En 2025, les lycéens d’Île-de-France seront confrontés à un projet pédagogique audacieux. Baptisé “Caricature et démocratie”, il vise à les sensibiliser à la liberté d’expression à travers l’étude de 12 caricatures controversées. Cette initiative, portée par la région, intervient 10 ans après l’attentat contre Charlie Hebdo et 120 ans après la loi de 1905 sur la laïcité. Elle ne manquera pas de susciter le débat.
Un kit pédagogique comprenant des caricatures polémiques
Le projet, qui sera mis à disposition des enseignants dès janvier 2025, se compose d’un kit pédagogique incluant 12 dessins de presse soigneusement sélectionnés. Parmi eux, on retrouve des caricatures touchant à des sujets sensibles comme l’affaire Dreyfus, Charlie Hebdo ou encore les religions. De quoi alimenter les discussions en classe.
D’après une source proche du dossier, il a été décidé de ne pas intégrer de caricatures représentant le prophète Mahomet, Jésus ou le Pape, pour éviter de jeter de l’huile sur le feu. Pour autant, le projet assume sa volonté de “caricaturer les croyances”, avec par exemple un dessin mettant en scène un rabin, un imam et un évêque.
Charlie Hebdo à l’honneur
Sans surprise, une place de choix est réservée à Charlie Hebdo dans cette sélection. Le journal satirique, qui a payé un lourd tribut à la liberté d’expression, est représenté à travers plusieurs dessins publiés avant et après l’attentat de 2015. Une façon de rendre hommage aux victimes tout en rappelant l’importance de pouvoir rire de tout.
La liberté ne se négocie pas.
Riss, directeur de la rédaction de Charlie Hebdo et rescapé de l’attentat
L’affaire Dreyfus et la IIIe République
Les lycéens plongeront également dans l’histoire avec une caricature sur l’affaire Dreyfus datant de 1898. Ce dessin, paru à l’époque dans Le Figaro, montre comment cette affaire a divisé la société française, jusque dans les familles. Un parallèle saisissant avec certains débats actuels.
Susciter le débat et développer l’esprit critique
Au-delà des dessins eux-mêmes, l’enjeu est d’apprendre aux élèves à analyser une caricature, à en comprendre le contexte et les ressorts. Des fiches pédagogiques et des scénarios de débats seront fournis aux enseignants pour les accompagner dans cette démarche. L’objectif : permettre aux lycéens de forger leur propre opinion sur ces sujets complexes.
La région assume le côté “militant” du projet, qui se veut une réponse à “l’autocensure” observée chez certains professeurs depuis l’assassinat de Samuel Paty. En abordant frontalement ces questions sensibles, elle espère contribuer à former des citoyens éclairés, capables d’exercer leur esprit critique.
Des réactions contrastées
L’annonce du projet a d’ores et déjà suscité des réactions variées. Si certains saluent le courage de la région, d’autres dénoncent une “instrumentalisation” de la liberté d’expression à des fins politiques. Les syndicats enseignants se montrent également divisés, entre ceux qui y voient une ressource pédagogique bienvenue et ceux qui craignent de nouvelles polémiques.
Une chose est sûre : le débat est lancé et il promet d’être animé. Reste à savoir comment les lycéens franciliens, premiers concernés, se saisiront de ces caricatures qui ont fait l’histoire. Un défi pédagogique passionnant pour les enseignants qui joueront un rôle clé dans la transmission de cet héritage républicain.