Alors que le sujet brûlant des retraites revient sur le devant de la scène avec l’invitation de la ministre du Travail aux partenaires sociaux pour discuter d’aménagements, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) publie une étude éclairante. Ce rapport inédit analyse les effets de 40 ans de réformes des retraites, des années 70 à 2000, sur les inégalités de durée de vie passée à la retraite.
Focus sur les dernières générations parties à 60 ans
Pour mener cette étude, la Drees s’est penchée sur la mortalité des générations nées en 1950 ou avant, les dernières à avoir pu bénéficier d’un départ à la retraite à taux plein dès 60 ans. L’analyse de ces cohortes permet de mesurer précisément l’impact des différents ajustements des barèmes survenus au fil des décennies.
De plus en plus de retraités à taux plein dès 60 ans
Si l’âge légal de la retraite était fixé à 65 ans par l’ordonnance de 1945, les réformes successives ont progressivement ouvert la possibilité de partir plus tôt. Ainsi, la proportion de personnes pouvant liquider leur retraite à taux plein dès 60 ans a fortement augmenté au fil des générations étudiées.
Des inégalités de durée de retraite qui se creusent
Mais cette évolution ne profite pas à tous de la même manière. L’étude montre que les inégalités de durée de vie à la retraite se sont accentuées entre les catégories socioprofessionnelles et les niveaux de diplôme. Les cadres et les plus diplômés, qui liquident en moyenne leur retraite plus tard, bénéficient d’une espérance de vie plus longue une fois à la retraite.
Pour la génération 1950, un cadre pouvait ainsi espérer profiter de sa retraite pendant 26,5 ans en moyenne, contre seulement 19 ans pour un ouvrier non qualifié.
– Extrait du rapport de la Drees
L’âge d’entrée dans la vie active, un facteur clé
Les disparités s’observent également selon l’âge de début de carrière. Ceux qui ont commencé à travailler tôt, souvent dans des métiers plus pénibles physiquement, profitent moins longtemps de leur retraite malgré un départ plus précoce. A contrario, faire de longues études retarde l’âge de départ mais offre une retraite plus longue grâce à une meilleure espérance de vie.
Une problématique plus que jamais d’actualité
Alors que le gouvernement souhaite une nouvelle fois réformer notre système de retraite, ces constats rappellent l’importance de prendre en compte la question des inégalités face à l’espérance de vie. Si partir plus tard apparaît inéluctable vu l’allongement de la durée de vie, il est essentiel de corriger les disparités constatées pour rendre le système plus juste.
Quelques pistes évoquées iraient dans ce sens :
- Mieux prendre en compte la pénibilité et permettre des départs anticipés pour les carrières longues
- Intégrer des critères de mortalité différenciés dans le calcul des droits
- Jouer sur d’autres leviers que l’âge (niveau des pensions, durée de cotisation…)
Nul doute que ces questions seront au cœur des concertations à venir, afin de dessiner un système de retraite soutenable et plus équitable. Un défi majeur pour notre modèle social dans les années à venir.