument l’air, c’est l’inquiétude qui règne dans les allées du célèbre marché de Noël. Commerçants comme visiteurs ne cachent pas leur affliction face à l’instabilité politique qui secoue le pays. Entre craintes d’une censure du gouvernement et d’un chaos budgétaire, beaucoup redoutent des mois difficiles à venir pour la France.
Une situation politique « lamentable »
Au pied du majestueux sapin qui trône place Kléber, Michèle, une septuagénaire parisienne, ne mâche pas ses mots. Pour elle, la situation politique est tout simplement « lamentable ». Son petit-fils Matteo, étudiant en sciences politiques, tempère : « Censurer, c’est une chose, mais derrière il faut proposer quelque chose de durable ». Il suggère de nommer une personnalité « technique » à Matignon si le gouvernement de Michel Barnier venait à tomber, tout en regrettant que ce climat délétère nourrisse la défiance des citoyens envers la classe politique.
Un sentiment partagé par Jean-Pierre, retraité de 78 ans : « On est la septième puissance mondiale et on a une instabilité politique depuis la dissolution, on n’a pas de budget et rien ne bouge… », déplore-t-il, très inquiet pour l’avenir des jeunes générations. Selon lui, l’image de la France est en train d’être sérieusement écornée sur la scène internationale.
L’appel à la raison
Face à cette « situation inextricable », Jean-Pierre en appelle aux responsables politiques de tous bords. « La solution serait qu’on ait des gens raisonnables, de tous bords politiques, qui mettent leur intérêt sous le mouchoir et se mettent d’accord pour mettre en place des mesures concrètes par rapport à la vie des Français« , plaide-t-il. Un point de vue partagé par Christine, vendeuse sur le marché, qui prône de « laisser une chance » au gouvernement en place, estimant qu’il ne peut « pas faire de miracles ».
La hantise d’une censure
Comme un écho aux mises en garde de la coalition de Michel Barnier, Christine s’alarme des conséquences catastrophiques qu’aurait une censure de l’exécutif. Pourtant, cette instabilité politique ne semble pas affecter le moral des consommateurs, à en croire les commerçants interrogés. « On fait du chiffre d’affaires, c’est une période très faste de l’année », se félicite la vendeuse d’accessoires.
Macron montré du doigt
Si les problèmes politiques passent au second plan pour beaucoup de visiteurs, français comme étrangers, certains n’hésitent pas à pointer du doigt le principal responsable de ce marasme : le président Emmanuel Macron. « Tout est de sa responsabilité. Il a voulu faire une dissolution, et on ne sait pas où ça va nous mener », accuse Emmanuel, confiseur de 51 ans. Lui qui juge la situation « un peu triste » ne voit aucune personnalité politique capable de « relever le pays ». Et de prédire, fataliste : « ça risque d’être difficile les prochains mois ».
Alors que l’examen des motions de censure approche à grands pas, c’est donc un parfum d’inquiétude et de résignation qui flotte au-dessus des chalets du marché de Noël. Dans ce contexte morose, les Français auront sans doute besoin de toute la magie de Noël pour garder espoir en l’avenir. Et peut-être aussi de croquer dans quelques douceurs réconfortantes, comme le suggère, philosophe, notre confiseur : « C’est fait pour ça ! »