Dans le nord d’Israël, un théâtre d’affrontements sanglants entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais, la nature se retrouve prise entre deux feux. Depuis plus d’un an, la faune et la flore locales subissent les conséquences dévastatrices de ce conflit qui ne semble pas près de s’éteindre. Un triste constat qui laisse présager de lourdes séquelles pour la biodiversité de la région.
Des oiseaux migrateurs désorientés et apeurés
La vallée de la Houla, joyau écologique abritant l’unique sanctuaire d’oiseaux migrateurs du pays, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Chaque soir, des nuées de grues cendrées viennent se poser près du lac Agamon, cherchant désespérément un havre de paix au milieu du vacarme des combats. Mais les détonations assourdissantes des roquettes et les interceptions aériennes sèment la panique parmi ces volatiles égarés.
“Le vacarme de la guerre, le bruit des interceptions, des roquettes qui tombent, les détonations assourdissantes, ce sont les bruits que les oiseaux entendent. C’est une énorme source de stress”
explique Inbar Rubin, responsable des opérations du Fonds national juif (KKL).
Avant l’éclatement du conflit, quelque 50 000 grues venaient passer l’hiver dans cette oasis de verdure. Un chiffre qui a chuté de 70% selon l’ornithologue Yossi Leshem. Flamants roses, pélicans, canards et rapaces ont également déserté ce paradis perdu, fuyant vers des cieux plus cléments.
Une faune blessée et traumatisée
Les animaux terrestres ne sont pas épargnés par cette guerre qui fait rage à leurs portes. Cerfs, porcs-épics, serpents et sangliers se retrouvent victimes d’éclats de roquettes ou piégés par les flammes qui dévorent leur habitat. Certains, comme ce sanglier atteint par un projectile, portent dans leur chair les stigmates de ce conflit qui les dépasse.
Ramadan Issa, qui gère la réserve naturelle de Tel Dan pour la Direction israélienne de la nature et des parcs (INPA), raconte avoir passé l’année écoulée à éteindre des incendies et à secourir des animaux blessés ou affolés par les combats. Un combat quotidien pour préserver ce qu’il reste de biodiversité dans cette zone meurtrie.
Des forêts calcinées et des écosystèmes bouleversés
Outre les pertes en vies animales, cette guerre laisse également derrière elle des paysages dévastés. Selon l’INPA, plus de 37 000 hectares de réserves naturelles, parcs nationaux et forêts ont été ravagés par les flammes en un peu plus d’un an. Dans la réserve de Tel Dan, des arbres centenaires ont été réduits en cendres, témoins impuissants d’une nature sacrifiée sur l’autel des conflits humains.
“Même si la guerre devait cesser dans un an, et j’espère qu’elle cessera dès que possible, son impact pourrait se faire sentir pendant encore de nombreuses années”
s’alarme Yossi Leshem.
Car si la végétation peut repousser rapidement, il faudra bien plus de temps pour que les écosystèmes retrouvent leur équilibre et leur richesse d’antan. Un constat amer pour tous ceux qui œuvrent à la préservation de ce patrimoine naturel unique.
La nature, victime collatérale des conflits humains
Cette guerre, qui oppose depuis plus d’un an Israël au Hezbollah libanais, est un triste rappel que la nature est souvent la grande oubliée des conflits humains. Prise en étau entre les tirs croisés, elle subit de plein fouet les conséquences de ces affrontements qui la dépassent et la blessent durablement.
Pourtant, comme le souligne Inbar Rubin, les dégâts infligés par la guerre à l’environnement sont mille fois pires que ceux causés par la présence de visiteurs dans les réserves naturelles. Une réalité qui devrait tous nous interpeller sur la nécessité de préserver ces sanctuaires de biodiversité, trop souvent sacrifiés sur l’autel de nos différends.
Car au-delà des pertes en vies animales et végétales, c’est tout un équilibre fragile qui est aujourd’hui menacé dans le nord d’Israël. Un équilibre dont dépendent non seulement la faune et la flore locales, mais aussi les générations futures qui risquent de grandir dans un monde appauvri de ses merveilles naturelles.
Il est temps de prendre conscience que chaque conflit, chaque balle tirée, chaque roquette lancée, a un impact bien au-delà des cibles visées. Que la nature, elle aussi, compte ses morts et ses blessés dans ces guerres qui ne sont pas les siennes. Et qu’il est de notre devoir, en tant qu’êtres humains, de tout mettre en œuvre pour préserver ce patrimoine inestimable dont nous sommes les gardiens éphémères.
Car si la nature est forte et résiliente, comme le rappelle Ramadan Issa en contemplant les premiers bourgeons qui percent timidement sous les cendres, elle n’est pas invincible pour autant. Et c’est à nous qu’il revient de panser ses plaies, de protéger ses trésors et de lui permettre de se régénérer loin du fracas des armes.
Puisse cette guerre, qui meurtrit chaque jour un peu plus les splendides paysages du nord d’Israël, prendre fin au plus vite. Pour que la paix revienne enfin sur ces terres tourmentées et que la nature, libérée de l’étau de la violence, puisse à nouveau s’épanouir dans toute sa diversité et sa beauté. Un vœu que partagent tous ceux qui, comme Inbar Rubin, Yossi Leshem ou Ramadan Issa, se battent au quotidien pour préserver ce joyau menacé.