C’est une rivalité qui fait vibrer le monde du rugby. Un an après leur affrontement épique en quart de finale de la Coupe du Monde 2023, remporté d’un souffle par les All Blacks (28-24), l’Irlande retrouve la Nouvelle-Zélande ce vendredi à Dublin pour un nouveau duel au sommet. L’occasion pour le XV du Trèfle de prendre sa revanche et d’écrire une nouvelle page de sa jeune mais intense rivalité avec les Kiwis.
Une rivalité née sur les cendres de déceptions irlandaises
Si les confrontations entre l’Irlande et la Nouvelle-Zélande sont devenues des rendez-vous incontournables, elles sont longtemps restées à sens unique. Avant leur première victoire historique en 2016 à Chicago, les Irlandais restaient sur une série de 27 défaites consécutives face aux hommes en noir. Un complexe d’infériorité renforcé par plusieurs revers cruels, à l’image de l’essai à la dernière minute de Ryan Crotty en 2013 qui avait arraché la victoire aux All Blacks (24-22).
Mais les choses ont changé ces dernières années. Portée par une génération dorée, l’Irlande a pris une nouvelle dimension, se hissant même à la première place du classement World Rugby fin 2022. En parallèle, la Nouvelle-Zélande a connu un certain déclin, enchaînant des défaites inhabituelles. De quoi rééquilibrer les forces et donner aux duels entre les deux nations une intensité nouvelle.
2016, le déclic irlandais
Tout a basculé un certain 5 novembre 2016 à Chicago. Ce jour-là, dans un Soldier Field à guichets fermés, l’Irlande réalise un exploit retentissant en dominant la Nouvelle-Zélande (40-29). Un succès historique, le premier en 111 ans de confrontations, symbole d’un rapport de force en train de s’inverser. Menés par un grand Jonathan Sexton, les Irlandais signent un match référence, inscrivant 5 essais et résistant héroïquement au retour des All Blacks en fin de match.
C’est un moment que je n’oublierai jamais. Battre les All Blacks, c’était un rêve devenu réalité. On a prouvé qu’on en était capables.
– Jamie Heaslip, troisième ligne du XV du Trèfle ce jour-là
Un nouveau classique du rugby mondial
Depuis ce fameux match à Chicago, chaque Irlande-Nouvelle Zélande apporte son lot de rebondissements et d’intensité. En 2018, les Irlandais récidivent avec une victoire retentissante à Dublin (16-9). L’année suivante, ils subissent la loi des All Blacks lors d’un quart de finale de Coupe du Monde à sens unique (46-14). Mais la dernière confrontation, il y a un an jour pour jour en quart de finale du Mondial français, a définitivement installé ce duel comme un classique du rugby mondial.
Malgré une entame parfaite et 19 points d’avance, les Irlandais s’étaient finalement inclinés dans les derniers instants sous les coups de boutoir des All Blacks. Une cruelle désillusion qui a laissé des traces, et une énorme envie de revanche. D’autant que les hommes d’Andy Farrell sont probablement au sommet de leur art, invaincus depuis ce revers et impressionnants vainqueurs de leurs trois tests de l’automne.
Les clés du match
Pour espérer s’imposer face aux All Blacks, l’Irlande devra donc réaliser un match parfait, tant défensivement qu’offensivement. Cela passera par une grosse performance de son paquet d’avants, emmené par les inusables Jonathan Sexton et Conor Murray à la charnière. La bataille du milieu de terrain sera également cruciale, avec un duel à distance entre Garry Ringrose et Rieko Ioane.
Côté All Blacks, l’enjeu sera de confirmer la dynamique positive lancée lors du Rugby Championship avec 5 victoires en 6 matchs. Les retours de cadres comme Brodie Retallick ou Sam Whitelock devraient apporter de la densité et de l’expérience à un pack qui en avait cruellement manqué lors du dernier affrontement. À noter également la présence sur le banc de Beauden Barrett et TJ Perenara, deux impact players qui peuvent faire basculer un match.
Un contexte particulier
Au-delà de l’enjeu sportif, ce choc entre l’Irlande et la Nouvelle-Zélande se jouera dans un contexte assez particulier. Le match se tiendra en effet un an jour pour jour après le décès tragique de Sean Wainui, jeune ailier des Chiefs et des Māori All Blacks, dans un accident de voiture. Un drame qui avait suscité une immense émotion dans le rugby néo-zélandais et au-delà.
Les deux sélections devraient donc avoir une pensée pour ce jeune talent parti trop tôt. Selon des sources proches de la fédération néo-zélandaise, un hommage pourrait lui être rendu avant le coup d’envoi. Une perspective qui devrait encore rehausser la dimension émotionnelle de ce match pas comme les autres.
L’Irlande face à son histoire
Au-delà d’une simple revanche, c’est un véritable défi que s’apprête à relever l’Irlande ce vendredi. Celui de confirmer son statut de prétendant à la victoire finale lors de la prochaine Coupe du Monde, qui se tiendra en 2025 en Angleterre. Après des années à jouer les trouble-fêtes, le XV du Trèfle veut désormais s’installer durablement dans le club très fermé des favoris.
Mais pour cela, il faudra enchaîner les performances de haut vol face aux cadors mondiaux. Et quoi de mieux qu’une victoire face aux All Blacks, triple champions du monde, pour asseoir ses ambitions ? Les Irlandais en ont les moyens, eux qui trustent les premières places du classement mondial depuis plusieurs mois maintenant. Reste à concrétiser cette domination dans les grands rendez-vous.
Voilà pourquoi ce match face à la Nouvelle-Zélande revêt une importance capitale. En cas de succès, l’Irlande franchirait un nouveau palier et s’installerait un peu plus dans la peau d’un prétendant crédible au titre mondial. Une défaite, en revanche, viendrait rappeler que le chemin est encore long. Les hommes d’Andy Farrell jouent donc très gros, et ils en sont parfaitement conscients.
On sait que c’est un match qui peut nous faire passer un cap. Battre les All Blacks, ça vous place tout de suite dans une autre dimension. C’est un défi immense mais on a les armes pour le relever.
– Jonathan Sexton, demi d’ouverture et capitaine de l’Irlande
L’Irlande jouera donc très gros ce vendredi à l’Aviva Stadium. Face à des All Blacks revanchards et un public irlandais bouillant, les coéquipiers de Jonathan Sexton auront l’occasion d’écrire l’une des plus belles pages de leur histoire. Réponse vers 23h, au terme d’une bataille qui s’annonce déjà légendaire.