C’est un rendez-vous manqué pour la planète. Le tant attendu grand accord pour sauver la biodiversité n’a pu être conclu lors de la 16e conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP16) qui s’est tenue à Cali en Colombie. Faute de consensus sur le volet financier, les négociations ont été suspendues au petit matin du 2 novembre après 10 heures de disputes nocturnes. Les 196 pays membres de la Convention de l’ONU sur la diversité biologique (CDB) devront se retrouver “au premier trimestre 2025” pour tenter d’obtenir cet accord crucial, a annoncé samedi la présidente colombienne de la COP16.
Une feuille de route financière qui divise
Au cœur des désaccords : la feuille de route financière censée donner un coup d’accélérateur aux timides efforts de l’humanité pour enrayer la destruction de la nature d’ici 2030. Un objectif ambitieux adopté il y a deux ans à Montréal lors de la COP15, mais dont la mise en œuvre patine. Les pays en développement réclament des financements nouveaux et additionnels de la part des pays riches pour mettre en place des mesures de conservation sur leur territoire. Mais ces derniers trainent des pieds, invoquant leurs propres difficultés économiques et budgétaires.
Record d’affluence mais echec en vue
Malgré une affluence record de 23 000 participants, la plus importante jamais enregistrée pour une COP biodiversité, les délégations n’ont pu s’accorder sur un texte commun. Épuisés après 10 heures de tractations infructueuses, de nombreux négociateurs ont quitté la salle pour aller se coucher ou prendre leur vol retour, faisant perdre le quorum nécessaire pour poursuivre les débats. Un échec cinglant alors que la biodiversité connait un déclin sans précédent et que la planète s’enfonce dans ce que les scientifiques qualifient de 6e extinction de masse.
Un “mécanisme révolutionnaire” sur les ressources génétiques adopté
La conférence n’aura toutefois pas été un fiasco complet. Les pays ont adopté l’institution d’un fonds multilatéral pour redistribuer les bénéfices tirés de l’utilisation des informations de séquençage numérique (DSI) des ressources génétiques. Un “mécanisme révolutionnaire” selon la ministre colombienne de l’Environnement Susana Muhamad, qui “oblige le secteur privé à payer pour utiliser une ressource essentielle et convertit de l’argent privé en argent public à investir dans la conservation”.
La menace d’une planète appauvrie
Mais sans accord sur le cadre financier global, c’est tout l’édifice de la protection de la biodiversité qui vacille. Selon des sources proches des négociations, le budget nécessaire pour inverser le déclin du vivant d’ici 2030 se chiffrerait en centaines de milliards de dollars par an. Une somme colossale mais vitale pour éviter de précipiter la planète dans une ère d’appauvrissement irréversible, aux lourdes conséquences économiques et sociales.
La biodiversité, c’est notre assurance-vie sur cette planète. Nous devons comprendre notre interdépendance avec la nature et agir maintenant pour inverser sa destruction, avant qu’il ne soit trop tard.
Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations Unies
Aux dires de nombreux observateurs, le monde est à un tournant. Il doit choisir entre poursuivre sur la voie d’une économie prédatrice et destructrice du vivant, ou opérer une transformation profonde de nos modèles pour construire un avenir durable, en harmonie avec la nature. Un avenir auquel aspirent une majorité de citoyens comme l’ont montré de multiples sondages et manifestations, mais que les décideurs politiques semblent encore réticents à embrasser pleinement. Les prochaines échéances seront cruciales pour savoir de quel côté l’humanité fera pencher la balance.